Justice : Bibo Bourgi attaque le Sénégal
Menzies Middle East & Africa, une société détenue par Bibo Bourgi et son frère, a lancé à Washington une procédure d’arbitrage internationale visant le Sénégal.
Menzies Middle East & Africa se lance dans une bataille juridique contre l’État du Sénégal. Le 1er juin, le Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements (Cirdi) a enregistré la procédure d’arbitrage international déclenchée par la société luxembourgeoise de manutention aéroportuaire. Selon nos informations, les plus hautes autorités de l’État n’ont été averties de cette initiative qu’une quinzaine de jours plus tard, via un appel d’un responsable de la Banque mondiale (qui abrite le Cirdi).
Les trois fondateurs et actionnaires de Menzies Middle East & Africa (Ibrahim Aboukhalil dit Bibo Bourgi, son frère Karim et Pape Mamadou Pouye) ont été condamnés le 23 mars à de lourdes peines par la Cour de répression de l’enrichissement illicite (Crei) dans le cadre de l’affaire « Karim Wade », un jugement qui fait l’objet d’un pourvoi en cassation. Tous trois sont accusés d’avoir servi de prête-noms au fils de l’ancien président sénégalais.
Administration provisoire
Mais ce n’est probablement pas pour cette condamnation que la procédure d’arbitrage a été déclenchée, avec le soutien des avocats Rasseck Bourgi et Yves Nouvel. Le Cirdi juge en effet des différends relatifs aux investissements opposant des acteurs étrangers à des États.
La véritable raison est sans doute à chercher du côté de la mise sous administration judiciaire d’AHS Sénégal, filiale locale de Menzies Middle East & Africa. En 2013, dans le cadre de la procédure de la Crei, la gestion de la société sénégalaise avait été confiée à ADD-Value Finance, qui avait mandaté pour cette tâche Abdoulaye Sylla. Interrogés en octobre dernier par Jeune Afrique, les avocats d’Ibrahim et Karim Aboukhalil et de Pape Mamadou Pouye avaient fustigé la gestion de M. Sylla : « Abdoulaye Sylla gère la société en toute opacité, estimait alors l’un d’eux. De hauts responsables qui avaient été détachés par Menzies Aviation, le partenaire stratégique d’AHS, ont été mis au placard à son arrivée, et le commissaire aux comptes s’est plaint de ne pas avoir pu exercer pleinement sa mission lors des exercices 2012 et 2013. »
Menzies Aviation, l’un des poids lourds mondiaux du secteur de la manutention aéroportuaire, avait rompu son contrat d’assistance à AHS Sénégal mi-2013.
Deux procédures
Créée en 2003 en association avec Menzies Aviation, Menzies Middle-East & Africa et sa filiale Aviation Handling Services (AHS) ont débuté leurs activités au Sénégal avant, à la faveur des appels d’offres ou de rachat d’entreprises, de s’implanter successivement dans sept autres pays (Guinée équatoriale, Niger, Bénin, Ghana, Centrafrique, Guinée-Bissau et Jordanie). Depuis le placement sous administration judiciaire de la filiale sénégalaise, les activités dans les autres pays se sont poursuivi, sauf au Niger et en Guinée-Bissau où les filiales d’AHS ont cessé d’exister pour des raisons sans lien avec la situation sénégalaise.
Aucun des avocats de Bibo Bourgi n’a souhaité commenter l’affaire ou donner de plus amples renseignements sur cette procédure qui ne fait que commencer. Le ministère de l’Économie et des Finances du Sénégal, défendeur dans ce dossier, reste injoignable.
Le Sénégal est actuellement visé par deux procédures au Cirdi : outre celle lancée le 1er juin par Menzies Middle-East & Africa, le pays d’Afrique de l’Ouest est également attaquée par le groupe cimentier français Vicat.
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