Cameroun: les enfants face au fléau de la malnutrition
Moktar Abatcha, un enfant camerounais de 18 mois, ne pèse pas lourd dans les bras de sa mère, Falmata Ousmanou qui essaie, malgré ses hurlements de douleur, de l’extraire du drap de l’hôpital de Maroua (extrême-nord), où on le soigne pour malnutrition.
Chaque année, la malnutrition tue au moins 45. 000 enfants de moins de cinq ans au Cameroun, selon le Fonds des Nations unies pour l’enfance (Unicef). En juillet, elle a été à l’origine du décès de six enfants admis à l’hôpital de district de Kousseri (extrême-nord).
Dans le nord du pays 115. 000 enfants souffrent de malnutrition aiguë globale (GAM-insuffisance de poids par rapport à la taille), selon l’Unicef.
La région est touchée par une crise alimentaire après une mauvaise campagne agricole 2009-2010 qui affecte plusieurs pays du Sahel, notamment le Tchad, le Niger et le Mali. Les cas de malnutrition y augmentent sensiblement en période de soudure, (juillet-septembre) au cours de laquelle la nourriture est rare.
Plusieurs raisons expliquent la malnutrition infantile au nord du Cameroun. « Nous avons des causes médicales (manque de soins essentiels notamment) », souligne Flaubert Danbe, responsable nutrition à la délégation régionale à la Santé de l’Extrême-Nord. Mais il y a aussi « l’ignorance de certaines mamans qui ne savent pas quoi donner à leurs enfants et/ou, la pauvreté », ajoute-t-il.
« Beaucoup de parents (du nord) confient leurs enfants aux grands-parents qui ne parviennent pas à les nourrir comme il se doit », indique pour sa part le docteur Laurent Djontu, pédiatre à l’hôpital de Kousseri.
Par ailleurs, les mères ne respectent pas toujours les prescriptions de spécialistes sur « l’allaitement maternel exclusif », préférant « l’allaitement artificiel », ce qui expose également leurs bébés à la malnutrition, selon le docteur Djontu.
A sa naissance, Moktar n’a pas été nourri au lait maternel parce le sein de sa mère ne coulait pas, selon elle.
« C’est depuis l’âge de 11 mois que je le nourris à la bouillie de maïs qu’il a commencé à maigrir », explique Falmata.
« Parfois, la bouillie n’est pas complète. Il arrive aussi que je n’en ai pas pour mon enfant parce que je suis pauvre », poursuit la jeune maman, divorcée deux fois et qui doit nourrir seule ses trois enfants (un quatrième est décédé).
A Yaoundé, la capitale, les problèmes de malnutrition demeurent très peu connus, notamment des décideurs. « Lorsque certains responsables d’administrations (publiques) découvrent des photos d’enfants malnutris, ils ont du mal à croire qu’elles ont été prises au Cameroun », dit, sous le sceau de l’anonymat, un fonctionnaire du ministère de la Santé.
En 2008, le ministère de la Santé a lancé un programme de prise en charge médicale et nutritionnelle des enfants malnutris, couvrant 20 des 43 districts de santé des régions du Nord et de l’Extrême-Nord.
Mais, selon des sources concordantes, les aliments fournis par l’Unicef dans le cadre de cette initiative sont souvent périmés à leur arrivée dans les centres communautaires de distribution.
Le Programme alimentaire mondial (PAM) envisage d’apporter une assistance alimentaire durant six mois aux populations du nord afin d’atténuer les effets de la crise alimentaire.
« L’aide d’urgence est bonne mais elle n’est pas durable. Elle crée la dépendance », relève Valéry Nodem, responsable du Réseau de lutte contre la faim (Rélufa) au Cameroun.
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