Le plus grand réseau de bibliothèques en Afrique de l’ouest est au Bénin. Il comptera bientôt neuf établissements, tous financés par la Fondation Vallet.
« L’élève Ducobu et Les Profs, c’est ce qui a le plus de succès en ce moment chez les gamins ». Sourire malicieux, diction lente et appliquée, l’homme de 70 ans admire dans son salon une pile de plusieurs centaines de livres presque aussi haute que lui. Flambants neufs, les ouvrages, parmi lesquels se trouvent des bandes dessinées, la dernière édition des Traités et actes uniformes de l’OHADA ou encore des manuels sur le marketing, s’envoleront bientôt pour le Bénin, où Odon Vallet, historien français spécialiste des religions et philanthrope, bâtit depuis 2008 un réseau de bibliothèques ouvertes à tous.
Bourses d’études
Davantage connu pour ses bourses d’études, qu’il distribue depuis 19 ans aux étudiants parisiens, vietnamiens et béninois, Odon Vallet s’est lancé depuis 2008 dans la construction du plus grand réseau de bibliothèques d’Afrique de l’ouest. Ces bonnes actions, il les finance à travers la Fondation éponyme qu’il a créée en 1999 avec son frère, Jean-Daniel, grâce à la coquette somme de 65 millions d’euros héritée de leur père.
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neuf bibliothèques d’ici 2019
« C’est le seul réseau de bibliothèques au monde dont le lectorat augmente de 20 % chaque année », s’enorgueillit le professeur. Mieux, avec un million de lecteurs par an, il rassemble à lui seul plus de visiteurs que tous les Instituts français et les Alliances françaises de la région réunis.
Actuellement, sept établissements sont opérationnels, dont deux à Porto Novo. Les autres se trouvent à Lokossa, Djougou, Abomey, Parakou et Natitingou. Tous accueillent, élèves, étudiants et tout type de curieux sur des amplitudes horaires allant de 10 heures à 20 heures. Deux autres bâtiments sont en cours de construction dans la commune d’Abomey-Calavi. Ils devraient ouvrir leurs portes en 2019.
Booster les résultats scolaires
C’est peu dire si des bibliothèques, aux fonds renouvelés tous les trois mois et qui proposent aussi des offres multimédias (accès Internet, CD, DVD) sont les bienvenues localement. « Abomey-Calavi compte à elle seule autant d’étudiants que le reste du Bénin. Et dans les universités, il y a très peu de livres ou bien ils sont complètement obsolètes », note Odon Vallet.
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Si l’accès est gratuit, le droit d’emprunter des livres, lui, coûte 1 000 francs CFA à l’année. « Ce n’est rien par rapport aux autres établissements où l’abonnement est à 5 000 francs CFA par an en moyenne », souligne Espérant Padonou, béninois de 27 ans et bras droit d’Odon Vallet.
Pour légitimer son action, la Fondation Vallet n’a pas hésité à comparer les résultats scolaires des élèves inscrits dans les écoles aux alentours de ses bibliothèques. « Ceux qui fréquentent régulièrement nos établissements multiplient par deux et demi leurs chances de succès au baccalauréat et par trois et demi leurs chances au BEPC », assure le professeur.
Préserver l’accès au savoir
Plus largement, l’enjeux pour ces bibliothèques est également de permettre l’accès aux livres pour tous dans des territoires où ce type de produit est parfois financièrement inaccessible. « L’Afrique francophone aujourd’hui représente 75 % de la francophonie. Paradoxalement, la part de marché du livre francophone sur place n’est que de 2 %. Je doute qu’à ce rythme-là, des maisons d’édition comme Hachette Afrique veuillent continuer longtemps », regrette le philanthrope. Plus que militer, Odon Vallet souhaite surtout une chose fondamentale pour les visiteurs de ses bibliothèques : « Ne jamais oublier de joindre l’utile à l’agréable. C’est ce que nous faisons ».