RDC : mauvaise passe pour le groupe pétrolier Soco

Accusée de corruption et de violences dans le cadre de ses recherches pétrolières dans le parc national des Virunga, en RD Congo, la compagnie britannique est dans la tourmente.

Le parc national des Virunga abrite des populations de gorilles des montagnes. © LuAnne Cadd / Virunga National Park / AFP

Le parc national des Virunga abrite des populations de gorilles des montagnes. © LuAnne Cadd / Virunga National Park / AFP

Publié le 3 novembre 2015 Lecture : 3 minutes.

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Épinglée dans le documentaire Virunga, produit par Leonardo DiCaprio, et mise en cause par l’ONG Global Witness dans un rapport paru en juin, Soco International vit un passage à vide.

La compagnie pétrolière britannique est accusée de corruption et de violences à l’égard des opposants à ses projets d’exploration pétrolière dans le parc national des Virunga, en RD Congo. Des documents écrits (chèques et reçus) publiés par Global Witness montrent que, malgré ses démentis répétés, Soco International aurait versé 42 250 dollars (37 500 euros) entre avril et mai 2014 à un officier de l’armée congolaise, le major Barimba Feruzi, accusé d’avoir intimidé ceux qui s’opposent à l’exploration pétrolière.

Soco, pour sa part, reconnaît avoir été escortée par l’armée congolaise – pour sa sécurité -, mais affirme n’avoir jamais payé les militaires

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En réaction, Soco a mandaté Clifford Chance, son propre cabinet d’avocats, pour mener une enquête « indépendante ». Selon celui-ci, les accusations de corruption « sont largement inexactes », bien qu’il ait tout de même trouvé des cas de paiements sans importance allant à l’encontre de la politique du groupe. L’enquête n’a pas non plus découvert de preuves d’intimidation. Soco, pour sa part, reconnaît avoir été escortée par l’armée congolaise – pour sa sécurité -, mais affirme n’avoir jamais payé les militaires, que ce soit directement ou indirectement.

Les conclusions du rapport de Clifford Chance n’ont cependant pas été publiées, et, de son côté, Global Witness récuse l’indépendance du cabinet d’avocats.

Sous la pression des ONG et de l’Unesco, Soco n’effectuera pas de forages dans le parc

Cotée au London Stock Exchange, Soco International est détenue par des actionnaires physiques à hauteur de 29 % (dont Edward Story, président-directeur général, et Ettore Contini, directeur non exécutif). Parmi les investisseurs institutionnels, on trouve Chemsa Ltd, EFG Private Bank, BlackRock Investment, Morgan Stanley et Crédit suisse. L’Église anglicane, qui avait également investi dans la compagnie, a annoncé son désengagement en juin pour un montant de 1,6 million de livres (2,2 millions d’euros). L’Église a expliqué que, selon elle, Soco n’avait pas apporté de réponses satisfaisantes après les accusations de corruption et de violation de droits humains. Elle reproche également à la société pétrolière de ne pas avoir interrompu ses forages dans le parc des Virunga, violant ainsi le droit international.

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Interrogé par Jeune Afrique, Soco, qui détient des actifs aussi en Angola, au Congo et au Vietnam, n’a pas souhaité répondre à nos questions.

Kinshasa a suspendu son permis en 2011, mais Soco a pu procéder à des tests sismiques à l’intérieur du parc.

Patrimoine

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Si l’affaire a fait autant de bruit, c’est notamment parce que le parc des Virunga, qui s’étend sur plus de 790 000 hectares, abrite l’une des dernières populations de gorilles de montagne, une espèce menacée de disparition.

Bien que le parc national soit classé au patrimoine mondial de l’humanité par l’Unesco, les autorités congolaises ont octroyé à Soco, en 2010, un contrat de partage de production pétrolière portant sur une concession de 7 500 km2, à cheval sur une partie du parc. Soumis à une forte pression étrangère, Kinshasa a suspendu le permis en 2011, mais la compagnie pétrolière a pu procéder à des tests sismiques à l’intérieur du parc en avril 2014 en vue d’estimer les effets que pourrait avoir une éventuelle exploitation pétrolière sur l’environnement.

Global Witness réclame une enquête de la justice du Royaume-Uni et des autorités américaines.

En juin 2014, après avoir terminé les études, et sous la pression de l’ONG WWF et de l’Unesco, Soco s’est engagé à ne pas faire de forages dans le parc. Mais Global Witness reste sceptique. « Nous aurions dû recevoir les résultats de cette étude sismique à la mi-2015, mais rien n’a été diffusé jusqu’ici », indique Nathaniel Dyer, responsable de campagne pour la RD Congo à Global Witness. Pour faire la lumière sur les pratiques de Soco International, Global Witness réclame une enquête de la justice du Royaume-Uni et des autorités américaines. Soco aurait notamment violé les lois britanniques anticorruption.

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