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Ghana : Priscilla Kolibea Mante, une scientifique sensible à l’économie

Plus jeune, la ghanéenne Priscilla Kolibea Mante était convaincue de devenir un jour économiste. Des années après, la voici scientifique récompensée d’une bourse pour ses recherches sur la médecine traditionnelle ghanéenne.

Par - à Ghana
Mis à jour le 13 mai 2019
Priscilla Kolibea Mante, 33 ans est maître de conférences au département de pharmacologie de l’Université Kwame Nkrumah de science et technologie (KNUST). © Women in science/2018.

Women in science/2018.

Plus jeune, la ghanéenne Priscilla Kolibea Mante était convaincue de devenir un jour économiste. Des années après, la voici scientifique récompensée d’une bourse pour ses recherches sur la médecine traditionnelle ghanéenne.

« Quand j’avais 15 ans, je voulais être présidente de la Banque mondiale », lance la docteure Priscilla Kolibea Mante, maître de conférences au département de pharmacologie de l’Université Kwame Nkrumah de science et technologie (KNUST). À 33 ans, cette lauréate d’une des 14 bourses récemment attribuées à des chercheuses africaines lors de la Journée des femmes L’Oréal-Unesco est pourtant devenue pharmacologue.


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De l’économie à la pharmacologie

Très tôt pourtant, l’élève du lycée Wesley Girl’s High School de Cape Coast au Ghana, se prépare à une carrière d’économiste en choisissant des cours qui lui seront utiles pour ses études : « J’ai d’abord choisi l’économie, la géographie, le français et les mathématiques », se rappelle-t-elle. Mais elle déchante très vite : « En vérité, tous les concepts me semblaient ennuyeux. J’ai demandé à passer au cours de sciences, où j’avais déjà un mois ou deux de retard. Lors de mon premier test de chimie, j’ai réussi à 100 % et c’est ainsi que j’ai su », se souvient-elle en riant.

Ma famille a été un facilitateur. »

Ce déclic l’amène à étudier la pharmacologie à l’université où elle entreprend une maîtrise puis un doctorat qu’elle obtient à 27 ans. Aujourd’hui ses recherches portent sur les troubles du système nerveux central, en particulier l’épilepsie, quatrième trouble neurologique le plus répandu dans le monde. « La plupart de mes recherches ont porté sur l’évaluation pré-clinique de composés qui, à mon avis, ont le potentiel d’être utilisés dans des études cliniques. Ils sont issus de la médecine traditionnelle encore largement utilisée car peu coûteuse », explique la docteure Mante, qui reste sensible à l’impact économique de son travail. L’une des plantes qu’elle étudie est la cryptolepis, communément appelée kadze ou gangamau, qui pousse dans les forêts ghanéennes : « Je m’oriente vers les essais cliniques de mes médicaments et veux développer la recherche jusqu’à ce qu’ils puissent être utilisés chez l’homme », confirme la scientifique.


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Mentor et soutiens

Au cours de ses études, la jeune chercheuse a pu compter sur ses proches : « Ma famille a été un facilitateur. J’avais des parents et un oncle maternel qui m’encourageaient à réussir ». Son directeur de thèse et de maîtrise joue de son côté un rôle de mentor : « Il a pu voir plus loin que moi en tant que femme et m’a placée en compétition avec les hommes. Il n’a jamais douté de ma capacité à gravir les échelons », souligne-t-elle.

En tant que femme scientifique, on vous estime peu, vous êtes payée au rabais et mise dans une case qui doit déterminer votre comportement. »

En tant que femme dans un secteur traditionnellement considéré comme un pré carré masculin, la chercheuse ghanéenne doit faire face aux problématiques de genre. « En tant que femme scientifique, on vous estime peu, vous êtes payée au rabais et mise dans une case qui doit déterminer votre comportement. Vous risquez d’être confrontée à des résistances. On vous dit que vous êtes trop agressive, trop ambitieuse et que vous n’êtes pas à la hauteur des rôles traditionnels d’une femme. », déplore-t-elle.


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Transmission

C’est pourquoi, à son tour, Priscilla Kolibea Mante s’attache à rendre le soutien qu’on lui a donné. Elle dirige un programme autofinancé où elle identifie les étudiants de premier cycle qui s’intéressent à la recherche et au milieu universitaire. Elle travaille avec des collaborateurs aux États-Unis afin de placer les étudiants sélectionnés en stage d’été dans des laboratoires et des universités. « À l’issue de cette expérience, ils sont en mesure de décider si c’est quelque chose qu’ils voudraient faire, puis nous les aidons à déterminer les prochaines étapes », explique-t-elle.

Je me concentre sur les femmes qui s’intéressent à une carrière en pharmacologie. »

La scientifique est également en train de lever des fonds pour payer les étudiants en doctorat afin qu’ils n’aient pas à subir ce qu’elle a subi : financer de sa poche ses études, une nécessité épuisante qui empêche de nombreuses personnes de poursuivre une carrière en sciences. « Je me concentre sur les femmes qui s’intéressent à une carrière en pharmacologie », explique-t-elle.


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Récompenses

La bourse L’Oréal-UNESCO pour les femmes et la science est la plus récente des nombreuses récompenses qu’a reçu jusqu’ici cette scientifique accomplie. Auteur de 21 publications, Priscilla Kolibea Mante a déjà reçu le prix CAEN de l’International Society of Neurochemistry, la bourse de recherche Danida BSU, la bourse Horst Kohler et la bourse présidentielle de l’Université du Michigan pour les chercheurs africains. Elle est pharmacienne agréée et membre de plusieurs organismes professionnels, dont la Pharmaceutical Society of Ghana, la Ghana Young Academy et l’International Society of Neurochemistry. Elle est également membre fondateur de la Ghana Neuroscience Society.

Mais tout cela n’est qu’un début. La jeune chercheuse a désormais l’intention de passer aux essais cliniques de ses composés. Nouvelle étape d’une carrière dans laquelle elle ne pensait pas s’intégrer au départ et qui est devenue maintenant l’œuvre de sa vie.