En Tunisie, le marketing bien huilé de CHO

Pionnier de l’huile d’olive conditionnée, le groupe exporte en Amérique du Nord, en Russie… et bientôt en Europe. Sa recette : un produit bio soutenu par une communication 2.0.

Vue des unités de production de Conditionnement des huiles d’olive, basée à Sfax, en Tunisie. © DR

Vue des unités de production de Conditionnement des huiles d’olive, basée à Sfax, en Tunisie. © DR

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Publié le 23 juillet 2015 Lecture : 3 minutes.

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Nom : CHO, pour Conditionnement des huiles d’olive. Adresse : zone industrielle de Sfax, à 270 km au sud de Tunis. À première vue, rien de remarquable. Pourtant, le groupe est un fleuron de l’industrie agroalimentaire tunisienne. Il emploie 450 salariés pour une production de 50 millions de litres d’huile d’olive en 2015 dont la totalité est exportée. Mieux : CHO s’est lancé en 2007 dans la vente d’huile d’olive conditionnée.

Une révolution dans le pays, qui, traditionnellement, vend son « or jaune » en vrac aux pays d’Europe du Sud, Espagne et Italie en tête, lesquels se chargent d’embouteiller le précieux liquide… et d’engranger les plus-values. En mai, par exemple, la différence de prix au kilo était de 40 % entre l’huile en vrac et celle vendue en bouteille, selon l’Office nationale de l’huile de Tunisie.

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Des résultats significatifs

Si Abdelaziz Makhloufi, fondateur de CHO en 1996, refuse de révéler son chiffre d’affaires, les autres résultats annoncés sont significatifs : le conditionné représente 20 % de la production et connaît une croissance de 25 % par an. « Le conditionnement d’huile d’olive est un nouveau métier en Tunisie, explique le patron. Vendre en vrac, tout le monde sait faire ; mais le conditionnement, cela demande d’être capable de réaliser un véritable business plan. Le but était de créer une marque et de convaincre les consommateurs des avantages de notre produit. »

Pour cela, un comité stratégique marketing s’est réuni dès 2007. « Que pouvait-on offrir aux clients ? De l’authenticité, se rappelle Khalil Kammoun, responsable du développement commercial. La Tunisie produit de l’huile d’olive depuis plus de trois mille ans, et la culture traditionnelle pluviale, sans ajout d’insecticide, garantit une huile biologique [CHO se prévaut des labels américain Usda Organic et français Ecocert]. Nous n’avions qu’à raconter nos origines, notre histoire. »

Pour le grand public, CHO devient donc Terra Delyssa, du nom d’Elyssa, la fondatrice de Carthage (également appelée Didon), qui serait venue avec un olivier depuis Tyr, sa ville d’origine. Le logo représente un cheval, symbole de fertilité dans la cité punique, orné d’un rameau d’olivier. Terra Delyssa se dote de sites internet en anglais et en français au design chaleureux et moderne, et la nouvelle marque conquiert les réseaux sociaux – une communication 2.0 encore jamais vue sur le marché tunisien.

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Augmenter sa capacité

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En juin, la Société financière internationale (IFC, filiale de la Banque mondiale) a prêté 23 millions d’euros au groupe pour l’aider à « augmenter sa capacité de production et développer ses ventes à l’export sur de nouveaux marchés ». Pour raccourcir les délais de livraison, CHO possède déjà des filiales aux États-Unis, au Canada, en France et en Chine. Pour autant, Abdelaziz Makhloufi ne cède pas à la folie des grandeurs. Chaque entrée dans un nouveau pays est soigneusement étudiée.

« On ne s’installe que s’il y a un marché qui présente un bon retour sur investissement, précise-t-il. Ce qu’on cherche, c’est faire du volume, car avec un réseau de 400 producteurs et cinq moulins, on en a la capacité. Aux États-Unis, nous sommes distribués chez Walmart [leader mondial de la grande distribution] ; au Canada, nous sommes dans pratiquement toutes les grandes surfaces ; et en Russie, nous apparaissons dans les émissions télévisées destinées aux consommateurs. »

Fort de ses huit années d’expérience dans l’huile d’olive conditionnée, CHO se sent mûr pour affronter le très concurrentiel marché européen. Une campagne publicitaire est bientôt prévue en France. « Notre huile est assez douce, légèrement amandée et fruitée. Elle convient parfaitement au goût des Français, qui ne veulent pas d’un produit qui occulte les saveurs des plats », assure Khalil Kammoun. L’avenir dira si CHO a de nouveau vu juste.

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