Rentrée littéraire : Luanda avant l’apocalypse
Prix Saramago 2013, « Les Transparents », de l’Angolais Ondjaki, paraissent en français. Un roman puissant à l’écriture superbe, empreinte d’une poésie créole magique.
L’Afrique au cœur de la rentrée littéraire
Branle-bas de combat chez les éditeurs et les libraires de France. La rentrée littéraire approche. Et les auteurs du continent sont au rendez-vous. À découvrir en avant-première dans J.A.
C ‘est une belle surprise que nous ont réservée, une fois de plus, les éditions Métailié en publiant la traduction française du quatrième roman de l’écrivain angolais Ondjaki, récompensé par le prix Saramago 2013. Récit surprenant, Les Transparents évoquent le quotidien des habitants d’un « immeuble mystérieux, décati, pauvre, à travers lequel la vie promenait sa célébration » et où une eau régénératrice « qui donnait au corps et à l’âme une énergie singulière et vivifiante » s’échappe des canalisations du premier étage.
On y croise Amarelinha, une brodeuse de perles dont s’entiche le MarchandDeCoquillages. Paizinho, le laveur de voitures, à la recherche de sa mère dont il a été séparé lors de la guerre. Le CamaradeMuet qui épluche des pommes de terre en écoutant des vinyles de jazz. On y rencontre aussi un ministre amateur de champagne et de whisky, un facteur qui rêve de faire ses tournées sur une mobylette, un journaliste qui reçoit un étrange colis, des contrôleurs douteux, un voleur maladroit, une marchande de poisson grillé, un homme à la tumeur mal placée, un énigmatique colonel, une blatte albinos, un père de famille nostalgique en train de devenir transparent…
L’auteur décrit un Angola contemporain en pleine mutation détruit par des appétits voraces attisés par la découverte de pétrole « onshore ».
Dans une veine poétique créole forte et séduisante teintant le portugais d’umbundu et de kimbundu, où l’imagination cocasse le dispute à l’ironie tranquille et où la narration chahute la ponctuation et efface les points, Ndalu de Almeida, de son vrai nom, décrit un Angola contemporain en pleine mutation détruit par des appétits voraces attisés par la découverte de pétrole « onshore ».
Le Gauchiste prévient : « Ici, parce que nous sommes stupides, aveugles et complices, c’està-dire parce que nous sommes globalement corrompus, ici la ville va être trouée, l’eau va être privatisée, le pétrole va être sucé sous nos maisons, nos nez, et notre dignité. » Mais la saudade d’un passé autre « où l’on pouvait faire du stop dans la rue ou demander un verre d’eau fraîche à la grille de n’importe quel jardin » résiste.
Un roman puissant à l’écriture superbe, emplie de couleurs et de sensations douces et vives et où un réalisme magique propre aux littératures africaines lusophones enchante la narration. À découvrir.
Les Transparents, d’Ondjaki, éd. Metailie, parution le 20 août 2015
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