Télécoms : course à la taille critique en Afrique

Dans un contexte concurrentiel de plus en plus difficile, les acquisitions de petits acteurs par les géants du secteur vont se multiplier.

Vue de la tour Maroc Télécom à Rabat. L’opérateur est passé, en 2014, sous le contrôle de l’émirati Etisalat. © Viguier

Vue de la tour Maroc Télécom à Rabat. L’opérateur est passé, en 2014, sous le contrôle de l’émirati Etisalat. © Viguier

Julien_Clemencot

Publié le 24 juin 2015 Lecture : 3 minutes.

La moitié des 74 réseaux 4G en activité sur le continent ont été lancés depuis moins de deux ans. © Sylvain Cherkaoui pour J.A.
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Télécoms & Internet : les opérateurs prêts à surfer

Internet représente une part croissante dans les revenus africains d’Orange, MTN ou Airtel. Mais sur un continent encore relativement peu connecté, ces opérateurs avancent prudemment.

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Il y a quelques semaines, Stéphane Richard, le PDG d’Orange, réaffirmait dans Les Échos la volonté de son groupe de poursuivre son développement en Afrique. Pour l’heure, l’opérateur français ne parle pas de nouvelle acquisition. Au contraire, le 3 juin, son patron a annoncé la cession en 2016 de 10 % à 15 % du capital de l’égyptien Mobinil, dont il détient 99 %. Toutefois, selon nos informations, Orange pourrait dans les prochains mois lever des fonds en introduisant en Bourse une partie du capital de ses filiales africaines, qui sont en train d’être réunies dans un même holding. De quoi envisager ensuite une prise de contrôle ou une fusion par le biais d’un échange de titres ? Il est encore trop tôt pour le dire.

Reste que les mois à venir devraient donner lieu à de nouvelles consolidations dans le secteur des télécommunications en Afrique, estime l’agence Moody’s, qui vient de publier un rapport sur ce thème. L’année 2014, déjà, a été marquée par la prise de contrôle de Maroc Télécom par l’émirati Etisalat, qui a racheté les actions du groupe français Vivendi, et par le démantèlement de la filiale kényane du groupe indien Essar, au profit de Safaricom pour la partie réseau et de Bharti Airtel pour les abonnés.

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Grands gagnants

Dans cette course à la taille critique, les géants des télécoms sont les plus à même de figurer parmi les grands gagnants de cette reconfiguration, notamment parce qu’ils bénéficient d’un meilleur accès aux marchés financiers. Si le groupe sud-africain MTN, dont les opérations engendrent d’importants flux de trésorerie, endette directement ses filiales, l’indien Bharti préfère utiliser le bilan positif de sa maison mère pour financer à moindre coût son développement africain.

Cependant, les autorités de régulation surveillent attentivement ces opérations, expliquent les analystes de Moody’s. En autorisant l’acquisition de petits opérateurs par les leaders du marché, les gendarmes du secteur savent qu’ils risquent de créer des acteurs dominants et, ce faisant, de nuire à la concurrence nécessaire au développement des télécoms.

La position des autorités pourrait être plus souple dans les pays ayant délivré plus de quatre licences, comme l’Ouganda ou la Côte d’Ivoire (six opérateurs chacun). À Abidjan, le ministre des Télécommunications ne cache pas qu’il veut réduire le nombre de licences. Il a déjà menacé de retirer leur agrément aux petits opérateurs, comme Comium ou GreenN, s’ils ne remplissaient pas toutes leurs obligations fiscales. Peut-être voudrait-il aussi favoriser leur regroupement ?

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Partage

En dehors de quelques exceptions, il est donc probable que les grands groupes de télécommunications cherchent plutôt à étendre leur couverture géographique à de nouveaux pays. Et d’abord par l’acquisition de petits acteurs, bien que la vente d’un opérateur comme Millicom ne soit pas à exclure, estime le patron d’un opérateur présent en Afrique francophone.

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Dans un contexte concurrentiel de plus en plus difficile, les sociétés dont la part de marché est inférieure à 15 % peinent à financer leur développement. Aux investissements à réaliser s’ajoute la baisse continue des marges sur les services de voix. Une chute des revenus par utilisateur que les grands groupes cherchent eux aussi à amortir en misant sur le partage des infrastructures.

La formidable montée en puissance des gestionnaires de tours est l’autre enseignement de ces deux dernières années. Selon le site internet TowerXchange, ils possèdent environ 160 000 relais sur le continent, soit 45 % du parc existant. Derrière IHS, qui administre plus de 20 000 tours, American Tower, Helios Towers Africa et Eaton Towers mènent la chasse. Le 30 avril, ce dernier annonçait avoir levé 320 millions d’euros et signé un contrat d’achat de 2 000 tours avec Mobinil.

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