Requiem pour Unipal, distributeur de Procter & Gamble en Afrique centrale

Discrètement, la filiale de l’Arab Palestinian Investment Company a été mise en liquidation. Mais ses difficultés ne datent pas d’hier.

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Publié le 21 octobre 2015 Lecture : 3 minutes.

L’actionnaire a jeté l’éponge et l’information est passée presque inaperçue. Le 19 juin, le conseil d’administration d’Unipal Central & West Africa décide de fermer les activités du groupe, détenteur de la distribution au Cameroun et au Gabon, en exclusivité, des produits du géant américain de produits de grande consommation Procter & Gamble (P&G).

Le cabinet Jing & Partners, qui conseillait déjà l’entreprise basée au Cameroun, est chargé de mener le processus de liquidation. Me Laurent Dongmo doit entre autres écouler le stock de produits P&G – qui représentent près de 85 % du portefeuille d’Unipal – d’une valeur de 240 millions de F CFA (plus de 365 000 euros) encore dans les magasins. Les droits légaux des employés ont été payés après la décision de justice ainsi qu’une prime de bonne séparation équivalant à deux mois de salaire.

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Ainsi s’achève l’aventure de la filiale de l’Arab Palestinian Investment Company (Apic), qui avait démarré en 2010. Fondé en 1994 par des hommes d’affaires palestiniens, ce holding basé à Ramallah est actif dans la petite industrie et la distribution automobile. Mais en Afrique, c’est surtout dans les biens de grande consommation (lessives, détergents, couches, etc.) qu’il a tenté, via Unipal, de se faire une place.

Alors qu’elle reçoit une grande quantité de marchandises via le port de Douala, l’entreprise n’a loué aucun magasin pour le stockage. Conséquence, Unipal a payé plus de 100 millions de F CFA de surestaries pour la seule année 2013

En vain. Officiellement, c’est la décision de P&G en mars d’augmenter, pour la sixième fois depuis 2011, le prix de ses produits (Ariel, Pampers, Always, etc.), couplée à la hausse du dollar, qui a porté le coup de grâce à Unipal. Mais une autre hypothèse est avancée. « En janvier, P&G aurait, au regard des pertes et surtout des libertés prises vis-à-vis de ses exigences en matière de marketing et de distribution, décidé de mettre fin à son contrat avec Unipal, comme il l’avait déjà fait en Côte d’Ivoire en 2012 et au Ghana en 2014 », suppute un ancien cadre.

Dans son rapport annuel pour 2014, Tarek Omar Aggad, le PDG de l’Apic, évoque des difficultés logistiques et administratives ayant entraîné une perte sèche de 4 millions de dollars (environ 3,3 millions d’euros). Il faut dire que les choix de l’entreprise sont peu judicieux. Alors qu’elle reçoit une grande quantité de marchandises via le port de Douala, elle n’a loué aucun magasin pour le stockage. Conséquence, Unipal a payé plus de 100 millions de F CFA de surestaries pour la seule année 2013.

Peine perdue

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Devant la dégradation des comptes, les plans de restructuration se succèdent. L’effectif de l’entreprise, qui a compté jusqu’à 200 employés, est réduit à 120. Pour faire des économies, une nouvelle stratégie de distribution, axée sur le 20/80 – 80 % du chiffre d’affaires provenant de 20 % des clients -, est adoptée. Le portefeuille des produits est renforcé. Et l’Apic enchaîne les recapitalisations. La dernière, en décembre 2014, porte sur plus de 1 milliard de F CFA. Mais c’est peine perdue.

Après l’adoption de la stratégie de ventes directes – sans intermédiaires -, le chiffre d’affaires ne tourne en moyenne qu’à 400 millions de F CFA au Cameroun et la moitié au Gabon

« Hormis en mars dernier, nous n’avons jamais pu atteindre les objectifs [1 million de dollars pour le Cameroun] ! » constate l’ancien cadre. Après l’adoption de la stratégie de ventes directes – sans intermédiaires -, le chiffre d’affaires ne tourne en moyenne qu’à 400 millions de F CFA au Cameroun et la moitié au Gabon. Et les revenus émanant des grossistes qui alimentent le Tchad et le Congo n’ont jamais comblé l’écart.

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Depuis la fermeture d’Unipal, P&G recherche un repreneur. L’entreprise de distribution libanaise Transmed, qui a repris les portefeuilles ivoirien et ghanéen, aussi présente au Sénégal et au Soudan du Sud, a été un temps pressentie. Mais cette piste semble abandonnée. La multinationale américaine va-telle revenir vers Dacam, son premier partenaire au Cameroun ?

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