JA Emploi & Formation s’est rendu à l’école de code 1337 de Khouribga pour rencontrer des candidats à la « piscine ». Ils nous racontent les coulisses de ce processus de sélection hors du commun, calqué sur celui de l’école 42 de Paris.
« Au Maroc, pour travailler dans de très grosses entreprises en informatique, il faut le Bac, un parcours abouti en classe prépa et réussir le concours d’une école d’ingénieur. À 1337, il suffit de réussir un test sur Internet et avoir moins de 30 ans pour être choisi dans une piscine », lance Larbi El Hilali, ingénieur de formation et directeur de l’école 1337 de Khouribga. La réplique marocaine de l’école 42 à Paris, prépare sa rentrée d’octobre prochain en accueillant en ce moment même la deuxième « piscine », un test de quatre semaines qui permets d’intégrer l’école. Lors de la première édition, 230 étudiants ont tenu jusqu’au dernier tests.
« C’est un processus de sélection naturelle. Durant ce mois, c’est leur endurance et leurs connaissances qui sont testées et nous voulons qu’ils aient tous les mêmes chances », explique le dirigeant.
Comment les candidats vivent-ils cette sélection intense ? Quels sont leurs projets s’ils sont retenus ? Pour le savoir, Jeune Afrique Emploi & Formation est allé directement à leur rencontre et livre leurs témoignages.
>> LIRE AUSSI : Maroc : une université française lance sa formation au big data
Othman El Jacifi, 25 ans, de Casablanca
« Je baigne dans la programmation depuis mes 19 ans, et j’enchaine les formations et les concours sur Internet. J’ai même passé la piscine de l’école 42 en 2015, que j’ai réussi sauf que je n’ai pas pu y aller. L’ambassade de France au Maroc a refusé de me donner un visa, parce que l’école ne livre aucun diplôme. Entre temps, j’ai essayé de poursuivre ma formation en ligne et trouver quelques petites missions pour avoir un peu d’argent de poche. L’ouverture de 1337 a été l’une des meilleures nouvelles que je n’ai jamais entendues.
Je sens que nous sommes tous conscients de l’opportunité que nous avons. »
Durant le mois que j’avais passé à 42 pour la piscine, j’ai appris bien plus que la programmation et le code. Je suis revenu avec une façon de réfléchir et d’aborder les problématiques assez spécifiques et qui m’aide fortement en ce moment. Je ne veux pas faire de comparaison, mais les étudiants qui sont avec moi en ce moment sont très ambitieux et ils en veulent réellement. Je sens que nous sommes tous conscients de l’opportunité que nous avons.
En sortant d’ici, après les trois années de formation, je veux monter ma propre boîte spécialisée dans la création de jeux vidéo. »
Meryem Laouibi, 24 ans, de Khouribga
« J’étudiais à la fac d’El Jadida, et j’avais choisi la branche mathématiques-informatique sauf que ça m’a rapidement ennuyé. Les cours ne se concentraient que sur la théorie et parfois sur des concepts obsolètes. Ce que j’ai appris ici en une semaine, équivaut facilement à toutes les connaissances cumulées en presque un semestre de cours à la fac. Le domaine me passionne et le fait de pouvoir étudier quand on veut 24 heures sur 24 me convient à merveille.
Ce qui peut aussi réconforter mes parents, c’est la gratuité de la formation. »
Au début, mes parents avaient quelques appréhensions surtout quand ils ont appris que l’école ne délivre pas de diplôme mais uniquement un certificat. Sauf que le jour du « check-in », lors de la réunion avec le staff, ils ont fini par comprendre. Par ailleurs, les expériences des anciens étudiants de l’école 42 sont rassurantes et ça nous permet de nous projeter facilement.
Ce qui peut aussi réconforter mes parents, c’est la gratuité de la formation et le fait qu’ils nous offrent à manger à des heures bien précises. On vit tout un mois avec zéro dirham. »
>> LIRE AUSSI : En Tunisie, des écoles du web pour contrer le chômage
Paul Kaboré, 25 ans, du Burkina
« Faute de moyen, il m’a été impossible d’aller en France pour faire l’école 42 et je me suis rabattu sur une école d’ingénierie en informatique avec des classes prépas intégrées, ici, au Maroc. Tout allait bien, jusqu’au jour où j’ai reçu la notification d’un article de Jeune Afrique qui parlait de l’école 1337. Sur le coup, toutes les portes s’ouvraient devant moi.
Ailleurs, nous avons l’impression que les professeurs sont les seuls à détenir le savoir, alors qu’ici c’est très différent. »
Le modèle pédagogique proposé par l’établissement est unique et c’est ce qui m’a le plus séduit. Ailleurs, nous avons l’impression que les professeurs sont les seuls à détenir le savoir, alors qu’ici c’est très différent. Nous sommes entre étudiants, et tout ce que j’ai appris ici c’est grâce à mes efforts personnels. Ceci dit, le niveau est très élevé.
Les gens peuvent croire que nous sommes là pour nous amuser quand ils voient les salles de détente, mais nous travaillons très dur. Les installations nous aident à déstresser et à mettre une ambiance formidable. En tout cas, si je suis admis à 1337, je ne reviendrai pas à l’école d’ingénieur. »