Mozambique: les ex-ouvriers en RDA réclament les salaires qui leur sont dûs

De ses années comme ouvrier en Allemagne de l’est, le Mozambicain Anacleto Amade conserve une poignée de photos, des souvenirs de camaraderie et. . . des rêves de richesse depuis longtemps envolés, son gouvernement l’ayant spolié d’une partie de ses salaires.

Mozambique: les ex-ouvriers en RDA réclament les salaires qui leur sont dûs © AFP

Mozambique: les ex-ouvriers en RDA réclament les salaires qui leur sont dûs © AFP

Publié le 15 septembre 2010 Lecture : 2 minutes.

« Quand je revois ces photos, l’émotion est toujours énorme. Une émotion incroyable car les histoires vécues ne se répètent pas », confie-t-il à l’AFP, en montrant une image en noir et blanc où il marche sous la neige dans les rues de Karl Marx Stadt (actuellement Chemnitz, sud-est).

Comme lui, environ 16. 000 travailleurs mozambicains ont travaillé dans les années 80 dans les aciéries, les usines textiles ou les chantiers de République démocratique d’Allemagne (RDA) dans l’espoir d’y constituer un petit pactole et d’apprendre un métier.

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En vertu d’un accord signé en 1979 entre les deux régimes marxistes, ils n’ont reçu qu’environ 40% de leurs salaires. Le reste était versé au gouvernement mozambicain, censé conserver l’argent pour eux.

« Quand nous hommes rentrés, après la chute du Mur de Berlin, les Blancs, je veux dire nos chefs, nous on dit : +les gars vous allez avoir plein d’argent au Mozambique, vous allez bien gagner votre vie, pouvoir ouvrir un restaurant!+ Moi, ce restaurant, je l’imaginais déjà! », se rappelle Anacleto.

Las, à leur retour, ils ont reçu en tout et pour tout 350 dollars (270 euros) chacun, bien loin des sommes imaginées.

« Les autorités nous ont dit qu’elles n’avaient pas d’argent. Pourtant l’argent leur a été transféré », s’insurge Zeca Cossa Cossa, le président de l’association Madgerman (pour « Made in Germany ») qui représente ces anciens émigrés.

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Pour lui, le groupe a été envoyé en Allemagne de l’Est afin de rembourser les dettes du régime mozambicain, qui avait acheté beaucoup d’armes à son allié pour lutter contre les rebelles du Mouvement de la résistance du Mozambique (Renamo) lors de la guerre civile (1976-1992).

« Nous avons été envoyés pour effacer l’ardoise du Mozambique », dit-il. « Nous avons été utilisés comme des esclaves. « 

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Depuis des années, des dizaines de « Madgermans » manifestent chaque mercredi à Maputo pour réclamer leur dû. A deux reprises, ils ont même tenté des attaques contre le Parlement et ont brièvement occupé en 2004 l’ambassade d’Allemagne au Mozambique.

En vain. Faute de ressources, le gouvernement a définitivement fermé le dossier après avoir promis de verser une partie des salaires à seulement 1. 800 « Madgermans », selon la radio d’Etat.

Or, leur situation n’est pas rose: la plupart sont au chômage et passent leur journée devant le « QG » du mouvement, d’anciens WC publics reconvertis en local associatif et décorés du drapeau allemand.

Leur situation est la norme au Mozambique, où 60% de la population est sans emploi malgré une croissance soutenue depuis la fin du conflit civil.

Mais le groupe est convaincu d’être tenu à l’écart du marché du travail à cause de son militantisme. « Au Mozambique, quand vous l’ouvrez, on vous tire dessus », assure le leader, en référence à un incident mortel survenu lors d’une de leurs manifestations en 2003.

« Même si nous trouvons un travail, dès que notre employeur découvre que nous sommes des Madgerman, il nous renvoie », assure Rose Ester Libombo. « Il pense que nous sommes des causeurs de troubles, juste parce que nous avons réclamé nos droits. « 

« Ils nous traitent de marginaux, de dérangés », ajoute cette quadragénaire à la voix rauque, qui a passé deux ans dans une usine de lampes à Erfurt.

Interrogée sur son avenir, elle sourit tristement: « je n’ai aucun projet, il faut de l’argent pour faire des plans. « 

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