Avec « Invictus », Clint Eastwood « imprime la légende » de Nelson Mandela

Fidèle au mot de John Ford « Quand la légende est plus belle que la réalité, imprimez la légende », l’Américain Clint Eastwood apporte sa pierre au mythe Nelson Mandela, le héros de la lutte anti-apartheid devenu premier président noir de l’Afrique du sud, avec son film « Invictus ».

Avec « Invictus », Clint Eastwood « imprime la légende » de Nelson Mandela © AFP

Avec « Invictus », Clint Eastwood « imprime la légende » de Nelson Mandela © AFP

Publié le 9 janvier 2010 Lecture : 2 minutes.

Adapté du roman « Déjouer l’ennemi » de John Carlin, ce long-métrage de 2H12 met en scène Morgan Freeman dans le rôle de Mandela, déjà incarné par Dennis Haysbert dans « Goodbye Bafana » (2007) de Bille August — ou encore Danny Glover et Sidney Poitier dans des téléfilms.

Le film relate la Coupe du monde de rugby remportée par une Afrique du sud tout juste sortie de l’apartheid en 1995, et la façon dont Nelson Mandela a fait de l’équipe nationale des Springboks, symbole haï de la ségrégation aux yeux des Noirs, un instrument de réconciliation nationale.

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« C’est une histoire d’êtres humains, c’est l’histoire de l’Afrique du sud, une histoire universelle », a estimé le comédien Morgan Freeman, co-producteur exécutif du film, par qui Mandela lui-même souhaitait être incarné.

Face à lui Matt Damon — à l’affiche aussi de « Hereafter », le prochain film d’Eastwood, au côté de Cécile de France, qui sortira au dernier trimestre 2010 — campe François Pienaar, le capitaine des Springboks.

Si Freeman habite le film, Damon, lui, peine à exister.

Afrique du Sud, début des années 1990. D’un seul mouvement de caméra à l’orée d’ »Invictus », Clint Eastwood donne à voir la frontière étanche séparant Noirs et Blancs après un demi-siècle d’apartheid.

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Fierté du pays, les Springboks au maillot vert et or s’entraînent sur une grasse pelouse. . . tandis qu’à quelques mètres, derrière des barbelés, les gamins dépenaillés d’un township tapent dans un ballon, sur un aride terrain vague jonché de détritus.

Au passage de la voiture de Nelson Mandela tout juste libéré, les enfants noirs hurlent de joie mais les sportifs blancs estiment, eux, qu’on « livre le pays aux chiens ».

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Or après 27 ans de détention à la prison de Robben Island, l’ex « terroriste Mandela » accède bientôt triomphalement à la présidence, lors du premier scrutin multiracial en 1994. Il décide alors de prôner la réconciliation, pour forger la « nation arc-en-ciel » dont il rêve.

Malgré les haines tenaces et les réticences de ses conseillers, Madiba — le nom clanique de Mandela — va s’acharner à faire du rugby, le sport culte des Afrikaners, héritiers des premiers colons européens qui ont institutionnalisé la ségrégation raciale, le symbole de la nouvelle Afrique du sud.

Visiblement fasciné par Mandela, Eastwood le montre en leader politique d’exception: véritable visionnaire, humaniste éclairé et courageux, d’une grande force morale et homme intelligent, humble et chaleureux.

Limpide et inspiré, lyrique au sens le plus noble, le film plonge à la fois au coeur de l’Histoire et des sentiments intimes des protagonistes, saisis avec la plus grande justesse par un détail. Bien qu’au second plan, le rugby n’en est pas moins remarquablement filmé.

En forgeant cette figure exemplaire, le cinéaste prend le contre-pied du travail de déconstruction d’un mythe mené avec son diptyque sur la Seconde guerre mondiale, « Mémoires de nos pères » (2006) et « Lettres d’Iwo Jima » (2007). Il y montrait les dessous peu glorieux d’une meurtrière bataille et son écho, amplifié par la propagande militaire, dans l’inconscient collectif.

Acteur et réalisateur respecté, Clint Eastwood a décroché à deux reprises un doublé aux Oscars, meilleur réalisateur et meilleur film, avec « Impitoyable » en 1997 puis avec « Million dollar baby » en 2005.

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