Afrique: coups d’Etat et élections contestées, la démocratie s’essouffle
Coups d’Etat en série en Afrique de l’Ouest, élections contestées, tentation de succession dynastique: 20 ans après la vague démocratique ayant balayé le continent, la démocratie donne des signes d’essouflement en Afrique.
Derniers exemples en date illustrant ce « reflux démocratique », qui touche particulièrement les ex-colonies françaises: le coup d’Etat militaire au Niger et les violences en Côte d’Ivoire émaillant le processus électoral devant mener vers un scrutin présidentiel sans cesse repoussé depuis . . . 2005.
Après le putsch ayant renversé le 18 février le président Mamadou Tandja, démocratiquement élu mais qui avait lui-même réalisé un coup de force avec la dissolution du gouvernement et de la Cour constitutionnelle, une question est sur de nombreuses lèvres: « et maintenant à qui le tour? ».
En moins de deux ans, des coups d’Etat ont déjà eu lieu en Mauritanie (6 août 2008), en Guinée (23 décembre 2008), à Madagascar (17 mars 2009) et au Niger (18 février). Et en mars 2009, la Guinée-Bissau a subi le double assassinat de son chef des armées et de son président Joao Bernardo Vieira.
« Le système démocratique qui avait été construit par consensus au début des années 90, avec les conférences nationales, a été gangrené », indique à l’AFP le responsable de la Rencontre africaine pour la défense des droits de l’Homme (Raddho), Alioune Tine.
« Il y a un renforcement du pouvoir personnel, des +leaders charismatiques+, au détriment des institutions, qui s’affaiblissent. Certains chefs d’Etat veulent s’éterniser et mourir au pouvoir. Il y a un détournement des Constitutions, des élections et du processus démocratique », souligne-t-il.
De plus, la tentation de succession dynastique via des élections contestées mine toutes tentatives d’enraciner les règles démocratiques sur le continent. En République démocratique du Congo (RDC), Joseph Kabila, alors tout juste âgé de 29 ans, a très vite succédé à son père, Laurent-Désiré, assassiné en 2001 par un de ses gardes du corps.
Au Togo, le général Gnassingbé Eyadéma, après avoir dirigé le pays pendant 38 ans a laissé à son décès en 2005 le fauteuil présidentiel à un de ses fils, Faure Gnassingbé, élu dans des circonstances chaotiques. Ce dernier se représente le 4 mars pour un deuxième mandat.
Et au Gabon, Ali Bongo a succédé l’année dernière à son père Omar Bongo, souvent considéré comme le symbole de la « Françafrique » et qui était resté 41 ans au pouvoir. Au Togo comme au Gabon, la France a été accusée d’avoir favorisé ces successions familiales. Paris a démenti à plusieurs reprises.
Les oppositions de plusieurs autres pays mettent déjà en garde sur la répétition de ce schéma, notamment en Egypte, en Libye ou même au Sénégal, pourtant longtemps considéré comme la vitrine de la démocratie en Afrique francophone.
Comme le souligne Patrick N’Gouan, coordinateur national de la Convention de la société civile ivoirienne (CSCI), « en Côte d’Ivoire comme en Afrique, celui qui a le pouvoir politique a le pouvoir économique, car il contrôle les richesses nationales ».
« En Côte d’Ivoire, ceux qui étaient pauvres il y a quelques années sont devenus riches! », relève-t-il. D’où la tentation de garder la pouvoir aussi longtemps que possible, au besoin en modifiant la Constitution, comme au Cameroun en 2008, pays dirigé depuis 1982 par Paul Biya, 76 ans.
Mais s’il y a actuellement un « retour de manivelle » et « des assauts assassins contre la démocratie, il y a aussi aussi des ripostes fortes de la part de le société civile ou de l’armée », veut croire un observateur international en Afrique de l’Ouest.
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