Égypte : Sissi le sauveur ?

L’espoir retrouvé des Égyptiens et de la communauté internationale semble reposer sur un seul homme.

Sissi, Le Caire, novembre 2014 © Mohammed Abdel Moatey/AP

Sissi, Le Caire, novembre 2014 © Mohammed Abdel Moatey/AP

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Publié le 21 juillet 2015 Lecture : 2 minutes.

Sissi lors de la Conférence pour le développement économique de l’Egypte, à Charm el-Cheikh, le 13 mars © Brian Snyder/AP
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Égypte : le grand retour

Deux ans après l’arrivée au pouvoir d’Abdel Fattah al-Sissi, voyage à l’intérieur d’un pays qui se cherche un avenir.

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Comme Pharaon ceignait sa couronne bleue pour aller en guerre, le maréchal Abdel Fattah al-Sissi a revêtu, le 4 juillet, son uniforme militaire pour la première fois depuis qu’il est président. « Par reconnaissance et par respect », il partait dans le nord du Sinaï saluer l’armée où elle avait mené bataille pendant cinq jours contre 300 jihadistes. « Un vrai Égyptien ! » Ce compliment ultime sur les bords du Nil lui est aussi adressé par opposition à son prédécesseur, l’islamiste Mohamed Morsi, accusé d’avoir servi les intérêts des Frères musulmans au détriment de ceux du peuple (et condamné le 16 juin à la prison à vie pour espionnage et haute trahison).

Comparé à de Gaulle ou à Bonaparte par les intellectuels

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« Sissi, qui pâtit d’une regrettable hostilité de la presse européenne, a sauvé l’Égypte du fondamentalisme des Frères musulmans », estime l’ancien secrétaire général des Nations unies Boutros Boutros-Ghali qui, né en 1922, a connu tous les régimes de l’Égypte moderne. Volontiers comparé à de Gaulle ou à Bonaparte par les intellectuels, Sissi incarne pour la foule des quartiers populaires le digne héritier de Nasser, le père d’une nouvelle Égypte. Et son défi le plus ardu sera certainement de ne pas décevoir les maints espoirs placés en lui. Sans doute en avait-il entrevu la difficulté. « Il a beaucoup hésité à prendre le pouvoir en 2013. Il l’a fait parce qu’il n’y avait pas d’autre solution », poursuit Boutros Boutros-Ghali.

Classes populaires et classes moyennes, technocrates et hommes d’affaires, libéraux et nassériens, coptes et salafistes : canalisées par leur rejet unanime des Frères musulmans, des tendances contradictoires ont porté Sissi à la magistrature suprême. Fatalement, le raïs devra prendre des décisions qui déplairont aux uns quand elles satisferont les autres. Réussite de bon augure, dès juillet 2014, le gouvernement est parvenu à réduire drastiquement les subventions aux carburants sans susciter le mécontentement populaire dont la crainte avait, pendant des décennies, retenu ses prédécesseurs de prendre une telle décision.

Prendre le pouls de la population

Mieux qu’un Moubarak vieillissant ou qu’un Morsi aveuglé par sa pieuse idéologie, le militaire sait prendre le pouls de la population. N’avait-il pas annoncé en 2010, dans un rapport au chef de l’état-major, les désordres à venir en Égypte ? Il était alors chef du renseignement militaire et en a gardé une certaine culture du secret.

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Si son entourage proche reste un mystère, ainsi que le regrettent les Égyptiens les mieux informés, tous s’accordent à constater que le président est homme de consultation et de réflexion. « Il aime prendre ses décisions en parfaite connaissance de cause, se souvient Ehab Badawy, ambassadeur d’Égypte en France, qui fut son porte-parole. Il est capable de tenir des réunions pendant des heures, il se renseigne sur les questions qui se posent dans les moindres détails et prend son temps avant d’adopter une opinion définitive. » Une prudence salutaire.

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