Capital-investissement : attention, Carlyle débarque !
Le géant américain du « private equity » veut lever un fonds de plus de 500 millions de dollars destiné à l’Afrique. Mais il reste pour l’instant modeste en matière de recrutements.
Finance : l’heure des comptes
La rumeur courait depuis plusieurs années. Mais dans le monde du private equity, où peu de place est laissée au hasard, la décision aura pris un peu de temps pour se matérialiser. Après avoir pris pied au nord du continent et au Moyen-Orient, Carlyle débarque au sud du Sahara. Avec son pedigree : 100 milliards de dollars sous gestion (environ 70 milliards d’euros), près de 65 milliards investis au cours de 1 015 transactions, une présence internationale jusqu’en Chine et en Australie, et 900 employés dans 19 pays !
Choix des consultants
Mais le nom de Carlyle est aussi synonyme d’une interminable polémique sur le big business et la politique. Une affaire longtemps entretenue par le capital-investisseur lui-même en embauchant, comme conseillers le plus souvent, un nombre relativement important de responsables politiques de premier plan : les Bush père et fils, l’ancien Premier ministre britannique John Major, l’ex-Premier ministre thaïlandais Thaksin Shinawatra, mais aussi, entre autres, un ancien président philippin, un ancien secrétaire d’État américain à la Défense… La liste est longue et entretient sa réputation de firme basée sur des réseaux politiques. Il y a donc fort à parier que si Carlyle met un jour en place un comité consultatif destiné à l’Afrique, il le truffera d’anciens présidents ou ministres africains, ou de ministres européens en charge du développement…
« L’arrivée de Carlyle est une bonne nouvelle car elle place l’Afrique au cœur de la scène mondiale », juge Jean-Marc Savi de Tové, directeur de portefeuille en charge de l’Afrique au sein de l’agence de développement britannique CDC, et à ce titre investisseur dans la plupart des grands fonds de private equity du continent. Certes, certains géants du métier ont déjà un pied en Afrique, via des sociétés en portefeuille. C’est le cas, par exemple, de Warburg Pincus ou de Blackstone, qui soutiennent depuis plusieurs années Kosmos Energy, l’un des exploitants du champ Jubilee au Ghana. Mais aucun n’avait jusqu’à présent annoncé son intention de disposer d’un fonds pour l’Afrique.
À ce titre, le coup de projecteur apporté par Carlyle pourrait changer l’image du continent auprès des financiers, surtout si le deuxième capital-investisseur mondial (par les actifs gérés) transforme l’essai et boucle de belles – et rentables – opérations dans le futur. Il vient pour cela d’initier la levée d’un fonds pour une taille comprise entre 500 millions et 750 millions de dollars. Un montant modeste par rapport aux fonds habituellement gérés par Carlyle et étant donné le nombre des investisseurs avec qui il a l’habitude de travailler.
Dirigeants locaux
Le groupe américain a en parallèle recruté une équipe dirigeante locale : le Sud-Africain Danie Jordaan, venu d’Ethos, a une vingtaine d’années d’expérience ; Marlon Chigwende, qui jusque-là dirigeait les activités africaines de capital-investissement de Standard Chartered, et Genevieve Sangudi, patronne des opérations au Nigeria d’Emerging Capital Partners, complètent le trio de direction. « C’est une équipe avec un profil intermédiaire : ni des juniors ni de très grands confirmés, ce qui montre que Carlyle veut avancer prudemment, explique un financier. Mais je ne doute pas que la machine se mettra rapidement en action, avec une capacité d’exécution et de négociation hors du commun, des techniques de modélisation financière, des conseils juridiques et, surtout, une intensité du suivi des participations. » Autrement dit, Carlyle est tout sauf un investisseur passif.
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