Niger: pour survivre à la crise alimentaire, les éleveurs bradent le bétail

Fatima regarde avec dépit les billets de banque qu’on vient de lui donner: « c’est vil prix, mon mouton vaut deux fois plus, mais je n’y peux rien! ».

Niger: pour survivre à la crise alimentaire, les éleveurs bradent le bétail © AFP

Niger: pour survivre à la crise alimentaire, les éleveurs bradent le bétail © AFP

Publié le 22 avril 2010 Lecture : 2 minutes.

Alors qu’une crise alimentaire frappe au Niger les hommes et leur bétail, au marché de Tibiri, dans la région de Maradi (centre-sud), on est contraint de brader les animaux.

A l’issue de la campagne 2009 marquée par un fort manque d’eau, le pays a enregistré un déficit fourrager de plus de 16 millions de tonnes, soit les deux tiers des besoins de nourriture du cheptel national, estimé à quelque 35 millions de têtes.

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Déjà en 2005, une grave sécheresse avait décimé les troupeaux au Niger, où l’élevage est le second pilier de l’économie (15% du PIB), après l’agriculture (40%).

« Cette année encore, la situation est extrêmement grave et c’est un schéma apocalyptique qui se dessine pour les troupeaux », s’alarme Hassane Baka, président de l’Association régionale des éleveurs (Aren) de Maradi.

La peur de mourir de faim et celle de perdre tout leur bétail poussent de nombreux éleveurs à brader leur bêtes pour s’acheter à manger et acquérir du fourrage pour sauver quelques animaux.

Leur long bâton de berger à la main et la tête enveloppée dans des turbans, des éleveurs escortent à pied des animaux décharnés au marché de Tibiri, où ils espèrent les vendre.

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« A Diffa, une grosse vache en pleine santé qui se vendait à quelque 100. 000 FCFA (152 euros) se brade à 10. 000 FCFA (15 euros) », indique Abdou Nino, responsable des paysans de cette région du sud-est.

« C’est une douloureuse épreuve pour certains éleveurs, qui considèrent l’animal comme un membre de leur famille et font le deuil lorsqu’il meurt », souligne Idi Nomaou, vétérinaire à la retraite.

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Au marché, des femmes en détresse se pressent aussi pour vendre moutons et chèvres.

« Mon mari a fui au Nigeria, alors je vends ce mouton pour survivre », lâche Hassana, une habitante de Mamawa, près de Tibiri.

Pendant ce temps, un drame se prépare en brousse.

« Les vaches errent dans tous les sens et mangent du sable à force de vouloir happer les minuscules brins d’herbe enfouis sous le sol », raconte Hassane Baka.

Manifestement épuisé, un éleveur peul dit avoir parcouru avec ses bêtes plus de 800 kilomètres entre Agadez (nord) et Maradi, sans voir la moindre trace de pâturage.

« A force d’errer en brousse, les vaches tombent pour ne plus se relever », souligne Abdou Nino.

Même les traditionnelles transhumances transfrontalières sont quasi-impossibles, puisque des Etats confrontés eux aussi à la sécheresse interdisent aux troupeaux étrangers l’accès à leurs pâturages, affirme Hassane Baka.

Pour aider les éleveurs, l’Aren va lancer en mai une opération « déstockage stratégique » consistant à leur racheter, au « double » de leur prix, les vaches en fin de reproduction et les taureaux ayant bouclé leur cycle de croissance.

L’opération, qui concerne les régions de Maradi et Zinder (sud-est) abritant plus de 40% du cheptel du pays, doit permettre aux éleveurs de se procurer des vivres pour leur famille et une partie de leur troupeau, explique M. Baka.

Les animaux rachetés seront abattus et la viande distribuée gratuitement aux centres pour enfants malnutris de la région.

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