Alliot-Marie inflexible, crainte d’affaiblissement de la diplomatie
La ministre française des Affaires étrangères Michèle Alliot-Marie continuait jeudi d’exclure toute démission du fait de ses vacances tunisiennes, alors que l’opposition dénonçait un scandale d’Etat et un affaiblissement de la France, redoublant de pressions pour la faire partir.
« Calamity MAM », « mensonges » et « contre-vérités »: reflétant l’indignation de l’opposition et les doutes d’une partie de la majorité de droite, la presse française se montrait sévère pour la chef de la diplomatie.
Soutenue par le président Nicolas Sarkozy, « Alliot-Marie plie mais ne rompt pas » et « embarrasse de plus en plus son camp », notait le quotidien de gauche Libération.
Jeudi matin, l’opposition a ostensiblement boycotté une audition de la ministre devant la commission des Affaires étrangères du Sénat, réclamant au président Sarkozy de « prendre ses responsabilités » en limogeant une chef de la diplomatie considérée comme « discréditée ».
Dans la majorité même, on s’inquiète d’un discrédit et d’une paralysie de la diplomatie, en raison des gaffes, omissions et demi-vérités dont la ministre est accusée dans l’affaire de ses vacances tunisiennes.
Depuis qu’elle a proposé le « savoir-faire » sécuritaire français au régime Ben Ali en pleine répression, elle ne s’est pas rendue en Tunisie, dont la France est pourtant le premier partenaire et alors que les diplomates européens s’y succèdent.
Tunis a toujours du mal à digérer le ralliement tardif de Paris et, alors que la France préside le G8/G20, sa voix semble peu audible dans le monde arabe, secoué par un vent de liberté que Paris n’a pas vu venir.
Le nouvel ambassadeur de France en Tunisie, Boris Boillon, a reconnu le malaise en déclarant jeudi vouloir écrire « une nouvelle page » dans les relations bilatérales franco-tunisiennes, ce qui « suppose un autre style, une autre approche ».
« Je suis ici pour découvrir ce qu’on a pas eu l’occasion de connaître, découvrir la société civile » et les partis politiques, a-t-il dit à Tunis à des journalistes.
La polémique avait démarré quand la ministre avait dû s’expliquer début février sur ses vacances en Tunisie fin 2010, où elle avait profité du jet privé d’un riche patron tunisien ayant été lié en affaires au clan Ben Ali, Aziz Miled, présenté comme un « ami de la famille ».
L’ »affaire MAM » a rebondi mercredi, avec de nouvelles révélations sur un bref coup de fil au président Ben Ali en pleine révolution et une transaction immobilière entre les parents de la ministre et M. Miled.
La gauche a de nouveau réclamé la tête de la ministre, tandis que Nicolas Sarkozy lui renouvelait sa confiance.
Jeudi, le quotidien populaire Le Parisien soulignait le dilemme du président: comment en effet « sortir MAM sans sortir Fillon », observait-il, rappelant que le Premier ministre François Fillon s’était vu reprocher d’avoir été en fin d’année l’invité de l’ex-président égyptien Hosni Moubarak.
Devant les députés, Michèle Alliot-Marie s’est défendue, accusant à son tour l’opposition de la traquer de manière « abjecte » en utilisant ses parents pour l’atteindre et d’être silencieuse sur les « grands dossiers » comme la Côte d’Ivoire ou le Proche Orient.
Ces explications n’ont nullement désamorcé les critiques.
Le député écologiste Noël Mamère a relevé que « dans n’importe quel autre pays de l’Union européenne, on lui aurait demandé de démissionner », tandis que la première secrétaire du Parti socialiste, Martine Aubry, a appelé à des « sanctions » pour faire cesser « les turpitudes ».
Mais Mme Alliot-Marie ne semble pas ébranlée. « MAM a le cuir épais, l’idée même de démissionner ne lui traverse pas l’esprit », selon un de ses collègues.
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