Diaspora gabonaise : opération séduction à Paris

De Paris à Bruxelles, tour d’horizon d’une diaspora africaine déterminée à faire entendre sa voix pour les élections à venir à Abidjan, Conakry et ailleurs. Zoom sur la diaspora gabonaise à Paris qui est le théâtre d’une véritable opération séduction en vue de l’élection présidentielle.

Manifestation des Gabonais à Paris, en 2009. © Flikr/Creative Commons

Manifestation des Gabonais à Paris, en 2009. © Flikr/Creative Commons

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Publié le 8 septembre 2015 Lecture : 2 minutes.

Rassemblement de l’opposition congolaise contre Joseph Kabila et Étienne Tshisekedi, à Bruxelles, le 28 août. © Colin Delfosse pour J.A.
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Diaspora : si loin, si proche

Ils donnent de la voix à plusieurs milliers de kilomètres de leur pays et entendent bien peser sur le choix du prochain chef de l’État : Centrafricains, Comoriens, Congolais, Gabonais, Guinéens et Ivoiriens d’Europe, qui sont-ils ? De Bruxelles à Paris, autopsie d’un électorat ultra-connecté.

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Congrès, « causeries politiques », conférences de presse… Peu importe la formule, la diaspora gabonaise répond généralement aux invitations de ses représentants politiques. D’autant que les rendez-vous sont pris dans les décors somptueux de grands hôtels parisiens. Pour faire foule, quelques leaders associatifs convient aussi des « compatriotes africains », Congolais, Camerounais…

La communauté représente un vivier électoral non négligeable, à l’échelle de ce pays peuplé de seulement 1,8 million d’âmes.

L’événement commence souvent avec du retard, mais toujours courtoisement. Jusqu’à ce qu’un chantre du « Gabon d’abord » s’empare du micro proposé à l’assistance, annonce une question qui ne viendra jamais, s’élance dans un long réquisitoire contre la classe politique, ponctué de la vieille antienne du « tous pourris », harangue la foule, avant d’être repris par un modérateur sitôt accusé de « bâillonner » la liberté d’expression… Le ton peut monter, la causerie tourner au défouloir, mais jamais les assauts verbaux ne dégénèrent en violences physiques. Parfois, les empoignades se poursuivent sur les réseaux sociaux.

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Une diaspora courtisée

Politisée et souvent acrimonieuse, la diaspora gabonaise installée en France n’en est pas moins courtisée. Qu’ils soient au pouvoir ou dans l’opposition, les hommes politiques considèrent Paris, dont les relations historiques avec Libreville sont connues, comme une étape incontournable. La communauté représente un vivier électoral non négligeable, à l’échelle de ce pays peuplé de seulement 1,8 million d’âmes.

Et la France accueille la communauté gabonaise la plus nombreuse. Selon le consulat du Gabon à Paris, au 31 décembre 2014, 10 414 Gabonais de France étaient en âge de voter. Si l’on ajoute ceux qui détiennent la double nationalité – eux aussi admis à voter -, les estimations se situent à près de 15 000 voix, soit la population de Bitam (Woleu-Ntem), la onzième agglomération provinciale du pays.

Omar Bongo Ondimba avait compris l’intérêt d’infiltrer les mouvements, d’en débaucher les meneurs ou de torpiller les plus radicaux pour influencer le scrutin en sa faveur. Lors de la présidentielle de 2005, les urnes parisiennes le déclarent vainqueur du vote de la diaspora de France. Mais, en 2009, la communauté choisit l’opposition.

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En vue de l’élection, chaque voix compte

« Nous sommes là pour rappeler aux dirigeants qu’ils sont au service des populations, et non l’inverse », aime souligner Cyrille Ona, ingénieur et chef d’entreprise, coordinateur général de Cohérence démocrate, mouvement d’opposition basé en France, après avoir été un fervent militant du Parti démocratique gabonais (PDG, au pouvoir). Alors, quel sera le choix des militants en 2016 ? Chaque camp y va de son meeting pour gagner les faveurs d’une diaspora a priori versatile.

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En décembre 2014, Jean Ping a ainsi organisé – et financé – un congrès de l’opposition pour l’alternance dans un grand hôtel parisien. Pour ne pas se laisser distancer, l’actuelle majorité a réagi début juin : une dizaine de proches du président ont effectué le voyage pour lancer dans la capitale française le Mouvement gabonais pour Ali Bongo Ondimba (Mogabo), qui se voulait un courant du Parti démocratique gabonais.

Las, quelques semaines plus tard, des luttes intestines ont fini par en provoquer la dissolution… Dans la foulée, Faustin Boukoubi, le secrétaire général du PDG, a appelé en renfort les patrons de partis alliés, comme Jean Boniface Asselé, Paul Mba Abessole et Florentin Moussavou, pour mobiliser les Gabonais de France autour du projet d’Ali Bongo. En 2016, chaque voix sera précieuse dans la course au Palais du bord de mer.

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