Abyei, une poudrière à la frontière entre le Nord et le Sud du Soudan

Le regain de tensions dans l’enclave soudanaise d’Abyei témoigne de la précarité de la situation dans cette région disputée, devenue au fils des ans une « cause sacrée » pour le Nord et le Sud au risque d’envenimer les relations entre les deux parties.

Publié le 9 janvier 2011 Lecture : 2 minutes.

Lutte pour l’accès à l’eau, rivalité historique, champs pétroliers et radicalisation des esprits: Abyei a tous les ingrédients d’un cocktail explosif. De nouveaux affrontements entre tribus rivales Dinka et Messiriya ont fait au moins huit morts dimanche.

« Ce matin, nos vaches se rendaient à la rivière pour boire de l’eau lorsque 400 Dinkas ont coupé la route. Il y a eu des affrontements à une trentaine de km au nord-est de la ville d’Abyei », a dit à l’AFP Hamid al-Ansari, l’un des chefs des nomades arabes Messiriya.

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« Les combats se sont poursuivis jusqu’à 15H30 (12H30 GMT). Nous avons perdu huit hommes au combat et 20 ont été blessés », a-t-il ajouté.

Des responsables de la tribu Dinka Ngok ont confirmé des affrontements dimanche, affirmant avoir perdu neuf hommes depuis vendredi.

La région, habitée principalement par les sudistes Dinka Ngok, est traversée chaque année par les Messiriya dans leur migration vers le Sud-Soudan en quête de pâturage. Mais si le Sud fait sécession, les Messiriya craignent de ne plus avoir accès à Abyei, leur « porte d’entrée » vers le Sud-Soudan.

Un référendum sur le rattachement d’Abyei au Nord ou au Sud devait avoir lieu ce dimanche mais il a été repoussé sine die en raison d’un différend sur le droit de vote des électeurs.

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La loi référendaire accordait le droit de vote aux Dinka Ngok, qui estiment ne plus avoir à faire de compromis, mais pas aux Messiriya, qui avaient promis de faire déraper le scrutin s’ils ne pouvaient y participer. Des négociations en vue de trouver une solution à la crise ont échoué.

A cette lutte entre tribus se greffent les tensions entre les gouvernements du Nord et du Sud-Soudan, qui s’accusent mutuellement de soutenir les deux groupes.

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« Si le parti du Congrès national (NCP du président Béchir, nord) veut la paix et la coopération avec le Sud, il doit coopérer avec le SPLM (ex-rebelles au pouvoir au Sud) et accepter la mise en oeuvre de l’accord d’Abyei », a souligné dimanche Deng Alor, ministre sudiste originaire d’Abyei.

La cour permanente d’arbitrage de La Haye avait circonscrit en 2009 le territoire d’Abyei à une zone d’environ 10. 000 km2 habité principalement par les Sudistes Dinka Ngok et exclu de cette zone les précieux puits du bassin pétrolifère de Heglig qui ont échoué du côté nord de la frontière.

« Les esprits se radicalisent », regrette un observateur de la scène soudanaise.

« C’est devenu une question symbolique, les deux camps sont en train d’en faire une cause sacrée pour satisfaire leur clientèle », déplore un diplomate sous le couvert de l’anonymat.

Pour l’instant, les armées du Nord et du Sud-Soudan n’ont pas le droit de rentrer à Abyei, patrouillée par l’ONU et des unités mixtes, mais si l’une des deux armées pénétraient dans Abyei, la situation pourrait dégénérer.

« Le Soudan a le potentiel pour être le théâtre de la plus importante guerre conventionnelle sur la planète si le Sud et le Nord retournent en guerre », estime John Prendergast, de l’organisation américaine Enough Project, qui s’est rendu cette semaine à Abyei.

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