Avis aux noctambules abidjanais : la Zone 4 est désormais à deux pas… de danse

Ce quartier de Marcory est le point de rendez-vous des noctambules abidjanais. Et la construction du pont Henri-Konan-Bédié, en facilitant son accès, va encore accroître sa fréquentation.

Le Parker Place © Ananias Leki Dago pour J.A.

Le Parker Place © Ananias Leki Dago pour J.A.

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Publié le 20 juillet 2015 Lecture : 4 minutes.

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Un soir de mai au Toa. Une fois passé l’orage, l’atmosphère s’adoucit et les températures aussi. Sur la terrasse de ce bar branché d’Abidjan, un jeune couple d’Ivoiriens, rentrés au pays depuis moins d’un an, discute de son avenir. Quel serait le meilleur moyen de dépenser leur argent ? « Il faut acheter un terrain maintenant. Je veux me réveiller et entendre le chant des oiseaux », dit la femme, tout de blanc vêtue, avant de régler l’addition.

C’est le lieu de résidence d’environ 70% des expatriés, à commencer par les Français

Ainsi va la vie en Zone 4. Coincé entre le boulevard Valéry-Giscard-d’Estaing et le boulevard de Marseille, ce sous-quartier de la commune de Marcory est l’un des points « show » de la métropole ivoirienne, lieu de résidence d’environ 70 % des expatriés – à commencer par les Français – et des fortunes libanaises établies depuis plus longtemps à Abidjan. C’est également là que se trouve la résidence privée de l’ex-comzone Issiaka Ouattara, plus connu sous le nom de Wattao, aujourd’hui commandant en second de la garde républicaine, de retour dans la capitale ivoirienne après dix mois de formation au Maroc.

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Historiquement, la Zone 4 doit son succès à sa position géographique, non loin de l’aéroport international Félix-Houphouët-Boigny. Sa proximité avec la base militaire française de Port-Bouët en fait l’un des endroits les plus sécurisés de la ville. Un argument qui ne laisse pas insensibles les grandes entreprises internationales depuis longtemps implantées dans le quartier, comme Nestlé ou Nescafé.

Aujourd’hui, ce faubourg chic et résidentiel du sud de la ville est le centre névralgique de Marcory. Tous les grands supermarchés y sont regroupés, et un club de gym très moderne, l’Olympia, a même ouvert ses portes en début d’année. Mais c’est surtout à ses nuits chaudes et effrénées que la Zone 4 doit sa célébrité. Les noctambules sont sûrs de trouver leur bonheur tant le nombre de restaurants et de night-clubs au kilomètre carré est impressionnant. Et entre les anciennes et les nouvelles adresses, la concurrence est rude !

Le Mix Night Club © Olivier pour J.A.

Le Mix Night Club © Olivier pour J.A.

Ceux qui veulent dîner pour commencer la soirée n’auront que l’embarras du choix entre les cocktails du 37.2, les tapas du Che Café, les sushis du Kaiten ou les saveurs du monde proposées au Loft. Ils peuvent ensuite déguster une glace chez Amore ou opter pour un concert donné par la fine fleur du reggae local au Parker Place, créé en 2005 par un Ivoirien de la diaspora. Les danseurs pourront quant à eux choisir entre le Vodka Bar, le Privé Club ou encore le tout récent Blue Avenue. Sans oublier bien sûr le Mix Night Club, célèbre discothèque où se donnent rendez-vous les stars du ballon rond : Didier Drogba, Gervinho ou Romaric s’y rendent à chacun de leur passage à Abidjan.

« Rue serpent »

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À quelques minutes de là, sur la rue adjacente Alex-Fleming, la société espagnole Pefaco a ouvert une salle de jeux, sous sa marque Lydia Ludic, qui s’est vite imposée comme l’une des attractions majeures du secteur. Si la Zone 4 est un lieu attrayant, c’est aussi parce qu’il est celui de tous les vices… La rue Pierre-et-Marie-Curie est surnommée rue Serpent, en référence aux sifflets lancés par les essaims de prostituées qui bourdonnent le long de cette artère. Surnommées toutou, djandjou, djantra, tchoin, forces nouvelles, génération pressée-pressée ou lanceuses de foulard, les professionnelles du sexe échappent difficilement aux contrôles de la police durant la semaine. « Nous ne voulons plus que nos rues donnent l’image d’un bordel à ciel ouvert », explique Nathalie Blassony, responsable de la communication à la mairie de Marcory.

La Zone 4 a toujours été réputée pour sa vie nocturne débridée. Dans les années 1980-1990, c’était déjà l’endroit où tout le monde sortait pour être vu ou pour se déhancher aux rythmes de LL Cool J. Deux mouvements de hip-hop s’y affrontaient, les intellectuels de la Flotte impériale répondant au Ministère Authentik, plus populaire.

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Nouvelle clientèle

Le quartier est pourtant longtemps resté inaccessible à une bonne partie de la population à cause de ses tarifs souvent assez élevés, mais aussi de sa position géographique un peu excentrée. Une barrière que la construction du pont Henri-Konan-Bédié, qui descend depuis Cocody, a en partie levée. Il permet aujourd’hui aux nombreux Abidjanais qui y travaillent de gagner un temps fou dans les transports. « Avant, je devais passer par le Plateau, le boulevard Valéry-Giscard-d’Estaing et traverser tout Marcory. Aujourd’hui, il ne me faut que cinq à dix minutes pour me rendre en Zone 4 », explique une habitante de Cocody. Conséquence : une nouvelle clientèle commence à arriver. « Avant, la nuit était réservée aux expatriés, remarque un habitué. Maintenant, l’affluence est plus diversifiée. »

Consciente de l’opportunité que représente le pont Henri-Konan-Bédié, Aby Raoul, la maire de Marcory, fait tout pour améliorer l’offre de son quartier. Des travaux de voirie ont débuté, et le dispositif d’éclairage – encore très défaillant – est progressivement mis en place. Surtout, l’édile projette de transformer le boulevard de Marseille en une « balade du monde » composée de galeries marchandes représentatives des cinq continents et réservée aux piétons. Les autorités locales veulent faire de ce projet, estimé à 300 milliards de F CFA (environ 457 millions d’euros), le nouveau visage de la Zone 4. Difficile dans ce contexte de contenter des riverains parfois ulcérés par l’agitation nocturne, malgré un arrêté récent contre les nuisances sonores.

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