En pleine reconstruction et aménagement urbain, la capitale économique de la Côte d’Ivoire a besoin de profils techniques et expérimentés. Mais sur le marché de l’emploi, ces ingénieurs et opérationnels tant prisés manquent.
Depuis la fin de la crise ivoirienne, Abidjan est un grand chantier dans lequel les entreprises investissent. Ce développement de l’urbanisme emporte avec lui celui des secteurs du BTP et de l’industrie. Ces derniers recrutent et tous les corps de métier sont concernés. Du ciment à la maintenance, les entreprises ont des postes à pourvoir sur des métiers opérationnels comme les électriciens, des plombiers, ou encore des techniciens en énergie, spécialisés dans le refroidissement des bâtiments.
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Besoins d’ingénieurs
Les experts métiers sont également prisés comme les ingénieurs en génie civil, ingénieur techniques, ingénieurs de production, les responsable de développement commercial, les technico-commerciaux, les contrôleurs de gestion, le contrôle qualité, et les chefs de chantier. Dans 25 % des cas ces fonctions cadres techniques issues de la production, de la maintenance et de la qualité, sont recherchés par les entreprises qui recrutent, selon le dernier baromètre 2018 de l’emploi en Côte d’Ivoire, qui sera publié en janvier par le site de recrutement Emploi.ci. Parmi elles se trouve Colas, la filiale de Bouygues spécialisée dans la construction et l’entretien des infrastructures de transport, ou encore l’entreprise ivoirienne, Maintenance Climatisation Technique (MCT).
De son côté, Bolloré Transport & Logistics prévoit de recruter une centaine de personnes en 2019, notamment dans les métiers du BTP, de la mécanique, de la maintenance, et de l’électronique. Les fonctions supports sont également concernées. La filiale du groupe français recherche des profils en finance, dans le contrôle de gestion, les ressources humaines, le juridique, les systèmes d’information, et la QHSE (Qualité, hygiène, sécurité, et environnement).
Un besoin de développeurs dans toutes les filières
Autre secteur en plein développement, la téléphonie embauche également. « En Côte d’Ivoire, il n’est pas rare de voir une personne ayant deux ou trois portables contenant des puces d’opérateurs différents », affirme Fanta Traoré fondatrice du cabinet de recrutement Empower Talents & Careers. Les opérateurs comme Orange, Moov, MTN ou VOIP-CI multiplient les offres mobiles pour gagner en compétitivité, ce qui nécessiter de renforcer les équipes de développeurs.
Ces profils sont également courtisés par les start-up ivoiriennes spécialisées dans l’assurance, comme Inexa, Stane Assurance, ou encore Baloon Assurance. Et la filière grandit : « De nouvelles licences d’assurance sont accordées et des grands groupes tunisiens, tels que Comar Assurances, viennent s’installer à Abidjan », explique Fanta Traoré.
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Les conducteurs de travaux dans le viseur des chasseurs de têtes
Ces entreprises rencontrent pourtant des difficultés à recruter sur toutes les filières. « Notre bassin d’emploi ne correspond pas toujours aux exigences de nos clients », analyse Yasmine Yahi, responsable régionale et conseillère en recrutement au sein du cabinet de recrutement, Relation main d’oeuvre (RMO). Les chasseurs de têtes ne cherchent plus uniquement des profils top management, mais aussi des conducteurs de travaux ou des électromécaniciens.
Si certains profils sont compliqués à trouver, c’est en partie à cause de la fuite des cerveaux qui a sévi lors de la crise. « Les profils techniques expérimentés sont partis et veulent maintenant revenir. Mais la diaspora ivoirienne n’est pas toujours au courant des opportunités d’emploi en Côte d’Ivoire. Il faut qu’elle s’informe davantage », explique la fondatrice du cabinet de recrutement Empower Talents & Careers.
La formation peine à suivre
Et localement, le bassin universitaire à du mal à adapter son offre à la demande du marché de l’emploi. Alors les entreprises recrutent des profils étrangers. Pour y remédier, « l’État devrait intervenir dans l’élaboration des cursus de formation en tenant compte des besoins de leurs entreprises. Il faut encourager les interactions entre les entreprises, les agences d’emploi étatiques, les écoles et les universités pour travailler l’employabilité de la jeunesse », souhaite Yasmine Yahi.
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Certains établissement essaient de rattraper leur retard. L’Institut national polytechnique Félix Houphouët-Boigny (INP-HB), qui regroupe cinq grandes écoles dont l’École supérieure des mines et géologies, développe actuellement une division d’aviation civile.
Les entreprises en ont également pris conscience et créent des centres de formations internes. « C’est le cas d’Air Liquide, un groupe français spécialiste des gaz industriels, qui envoie ses ingénieurs se former en Afrique du Sud », illustre Fanta Traoré. Et comme les formations dédiées aux transports n’existent pas localement, Bolloré Transport & Logistics recrute des jeunes diplômés ivoiriens et les forment directement dans son propre centre de formation portuaire panafricain (CFPP). À Abidjan, ils apprennent les métiers liés à la conduite de portiques de quai, de parc, des grues mobiles, des tracteurs portuaires, et des chariots élévateurs.
Les métiers techniques dévalorisés
En plus de manquer de formation, certains métiers sont dévalorisés. Les volontaires manquent chez les électromécaniciens prisé sur le marché de l’emploi mais bien souvent sous rémunérés.
Enfin les compétences métiers ne sont pas toujours suffisantes. Les grandes entreprises installées en Côte d’Ivoire sont de plus en plus à la recherche de personnes qui veulent s’impliquer dans la vie et l’évolution de la structure. Selon Fanta Traoré, la culture d’entreprise et le professionnalisme font encore défaut si l’on compare aux pays occidentaux et asiatiques.