Tunisie: des salafistes perturbent les cours à l’université de la Manouba
Un groupe de salafistes réclamant l’inscription d’étudiantes en niqab et la non-mixité dans les classes ont perturbé des cours et campaient lundi devant le bureau du doyen de la faculté de lettres de La Manouba, à 25 km à l’ouest de Tunis, a-t-on appris de source universitaire.
« Un groupe de salafistes, vêtus comme des Afghans, campent depuis le début de l’après-midi devant mon bureau », a déclaré par téléphone à l’AFP Habib Kazdaghli, le doyen de la faculté.
Selon lui, les salafistes, qui se disent étudiants de la faculté, sont quelques dizaines, et ont déjà interrompu dans la matinée un cours dans le département d’anglais.
« Ils réclament l’inscription des filles en niqab, une salle de prières dans l’enceinte du campus, la non-mixité des cours, l’interdiction pour des femmes d’enseigner à des étudiants hommes, et vice-versa », a-t-il indiqué.
« C’est la première fois que ça prend une telle tournure », a-t-il dit, soulignant que les professeurs avaient tenu une réunion lundi matin pour définir une réponse face à de telles revendications.
M. Kazdaghli a indiqué être en contact avec les autorités éducatives et policières, tout en espérant que le problème se réglerait sans intervention extérieure.
Le ministère de l’Enseignement supérieur a condamné « fermement » l’incident, affirmant que « tout recours à la violence est inadmissible et intolérable ».
Interrogé par l’AFP sur le port du niqab –voile cachant le visage et le corps de pied en cap– le ministère considère que « selon les dispositions régulières en vigueur chaque étudiant doit pouvoir être identifié avant l’accès à l’université, pour des raisons pédagogique et sécuritaire ».
En l’absence d’un texte juridique spécifique sur le port du niqab, phénomène nouveau en Tunisie, les doyens de facultés peuvent s’appuyer sur une circulaire de 2005 obligeant à l’identification des étudiants.
Des incidents similaires à celui qui a eu lieu lundi à la Faculté des lettres de la Manouba se sont multipliés au cours des dernières semaines. Début octobre, des salafistes avaient envahi la Faculté des lettres de Sousse (140 km au sud de Tunis) pour protester contre le refus d’inscription d’une étudiante en niqab, et le doyen avait reçu des menaces de mort.
En novembre, des étudiants ont tenté d’imposer la non-mixité à la cantine scolaire de l’université de Gabès (sud).
D’autres incidents tels que des professeures insultées en raison de leur tenue vestimentaire ou des cours de dessin empêchés car les représentations sont proscrites par l’islam ont été rapportés dans la presse.
Composés de diverses tendances, les salafistes sont minoritaires dans le camp islamiste représenté par le parti Ennahda en Tunisie, mais sont très actifs et contrôlent plusieurs dizaines de mosquées dans le pays, selon le politologue Slah Jourchi, spécialiste des réseaux islamistes.
La Matinale.
Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.
Consultez notre politique de gestion des données personnelles
Les plus lus – Politique
- Sexe, pouvoir et vidéos : de quoi l’affaire Baltasar est-elle le nom ?
- Législatives au Sénégal : Pastef donné vainqueur
- Au Bénin, arrestation de l’ancien directeur de la police
- L’Algérie doit-elle avoir peur de Marco Rubio, le nouveau secrétaire d’État améric...
- Mali : les soutiens de la junte ripostent après les propos incendiaires de Choguel...