Début octobre, le ministère camerounais de la Recherche scientifique et de l’innovation et l’UE ont lancé un programme de financement de la recherche. Une aubaine pour beaucoup de chercheurs dont les ambitions sont souvent freinées par le manque de moyens.
Sur le campus de l’université de Dschang, dans la région de l’Ouest du Cameroun, Serge Armel Njidjou passe rarement inaperçu. Cet ingénieur est depuis 2018 le porteur d’une innovation qui ne cesse de susciter l’admiration : une couveuse néonatale entièrement interactive qui vise à sauver la vie des enfants prématurés.
Des fonds pour se développer
Son idée, qui fait désormais l’objet de toutes les attentions, a été récompensée par plusieurs prix tel que celui de l’innovation lors des Journées d’Excellence de la Recherche Scientifique et de l’Innovation au Cameroun, ou encore celui du projet innovant pour les femmes en Afrique décerné en mai dernier par l’Agence française de développement (AFD) dans le cadre du Digital challenge.
Ces récompenses lui ont certes permis de gagner 10 millions de franc CFA (environ 15 000 euros) mais ne suffisent pas à la finalisation de son projet de mini unité de production à la chaîne de couveuses à Bafoussam.
De son côté, Erik Gyslain Tiam Dzembouong, à l’origine de l’application Agropad qui permet aux agriculteurs d’irriguer leurs champs à distance par simple SMS travaille sur sa nouvelle innovation, un robot qui sème et désherbe. Mais il est confronté lui aussi au manque de financements : « Nous avons besoin d’acquisition foncière pour avoir nos propres champs d’expérimentation, nous devons recruter davantage, mais aussi avoir des locaux plus appropriés. Tout cela nécessite des fonds, sans lesquels nos projets ne seront pas économiquement viable », affirme-t-il depuis la pièce de neuf mètres carrés qui lui sert d’atelier de montage.
Une aide de 122 millions d’euros
Au Cameroun, le secteur de la recherche et de l’innovation foisonne de talents comme Serge Armel Ndjidou ou Erick Gyslain Tiam Dzembouong. À Yaoundé comme à Douala, Bafoussam et Maroua, les jeunes chercheurs rivalisent d’ingéniosité pour apporter des solutions locales aux difficultés quotidiennes des citoyens. Seulement, malgré son importance croissante, la recherche scientifique camerounaise demeure freinée par des difficultés de divers ordres donc la principale est l’accès aux financements.
Le programme est ouvert à toutes les initiatives dans le domaine de la santé, l’agriculture et les technologies de l’innovation et de la communication
Dans ce contexte, le 8 octobre dernier à Yaoundé, la ministre de de la Recherche scientifique et de l’innovation, Madeleine Tchuente, a ainsi pris part avec Hans Peter Schadeck, chef de la délégation de l’UE au Cameroun, à la cérémonie de présentation du programme « Horizon 2020 » de l’Union européenne (UE) consacré au développement de la recherche technologique.
Doté d’un financement de 80 milliards de francs CFA (près de 122 millions d’euros) pour la période 2014-2020, ce programme entend soutenir les projets innovants et leur simplifier l’accès au financement. « Le programme est ouvert à toutes les initiatives dans le domaine de la santé, l’agriculture et les technologies de l’innovation et de la communication (…). Les soutiens financiers alloués passent par de l’appui aux centres de recherches et aux chercheurs, à travers des appels à propositions ou des subventions directes accordées aux bénéficiaires », renseigne Aliou Abdoullahi, le chef de la cellule d’appui à l’ordonnateur national du Fonds européen de développement (FED).
Financer une centaine de projets
Une aubaine pour les porteurs de projet qui ont postulé en grand nombre pour bénéficier de ces ressources. « La recherche au Cameroun n’est pas à la hauteur de ce qu’elle pourrait être, confie Fadila Boughanemi, chef d’unité à la direction générale de la commission européenne. Nous espérons pouvoir la propulser à la hauteur des potentialités que nous lui savons, c’est-à-dire énorme », a-t-elle indiqué aux médias lors d’une visite au Cameroun en début octobre.
Une centaine de projets retenus devront suivre avant la fin de cette année, une formation sur les formalités d’accès aux financements du programme. Depuis son lancement en 2013 le programme Horizon 2020 a financé 310 projets en Afrique dont 50 au Maroc et 126 en Afrique du Sud.