Avec « La Nuit des rois », Philippe Lacôte fait entrer Shakespeare à la Maca

Œuvre multidimensionnelle dont l’action se déroule dans la célèbre prison ivoirienne, « La Nuit des rois » est un conte sanglant doublé d’une réflexion sur le pouvoir politique. Rencontre avec son réalisateur, Philippe Lacôte.

« La Nuit des rois » sortira fin novembre en Côte d’Ivoire © Banshee Films

« La Nuit des rois » sortira fin novembre en Côte d’Ivoire © Banshee Films

leo_pajon

Publié le 6 novembre 2020 Lecture : 7 minutes.

Quand Philippe Lacôte nous avait révélé il y a presque trois ans préparer un film sur les gangs de « microbes », ces jeunes voyous qui sèment la terreur en Côte d’Ivoire, on ne s’attendait pas que son œuvre gagne autant en profondeur et en densité. Parfaitement maîtrisée, malgré un scénario complexe, La Nuit des rois raconte l’histoire d’une lutte de pouvoir à la Maca, la prison d’Abidjan, où de jeunes détenus s’affrontent pour remplacer le vieux chef Barbe Noire, affaibli par la maladie.

Pendant une nuit onirique, spectaculaire et sanglante, un jeune garçon devient Roman, le conteur officiel de la prison, et raconte l’histoire de Zama King le plus longtemps possible pour échapper à la mort, à la manière d’une Schéhérazade moderne.

La Nuit des rois est une œuvre multidimensionnelle : un conte urbain, un regard sur la société ivoirienne minée par la violence, une réflexion sur la vie politique… C’est aussi une œuvre qui devrait recevoir son lot de récompenses et un bon accueil en salles. Après la Mostra de Venise, il a été annoncé en compétition aux festivals de Chicago, de Busan (Corée du Sud) et représentera la Côte d’Ivoire aux Oscars. Grâce à Néon (le distributeur de Parasites), il pourra sortir aux États-Unis… Entretien avec le réalisateur.

Jeune Afrique : À quel point ce film est-il une métaphore de la vie politique ivoirienne ?

Philippe Lacôte : C’est une métaphore du pouvoir mais pas forcément de celui exercé aujourd’hui. La politique prend beaucoup de place dans mes films, car la Côte d’Ivoire est un pays surpolitisé. Cela remonte à Houphouët-Boigny, qui était un cerveau politique, ministre français avant de devenir le gendarme de la France dans une bonne partie du continent, avec un rôle déterminant sur le choix des présidents, une influence sur le Burkina, le Mali, la Guinée, le Liberia…

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Ma propre famille est très politique. Ma mère est l’une des personnes à l’origine de la création du FPI, de Laurent Gbagbo. La politique est devenue une matière intime. Je me suis intéressé aux intrigues, aux rivalités en coulisses, qui peuvent prendre une dimension presque shakespearienne…

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