Cacao, coton, cajou…. L’Afrique de l’Ouest vent debout contre sa marginalisation

Producteurs mondiaux de premier plan dans ces filières, États et professionnels doivent fédérer leurs efforts pour peser vraiment, enfin, sur les cours du marché.

À Zogbodomey,
au Bénin, l’usine de décorticage d’anacarde de Fludor, filiale locale du holding nigérian Tropical General Investment (TGI). © Jacques Torregano pour JA

À Zogbodomey, au Bénin, l’usine de décorticage d’anacarde de Fludor, filiale locale du holding nigérian Tropical General Investment (TGI). © Jacques Torregano pour JA

ProfilAuteur_AlainFaujas

Publié le 10 août 2020 Lecture : 3 minutes.

Sommet extraordinaire du 14 septembre 2019, à Ouagadougou, consacré à la lutte contre le terrorisme et à l’avenir du G5 Sahel. © ISSOUF SANOGO/AFP
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Cedeao, il était une fois dans l’Ouest

Quinze États membres, 375 millions d’habitants, des institutions qui embrassent tous les sujets économiques et s’attellent à résoudre les crises… Quarante-cinq ans après sa création et malgré les turbulences actuelles, l’organisation régionale maintient le cap.

Sommaire

La Cedeao se développe, mais pas assez vite pour réduire la pauvreté de la population ouest-africaine. S’il est vrai que l’or, le coton, le cacao ou l’uranium constituent de belles opportunités pour ces pays en mal de recettes et d’emplois, cela reste toutefois insuffisant en raison du rythme élevé de la croissance démographique, selon le rapport « Dynamiques du développement en Afrique. Réussir la transformation productive », publié en 2019 par l’Union africaine et le Centre de développement de l’OCDE.

En dépit des efforts déployés pour tirer le meilleur parti de ces atouts, « la transformation productive de la région reste limitée », peut-on y lire. Le secteur industriel de l’Afrique de l’Ouest ne progresse pas. La part de l’agriculture y a reculé de 3,1 points de pourcentage au cours des dix dernières années, alors qu’elle a progressé dans les autres régions du continent.

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« La croissance totale de la productivité est en recul depuis 2000, principalement en raison de l’insuffisance du développement technologique », indique le document. Le commerce intrarégional reste limité (15 % du total des marchandises exportées), et les échanges sont peu diversifiés.

Treize produits phares

En 2016, les matières premières non transformées représentaient 75 % des exportations de la sous-­région à destination d’autres continents. « Ces résultats mitigés soulignent le succès limité des stratégies adoptées jusqu’à présent en faveur de la transformation productive », poursuivent les auteurs du rapport.

Et si la Cedeao évitait de se disperser et abattait ses cartes maîtresses ? « Son plus grand potentiel réside dans l’agro-industrie », estime Bakary Traoré, économiste au Centre de développement de l’OCDE.

En 2017, entre cinq et neuf pays de la sous-région figuraient parmi les vingt premiers producteurs mondiaux de treize produits agricoles, dont voici la liste (avec le pourcentage que représente l’Afrique de l’Ouest dans la production mondiale) : le fonio (céréale sans gluten, comme le quinoa, 99,9 %), la noix de cajou (35,5 %), la noix de karité (99,9 %), l’igname (92,2 %), le millet (32,1 %), le gombo (28,2 %), l’arachide (12,8 %), la noix de kola (84 %), le niébé (83,4 %), le cacao (63,5 %), le manioc (33 %), le caoutchouc (6 %) et l’huile de palme (4,7 %).

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L’exemple de la Côte d’Ivoire et du Ghana

Qu’ils aient une vocation alimentaire ou hygiénique, « on constate que la croissance de la demande de ces produits dans la région est supérieure à celle de la demande globale mondiale », souligne l’économiste.

Pour optimiser ces atouts, il faudrait que les pays de la Cedeao suivent l’exemple de la Côte d’Ivoire et du Ghana, qui se sont unis pour obtenir des chocolatiers une meilleure rémunération de leurs fèves de cacao et une augmentation de la transformation locale des produits primaires.

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La création de filières efficaces concernant les produits agricoles pour lesquels l’Afrique est très bien placée suppose une amélioration des compétences, en vue de les valoriser, ainsi que des infrastructures pour les acheminer et de l’énergie pour les transformer.

Les zones économiques spéciales, un outil précieux

L’union fait la force, dans ces domaines comme dans les autres. À cet égard, l’un des principaux défis de la Cedeao sera de favoriser la mise en commun d’infrastructures. Cela passe par le développement des réseaux énergétiques, routiers et ferroviaires. « Les zones économiques spéciales [ZES] sont aussi un outil précieux, ajoute Bakary Traoré.

Celle à dominante agro-industrielle créée [en mai 2018] avec l’appui de la Cedeao entre le Mali (région de Sikasso), le Burkina Faso (région de Bobo-Dioulasso) et la Côte d’Ivoire (région de Korhogo) est une première. Mais la Cedeao ne va pas assez vite pour multiplier ces zones de complémentarité transfrontalières, qu’il faut exploiter partout où un potentiel a été identifié. »

Pour que ces ZES éclosent en plus grand nombre, encore faudrait-il que la Cedeao s’inspire de la Communauté d’Afrique de l’Est et réalise au plus vite l’interconnexion numérique de ses systèmes douaniers. Celle-ci apporterait une fluidité extraordinaire au commerce intrarégional, dont les premiers bénéficiaires seraient les producteurs de denrées agricoles, que celles-ci soient ou non déjà transformées.

Depuis sa création, la Cedeao a montré l’exemple au reste du continent dans de nombreux domaines, notamment avec son passeport communautaire, qui, depuis 1995, permet la libre circulation des personnes sur l’ensemble de son territoire.

D’ici à la fin de l’année, elle devrait supprimer le coût du roaming pour les utilisateurs de téléphone portable. Ses atouts naturels devraient l’inciter à faire preuve de la même hardiesse et du même esprit communautaire dans l’élaboration de sa politique de transformation productive.

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