Maroc : le retour de l’État protecteur ?
Si la pandémie de Covid-19 a mis au jour les faiblesses du royaume, notamment la vaste part de l’informel dans son économie, elle a aussi révélé sa réactivité.
Au Maroc, 2020 était censée être une année de changements. Des modifications qui devaient être enclenchées lorsque la Commission sur le nouveau modèle de développement aurait livré son rapport, en juin. Mais la pandémie de coronavirus a bousculé les agendas, y compris au sein de la commission royale appelée à produire un nouveau pacte social et économique pour les quinze prochaines années.
Son mandat a donc été prolongé. Entre-temps, il fallait traiter l’urgence. Et les Marocains, qui commençaient à douter de leur « État », comme on a pu le voir lors du Hirak, dans le Rif, ont été surpris de voir réapparaître un État protecteur, agile, efficace.
Un grande opération de transfert monétaire
La crise du Covid-19 a été rude. En plus de la récession qu’elle a engendrée (entre – 6 % et – 7 % de croissance), elle a sorti de l’ombre ces deux tiers de la population qui vivent dans l’informel, sans le moindre filet social. Des failles que le Maroc a su gérer avec célérité. Dès l’apparition des premiers cas de Covid-19, un confinement général a été décrété.
Pour parer à la perte de revenus d’une grande majorité des familles, le royaume a mis en place la plus grande opération de transfert monétaire de son histoire en distribuant des revenus mensuels à cinq millions de familles vivant dans l’informel ainsi qu’à plus de 1 million de salariés qui se sont retrouvés au chômage temporaire.
Une opération financée par le Fonds spécial pour la gestion de la pandémie de Covid-19 lancé sur appel royal et qui a mobilisé plus de 30 milliards de dirhams (2,7 milliards d’euros environ).
Sur le plan sanitaire, le Maroc s’est aussi montré très réactif. Au moment de la polémique sur la chloroquine, il a décidé, dès fin mars, de réquisitionner tous les stocks de cette molécule produits sur son territoire pour traiter le Covid‑19. Et, face à la pénurie planétaire de matériels médicaux, le royaume a adapté en un temps record son outil industriel pour fabriquer masques, gel hydroalcoolique, respirateurs artificiels… Il en exporte désormais dans plusieurs pays, dont l’Arabie saoudite, les États-Unis et la France.
Un plan de relance de 120 milliards de dirhams
Si cette crise a révélé des fragilités, elle a aussi fait naître beaucoup d’espoirs. Ça aura été le fil rouge de 2020, qui a agi comme un accélérateur de réformes.
La généralisation de la couverture sociale est ainsi au menu du projet de loi de finances 2021… Un chantier social a été annoncé en juillet dernier par le roi Mohammed VI, qui aura été à la manœuvre tout au long de cette année cruciale, en même temps que le lancement d’un plan de relance de 120 milliards de dirhams.
De l’argent qui servira à venir en aide à des dizaines de milliers d’entreprises fragilisées par la crise. En mettant 12 % de son PIB pour sauver son économie, le Maroc est entré dans le top 10 des pays qui ont fourni l’effort le plus important (rapporté à la richesse produite) pour soutenir son tissu productif.
Car faire le choix de la santé ne signifie pas sacrifier l’économie, que le premier confinement a mise à rude épreuve, avec des pertes quotidiennes de l’ordre de 1 milliard de dirhams par jour. Pour faire face à la deuxième vague de la pandémie, le royaume a choisi de ne pas reconfiner. Et a misé sur la vaccination. Dès que les premiers résultats des tests cliniques de vaccins ont été connus, il a été l’un des premiers pays, avec la Chine, la Russie et les Émirats, à décider de faire vacciner les Marocains de plus de 18 ans. Une opération géante, qui devrait démarrer en ce début d’année.
Un retour rapide de la croissance attendu
Le Maroc peut entrevoir l’année 2021 avec sérénité. Ses conjoncturistes tablent d’ailleurs sur un retour rapide à la croissance, avec un taux de 4,9 % dès cette année, et un allègement du déficit budgétaire de 7,5 % à 6,5 %. Un redressement qui sera soutenu par le nouveau modèle de développement en gestation, et les diverses réformes profondes qui en découleront, dont l’exécution incombera à un nouveau gouvernement issu des élections législatives de 2021.
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