Constant Omari, président de la Fecofa : « Il faut sanctionner le racisme dans le foot, mais pas sans réfléchir »

Nommé par Sepp Blatter pour diriger la task force de la Fifa contre le racisme, le président de la Fecofa souhaite une répression plus dure, mais plus ciblée. Interview.

Image172587.jpg © Matthieu Zellweger/HAYTHAM PICTURES POUR J.A.

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Alexis Billebault

Publié le 11 novembre 2015 Lecture : 3 minutes.

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Ingénieur civil de profession et ancien directeur du port de Kinshasa, Constant Omari, 57 ans, préside la Fédération congolaise de football (Fecofa) depuis 2003 et a intégré le comité exécutif de la Fifa en avril. Il a été nommé fin août à la Commission des réformes de l’institution qui dirige le football mondial et, fin septembre, à la tête de sa task force, chargée de la lutte contre le racisme. Au niveau national, il a par ailleurs décidé de gérer le dossier des rentes des champions d’Afrique 1968 et 1974, que le gouvernement a cessé de payer.

Jeune Afrique : Étiez-vous candidat pour diriger la task force de la Fifa contre le racisme dans le football ?

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Constant Omari : Pas du tout. Il n’y a pas eu d’appel à candidatures. Le président Sepp Blatter m’en a informé lors du comité exécutif de la Fifa du 25 septembre. J’ai été un peu surpris, et bien sûr honoré, car c’est lui qui a proposé mon nom pour diriger cet organe.

Il y aura toujours des racistes, éradiquer ce fléau n’est évidemment pas possible

Les actes de racisme sont fréquents…

Soyons clair : il y aura toujours des racistes, éradiquer ce fléau n’est évidemment pas possible. Mais nous pouvons l’atténuer, et de manière concrète. S’y attaquer est une tâche ardue, ce sera un combat de longue haleine.

Les instances semblent parfois démunies ou timides dans ce combat. Faut-il se montrer plus répressif ?

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Je ne suis pas totalement d’accord avec vous. La Fifa a mis en place cette task force, à laquelle elle donne des moyens. Cela signifie qu’il y a une volonté de s’attaquer au problème, qui n’est évidemment pas bon pour l’image du football, et d’y apporter des solutions.

Quant à la répression, je pense effectivement qu’il faut se montrer plus dur. Mais nous disposons déjà d’un arsenal de textes relativement précis. Je vais donc m’atteler à les examiner et, à l’issue de cet examen, nous verrons s’ils sont assez efficaces, s’il y a de quoi sévir en appliquant les textes existants ou si, au contraire, certains d’entre eux présentent des carences. Auquel cas il faudra alors les améliorer.

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Pensez-vous qu’il faille infliger des amendes plus lourdes ou retirer des points aux équipes dont des supporters ont des comportements racistes ?

Prendre des sanctions est une chose nécessaire, mais on ne peut pas le faire sans réfléchir. Beaucoup de questions se posent. Faut-il imposer un huis clos à une équipe et pénaliser une majorité de supporters qui se comportent bien à cause des agissements d’une minorité ? Faut-il retirer des points à une équipe alors que ses joueurs n’y sont pour rien ? Il faut travailler encore plus avec les clubs et les fédérations. Il faut également faire de la prévention.

Certains anciens joueurs vivent dans le dénuement le plus total, comme Mwepu Ilunga, qui est décédé en mai dernier

Pourquoi la Fecofa a-t-elle décidé de régler le problème des rentes des joueurs champions d’Afrique en 1968 et 1974 (dont certains avaient participé à la Coupe du monde 1974) ?

En 2011, ces joueurs avaient reçu, de la bouche même d’Adolphe Muzito, alors Premier ministre congolais, l’assurance de recevoir une rente mensuelle de 500 dollars [441 euros] « pour services rendus à la nation ». Cette somme n’a été versée que pendant quatre mois. Quand Augustin Matata Ponyo a été nommé à la primature, en 2012, les anciens internationaux n’ont plus rien touché, sans aucune explication, alors que cela ne représentait qu’une somme globale mensuelle de 22 500 dollars.

Comprenez-vous l’attitude du gouvernement ?

Je préfère trouver des solutions plutôt que de me poser ce genre de question. Certains anciens joueurs vivent dans le dénuement le plus total, comme Mwepu Ilunga, qui est décédé en mai dernier. Après sa mort, ses anciens coéquipiers ont voulu me rencontrer. J’ai décidé de débloquer les fonds pour suppléer, au moins partiellement, à la défection du gouvernement.

Une somme de 200 dollars sera ainsi versée tous les mois aux seuls ex-internationaux vivant encore en RD Congo : quinze vivent dans la capitale, les deux autres à Lubumbashi. Le premier versement a eu lieu en août. En revanche, les familles des joueurs décédés ne toucheront pas cette rente.

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