Crise au Burundi : le Rwanda et la RDC à hue et à dia
Ils ne voient pas Pierre Nkurunziza avec les mêmes lunettes. Le Rwanda fronce les sourcils. La RD Congo, elle, se montre bienveillante.
Un « sentiment négatif ». C’est par cette litote que, fin juillet, Alain Nyamitwe, le ministre burundais des Affaires étrangères, a qualifié ses fraîches relations avec le voisin rwandais. Dans cette crise, les déclarations des leaders de la région restent feutrées, même quand les tensions sont réelles.
Car les voisins du Burundi ne font pas tous la même analyse de la situation. À Kinshasa, on observe une relative bienveillance à l’égard de Pierre Nkurunziza. Les partisans du maintien au pouvoir du président Joseph Kabila au-delà de la limite constitutionnelle de 2016 admirent la résistance du chef de l’État burundais, notamment face aux pressions de Washington, auxquelles Kinshasa est également confronté.
Mais la RD Congo ne peut guère aller plus loin que sa « non-ingérence » assumée. « Nous n’avons pas les moyens diplomatiques de soutenir Nkurunziza », reconnaît un responsable congolais. D’autant que le pays n’est pas membre de la Communauté de l’Afrique de l’Est (EAC), l’organisation sous-régionale chargée du dossier.
L’attitude de Kigali est bien différente. Le Front patriotique rwandais (FPR, au pouvoir au Rwanda) s’apprête certes à faire adopter une réforme de la Constitution permettant au président Paul Kagamé de se représenter en 2017. Mais ce dernier est hostile depuis le début au passage en force de Nkurunziza. « Comment peut-on dire : “Je reste, que vous vouliez de moi ou non”? C’est un grave problème », avait-il déclaré dès le 8 mai. Depuis, l’exaspération du Rwanda, qui accueille 40% des 180 000 réfugiés burundais disséminés dans la région, n’a cessé de croître.
On imagine toutefois mal les dirigeants de la région rester les bras croisés si le Burundi sombrait dans la guerre civile.
Le Burundi persuadé que le Rwanda veut lui nuire
À Bujumbura, les autorités sont persuadées que le Rwanda cherche à les déstabiliser. Elles l’ont d’ailleurs accusé d’accueillir certains des auteurs du putsch manqué du 13 mai. Kigali a démenti, même s’il est évident que de nombreux Burundais influents se sont réfugiés dans la capitale rwandaise. Mais, à supposer que le Rwanda veuille nuire à Nkurunziza, sa marge de manœuvre est étroite.
Il lui serait difficile de soutenir une opposition armée sans s’attirer une foule de condamnations internationales, voire susciter un élan de solidarité en faveur d’un président burundais aujourd’hui affaibli, et tout aussi difficile de rallier l’ensemble de l’EAC à sa position. L’organisation est présidée par le Tanzanien Jakaya Kikwete, adversaire stratégique de Kigali dans la région et qui semble se satisfaire du statu quo actuel. Quant à Yoweri Museveni, le médiateur ougandais, il mise sur la formation d’un gouvernement d’union nationale pour sortir de la crise… On imagine toutefois mal les dirigeants de la région rester les bras croisés si le Burundi sombrait dans la guerre civile.
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