Dans l’est de la RDC, le village de Bushushu défiguré par les pluies diluviennes
Complètement défiguré: c’est le visage qu’offre aujourd?hui Bushushu, un petit village de l’est de la République démocratique du Congo dévasté par des pluies diluviennes qui ont fait des dizaines de disparus et causé de gros dégâts matériels.
Les pluies se sont abattues le week-end dernier sur Bushushu, localité agricole nichée en contrebas de collines dans le territoire de Kalehe, et à environ 70 kilomètres au nord de Bukavu, capitale de la verdoyante et fertile province du Sud-Kivu.
En bordure de la route reliant le Sud-Kivu au Nord-Kivu, des plantations de bananes, manioc ou encore café se sont retrouvées englouties par la boue. Et en plusieurs endroits, les eaux, encore visibles dans le village, ont emporté des cultures et des animaux d’élevage.
« Les pluies ont commencé depuis le mercredi de la semaine passée, avant de se prolonger le samedi pour faire ces dégâts. Elles ont tout emporté à partir des hauts plateaux: produits de champs, vaches et chèvres », témoigne Kashosi Kamozi, président d?une association des parents d?élèves de Bongananda, village voisin.
« Nous craignons la famine et les épidémies ici, à Kalehe », nom du territoire où se trouve Bushushu, ainsi que d’autres localités frappées par les intempéries, a-t-il ajouté.
Sur la route reliant Bushushu à Bongananda, au bord duquel des bananiers baignent encore dans l’eau, le trafic est difficile. « Ce sont ces grosses pierres » déposées par la pression de l’eau « qui bloquent la route », s?exclame Okovu Mweze, un habitant de Luzira, un autre village.
Pour atteindre leur point de chute, les habitants, les curieux ou ceux – parmi lesquels de jeunes volontaires – venus participer aux secours doivent parcourir de longues distances à pieds, à moto ou, pour les plus nantis, utiliser une embarcation.
La Croix-Rouge poursuit les recherches dans des conditions difficiles. « Pour tenter de sortir les corps des décombres, nous recourons aux haches, aux marteaux et aux houes, mais (. . . ) nous creusons même deux mètres sans retrouver les corps », a déclaré à l’AFP Jacques Bisimwa, de la Croix-Rouge.
Pour l’heure, aucun bilan officiel, même provisoire, n’a été communiqué par les autorités. Mais les victimes pourraient être nombreuses.
Selon Juvénal Rushisha, chef du village Bushushu, plus de 700 maisons, une école et une église ont été détruites, et « certaines familles disent avoir perdu quatre à quinze de leurs membres », qui ont été « emportés par les eaux vers le lac Kivu » ou « engloutis par la terre ».
« Lundi, on a identifié une trentaine (de corps) mais en début d’après-midi de ce mardi, j’ai vu de mes propres yeux 65 corps », a assuré mardi un responsable associatif, Crispin Mokili, vice-président de la Nouvelle Dynamique de la société civile, qui se trouvait dans le petit village de Cishenyi.
Dans les hôpitaux, dépourvus du matériel médical de base, certains rescapés ont du mal à s’imaginer le miracle qui les a fait sortir des eaux. Mais déjà, on pense à demain.
Plâtre sur la jambe, Sifa Hekima, chantre de l’église dont les murs ont été défoncés par les grosses pierres charriées par les eaux, « souhaite voir une mobilisation humanitaire pour que (le territoire de) Kalehe se relève ». M. Mweze appelle, lui, à des actions de solidarité urgentes pour aider les victimes.
Le gouverneur de la province, Marcellin Cishambo, a effectué mercredi un autre déplacement dans des villages touchés, où il a sensibilisé la population sur l’importance de conserver les arbres, dont les racines retiennent les sols, prévenant ainsi les glissements de terrain.
« Nous regrettons ce qui est arrivé, mais ceci doit donner à nos populations une leçon pour faire du reboisement une priorité », alors que de nombreux citoyens de la RDC, deuxième poumon vert de la planète, coupent des arbres pour se fournir en bois de chauffe, a souligné Marcellin Cishambo.
« Ce n?est pas seulement à Kalehe mais c?est partout dans la province où nous allons initier une vaste campagne de reboisement », a promis M. Cishambo, annonçant son déplacement jeudi avec le ministre des Affaires sociales, Charles Nawej, à Nyamukubi, un autre village défiguré.
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