Dans le Nord-Nigeria, la désolation après les violences post-électorales

Les élections de gouverneurs ce mardi au Nigeria sont le cadet des soucis d’Abdullahi Danjuma, commerçant de Kafanchan (nord), un épicentre des récentes et meurtrières émeutes post-électorales. « Tout est parti », se désole-t-il sur les ruines d’un marché.

Dans le Nord-Nigeria, la désolation après les violences post-électorales © AFP

Dans le Nord-Nigeria, la désolation après les violences post-électorales © AFP

Publié le 26 avril 2011 Lecture : 2 minutes.

Kafanchan, Zonkwa et Zangon-Kataf sont les trois localités de l’Etat de Kaduna (nord) où une ONG affirme avoir décompté la plupart des 500 morts de ces violences qui ont suivi l’élection présidentielle du 16 avril.

Les autorités, qui refusent de fournir un bilan, ont décidé qu’en raison des émeutes, Kaduna et son Etat voisin de Bauchi organiseront les élections des gouverneurs jeudi.

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Ces scrutins se déroulaient mardi dans deux tiers des 36 Etats du pays, dans l’indifférence à Kafanchan. La ville ressemble à une zone de guerre, avec des vestiges de saccages, destructions et incendies, comme au marché central où M. Danjuma avait sa boutique de vente de tissus.

« Et maintenant, tout est parti », constate, amer, le commerçant, qui s’est réfugié avec sa femme et leurs neuf enfants dans un commissariat de police voisin pour échapper aux émeutiers.

« Dans le carnage, j’ai perdu tout le fruit de mon travail », dit de son côté Temple Emmanuel, 25 ans, également vendeur au marché central.

Les émeutes ont essentiellement affecté Nord, d’où est originaire l’ex-dictateur militaire Muhammadu Buhari, défait à la présidentielle. Ce dernier, comme la majorité de la population de cette partie du pays, est musulman.

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Le général Buhari a été battu aux urnes par le président sortant Goodluck Jonathan, originaire du Sud et, comme la majorité de cette autre partie du pays, chrétien.

Muhammadu Buhari, crédité de 31% des voix derrière Goodluck Jonathan (57%), conteste les résultats du scrutin. Ses partisans figuraient parmi les protestataires descendus dans les rues dans le Nord, après la présidentielle et les affrontements ont été marqués par des attaques intercommunautaires. Des églises et des mosquées ont été brûlées.

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Pour autant, « ces violences n’ont rien à voir avec la religion parce qu’ici, au marché, il y a à la fois des chrétiens et des musulmans. Tout le monde a perdu ce qu’il avait », soutient Temple Emmanuel.

Ce point de vue était partagé par plusieurs analystes interrogés par l’AFP, pour qui c’est plutôt la pauvreté qui est à l’origine des violences : le Nord a longtemps été économiquement marginalisé par rapport au Sud, où sont situées les fabuleuses richesses en pétrole et gaz faisant du Nigeria le premier producteur pétrolier d’Afrique. Un géant économique dont 70% de la population reste pauvre.

Pour beaucoup, dans la foule de gens en colère qui se sont armés de machettes, gourdins, ont attaqué personnes et biens, s’exprimait surtout le ressentiment face à cette pauvreté et à la corruption, qui touche tous les secteurs.

Cette colère semble avoir été particulièrement intense à Zonkwa, surveillée par la police qui interdit aux journalistes de rester dans cette localité située au sud de la ville de Kaduna, capitale de l’Etat éponyme.

Un responsable, qui refuse de s’identifier, peine à décrire ce qui s’y est passé. « Je ne voudrais pas utiliser le mot +massacre+. Mais en certains endroits, c’était épouvantable ».

Des blessés ont été conduits dans un hôpital de Kaduna-ville. Parmi eux, figure Samson Adeoye, un étudiant de 26 ans. Attaqué à la machette, « il est inconscient depuis une semaine », dit son frère cadet, qui veille sur lui avec leur mère. « Les émeutiers lui ont presque coupé la tête en deux ».

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