En 20 ans, le zouglou est devenu la bande-son de la jeunesse ivoirienne

Sortie il y a 20 ans des cités universitaires d?Abidjan dans le fracas des combats démocratiques, la musique zouglou est parvenue à réunir sous sa bannière la jeunesse d?une Côte d?Ivoire divisée, et elle entend continuer à faire danser à travers l?Afrique et au-delà.

En 20 ans, le zouglou est devenu la bande-son de la jeunesse ivoirienne © AFP

En 20 ans, le zouglou est devenu la bande-son de la jeunesse ivoirienne © AFP

Publié le 15 août 2010 Lecture : 2 minutes.

Au début des années 2000, le groupe Magic System, formé de quatre garçons venus des quartiers populaires de la capitale économique ivoirienne, a donné une notoriété internationale à ce rythme entraînant grâce au tube « Premier Gaou », fable sur les déboires sentimentaux d?un jeune homme naïf.

L?acte de naissance du zouglou remonte à 1990. En pleine fin de règne du « père de la nation » Félix Houphouët-Boigny (1960-1993), c?est l?année de l?introduction du multipartisme et de la création de la Fédération estudiantine de Côte d?Ivoire (Fesci), un syndicat appelé à devenir aussi puissant que sulfureux en raison de ses pratiques parfois violentes.

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Rassemblés tous les soirs sur les espaces verts des campus de la métropole, des étudiants de la Fesci chantent alors au son des tambours leur quotidien, et dénoncent leurs conditions de vie : la bande-son d?Abidjan est née.

Les « Parents du campus » est le premier groupe à sortir un disque zouglou: le titre « Gboklo Koffi » (surnom de la hyène dans les contes traditionnels ivoiriens, employé ici pour désigner Houphouët-Boigny) fait accéder au succès cette musique frondeuse et ancrée dans le folklore national.

Depuis, la fièvre « zougloutique » n?a pas baissé, en dépit des soubresauts ivoiriens des dernières années.

Alors que le pays est coupé en deux depuis le putsch raté de 2002, « nous avons la chance de disposer d’un rythme fédérateur dans lequel tous les Ivoiriens se retrouvent », se réjouit le promoteur Angelo Kabila.

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« Le zouglou est devenu le porte-étendard de la musique ivoirienne », dit à l?AFP M. Kabila, qui en mai dernier a dédié à ce 20e anniversaire son Festival international du zouglou (FIZ) d?Abidjan, en présence d?une cinquantaine d?artistes.

Si elle a été pendant un moment associée aux « jeunes patriotes », partisans radicaux du pouvoir (leur chef Charles Blé Goudé est d?ailleurs un entrepreneur de l?industrie zouglou), cette musique a été adoptée par tous les camps.

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Les prestations des « zougloumen » sont ainsi un ingrédient obligé des meetings de l’opposition comme des tenants du régime, où l?on « libère » (danse) avec d?amples mouvements des bras.

« La force du zouglou réside dans la portée des messages qui expriment tout haut ce que le peuple pense tout bas », explique Georges Aboké, ex-animateur vedette à la télévision ivoirienne.

Perpétuant l?esprit des débuts, certains chanteurs se montrent très critiques. La corruption est une cible de choix. Pour l?accès aux emplois publics par exemple: « on passe les concours, on attend les résultats, c’est le résultat qui attend notre argent », chante le duo Yodé et Siro, tout en gardant un brin de nonchalance dans le réquisitoire.

Ce rythme et ces paroles souvent acides ont conquis les pistes de danse en Afrique francophone, à l?image de la chanson « Abidjan Farot » d?Espoir 2000.

« Véhiculés en français, nos messages parlent autant en Côte d’Ivoire qu’aux populations de Kinshasa, Brazzaville, Lomé, Yaoundé. . . . « , explique le leader du groupe, Pat Sako.

Un succès qui donne des idées à des promoteurs culturels ivoiriens, soucieux d?amplifier un mouvement qui a déjà séduit en France.

Toutefois, la lutte commence sur les trottoirs d?Abidjan : les disques de zouglou piratés s?y achètent pour une bouchée de pain, compromettant l?essor de cette musique.

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