Sénégal: le mouvement « Y’en a marre » bouscule la donne dans le combat démocratique

Le mouvement « Y’en a marre », créé en janvier par des rappeurs pour exprimer « le ras-le-bol » au Sénégal, a bousculé partis et syndicats en s’affirmant comme un levier dans le combat pour pousser le président Abdoulaye Wade à renoncer à briguer un troisième mandat en 2012.

Sénégal: le mouvement « Y’en a marre » bouscule la donne dans le combat démocratique © AFP

Sénégal: le mouvement « Y’en a marre » bouscule la donne dans le combat démocratique © AFP

Publié le 13 juillet 2011 Lecture : 2 minutes.

« Nous voulons faire une révolution démocratique au Sénégal, en changeant les choses par le vote », déclare Fadel Barro, journaliste et coordonnateur du mouvement créé par un groupe d’amis dont le plus âgé a 33 ans.

« Le 16 janvier, il y avait 20 heures de coupures d’électricité (à Dakar). Nous avons dit qu’il fallait faire quelque chose. Le mouvement a été porté par des rappeurs du groupe « Keur Gui » qui avaient un passé dans la contestation » des pouvoirs, ajoute-t-il.

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Le mouvement, qui se veut « volontaire, pacifique, laïque et indépendant des partis », mobilise une large population, la jeunesse surtout qui se reconnait dans ses appels à « changer le système et s’occuper des préoccupations des Sénégalais », selon Fadel Barro.

L’opposant Ibrahima Sène y voit lui « l’expression d’un ras-le-bol » de la jeunesse.

Et un responsable de la majorité présidentielle, Mbaye Jacques Diop, avait averti: ce mouvement « peut être dangereux » pour le pouvoir du président Wade.

Le 22 juin, veille de l’examen par les députés d’un projet de loi prévoyant l’élection simultanée d’un président et d’un vice-président à la présidentielle de 2012, des responsables de « Y’en a marre » ont été les premiers à défier les policiers à Dakar pour empêcher l’adoption du texte. Plusieurs ont été arrêtés.

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Depuis, « Y en a marre » s’est ancré dans le Mouvement du 23 juin, coalition de partis d’opposition et d’organisations de la société civile, qui tire son nom du jour où les manifestations ont contraint Wade à retirer le texte qui devait permettre d’élire président et vice-président avec 25% des voix.

« Entre ce que le président Wade avait promis et ce qu’il a réalisé, c’est le jour et la nuit », assène le rappeur Cyrill Touré dit « Thiat ».

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Il lui reproche sa « gestion gabegique » et de s’être détourné des préoccupations des Sénégalais pour avoir notamment « préféré changer les moteurs de son avion à la place de ceux du navire Le Joola », qui assurait la désserte Dakar-Ziguinchor. Son naufrage en septembre 2002 a fait près de 1. 900 morts.

« Wade doit déclarer qu’il n’est pas candidat pour sortir par la grande porte. La Constitution et son âge ne lui permettent pas de se présenter », dit-il.

Abdoulaye Wade, 85 ans, élu une première fois en 2000 et réélu en 2007 pour un mandat de cinq ans, est candidat à sa propre succession en 2012.

A l’approche de cette échéance, le mouvement mène une campagne pour inciter les Sénégalais à s’inscrire sur les listes électorales, à travers un slogan « ma carte, mon arme ».

« Le combat ne s’arrête pas en 2012 », dit « Thiat », car « Y’en a marre » veut sensibiliser pour voir éclore un « Nouveau type de Sénégalais » (NTS), qui refuse de monter « dans un bus surchargé, ne jette pas de déchets dans la rue, refuse de corrompre un policier, un Sénégalais conscient de ses droits et devoirs ».

Ces prises de position valent à ses responsables « harcèlement, intimidation, tentatives de corruption de l’autorité qui veut casser le mouvement », note Fadel Barro.

Selon Malick Ndiaye, socioloque à l’université de Dakar, « Y’en a marre est un interprète du mécontentement social au Sénégal » et mène son action « au nez et à la barbe des cadres traditionnels » de contestation que sont les partis et les syndicats.

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