À partir de 20 travailleurs, toute entreprise algérienne doit élire un comité de participation, chargé de représenter les salariés. Retour sur son rôle avec Madiha Silini, avocate au cabinet LPA-CGR avocats.
Le législateur algérien accorde un rôle important aux salariés dans l’entreprise, notamment en matière de gestion à travers la mise en place d’un comité de participation. Même si la gestion socialiste des entreprises (GSE) n’est plus de mise depuis la fin des années quatre-vingt, il n’en demeure pas moins que le rôle social des salariés au sein de l’entreprise est crucial.
C’est à travers le comité de participation (CP) que le législateur algérien fait jouer aux salariés un rôle majeur auprès de l’employeur qui doit composer avec cet organe dans la gestion quotidienne. La mise en place de ce comité est conditionnée par un vote en vue de désigner ses membres. Une fois élus, ces derniers se voient confier des fonctions visant à améliorer la prise en compte des intérêts des travailleurs par l’organisme employeur.
Tout organisme employeur est tenu de mettre en place l’élection des délégués du personnel au niveau de tout lieu de travail distinct comprenant au moins 20 travailleurs
L’organisation du comité de participation
La loi 90-11 relative aux relations du travail (Loi 90-11) énonce dans son article 5, comme principe fondamental, la participation des travailleurs dans l’organisme employeur. Elle est garantie par les dispositions de l’article 91 de la loi suscitée. Tout organisme employeur est tenu de mettre en place l’élection des délégués du personnel au niveau de tout lieu de travail distinct comprenant au moins 20 travailleurs, lesquels éliront en leur sein un CP. Dans le cas où l’organisme employeur ne dispose que d’un seul lieu de travail, le délégué du personnel élu au sein dudit lieu, remplira les fonctions du CP.
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Quelles sont les attributions des organes de participation ?
Conformément à l’article 94 de la Loi 90-11, le CP dispose de nombreuses attributions. Il peut en effet :
- Recevoir les informations qui lui sont communiquées au moins chaque trimestre par l’employeur sur l’évolution de la production des biens et des services, des ventes et de la productivité du travail et des effectifs et de la structure de l’emploi, sur le taux d’absentéisme, les accidents de travail et les maladies professionnelles et sur l’application du règlement intérieur.
- Surveiller l’exécution des dispositions applicables en matière d’emploi, d’hygiène, de sécurité et celles relatives à la sécurité sociale.
- Engager toute action appropriée auprès de l’employeur lorsque les dispositions légales et réglementaires concernant l’hygiène, la sécurité et la médecine du travail ne sont pas respectées.
- Exprimer un avis avant la mise en œuvre par l’employeur des décisions se rapportant aux plans annuels et bilans de leur exécution, à l’organisation du travail (normes de travail, système de stimulation, contrôle du travail, horaire du travail), aux projets de restructuration de l’emploi (réduction de la durée du travail, redéploiement et compression d’effectifs), aux plans de formation professionnelle, de recyclage, de perfectionnement et d’apprentissage, aux modèles de contrat de travail, de formation et d’apprentissage, au règlement intérieur de l’organisme employeur.
- Gérer les œuvres sociales de l’organisme employeur.
- Consulter les états financiers de l’organisme employeur : bilans, comptes d’exploitation, comptes profits et pertes.
- Informer régulièrement les travailleurs des questions traitées sauf celles ayant trait aux processus de fabrication, aux relations avec les tiers ou celles revêtues d’un cachet confidentiel ou secret.
Modalités de scrutin
Sont déclarés élus, les candidats ayant recueilli le plus grand nombre de voix.
Les modalités d’élections des délégués du personnel sont régies par les dispositions du décret 90-289 du 29 septembre 1990, modifié et complété. Son article 2 dispose que ces élections sont organisées à l’initiative de l’organisme employeur.
Le scrutin est à deux tours. Au premier tour, les candidats à l’élection des délégués du personnel sont présentés par les organisations syndicales représentatives au sein de l’organisme employeur. Si le nombre de votants est inférieur à la moitié des électeurs, il est procédé dans un délai n’excédant pas 30 jours à un second tour.
Sont déclarés élus, les candidats ayant recueilli le plus grand nombre de voix. Lorsque deux ou plusieurs candidats ont recueilli le même nombre de voix, l’ancienneté au sein de l’organisme employeur est prise en considération pour les départager. Toutefois, si les candidats élus ont la même ancienneté, le plus âgé d’entre eux l’emporte conformément aux dispositions de l’article 98 de la Loi 90-11.
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Qui peut se présenter ?
Les candidats aux élections doivent remplir des critères d’éligibilité énumérés par les dispositions de l’article 97 de la Loi 90-11. Ils sont élus parmi les travailleurs confirmés réunissant les conditions pour être électeurs, âgés de 21 ans révolus et justifiant de plus d’une année d’ancienneté au sein de l’organisme employeur. La condition d’ancienneté n’est pas requise pour l’organisme employeur créé depuis moins d’une année.
Cependant, ne peut être candidat aux élections les cadres dirigeants de l’organisme employeur, les ascendants, descendants, collatéraux ou parents par alliance au premier degré de l’employeur et des cadres dirigeants, les travailleurs occupant des postes de responsabilité avec pouvoir disciplinaire et les travailleurs ne jouissant pas de leurs droits civils et civiques.
Combien d’élus ?
Pour rappel, l’article 99 de la Loi 90-11 fixe le nombre de délégués du personnel à élire par rapport à l’effectif de l’employeur selon les proportions suivantes :
Effectif salarié | Nombre de délégués du personnel |
De 20 à 50 | 1 |
De 51 à 150 | 2 |
De 151 à 400 | 4 |
De 401 à 1000 | 6 |
Au-delà de 1000 | 1 délégué du personnel supplémentaire pas tranche de 500 salariés |
Enfin, toute entrave à la constitution et au fonctionnement du CP ou à l’exercice de ses attributions ou de ceux des délégués du personnel ainsi que tout refus d’accorder les facilités et moyens reconnus par la présente loi aux organes de participation est punie, conformément aux dispositions de l’article 151 de la Loi 90-11, d’une amende de 5 000 à 20 000 dinars (soit 36 à 146 euros) et d’un emprisonnement d’un à trois mois ou de l’une de ces deux peines.