Et si l’Inde devenait le partenaire favori de l’Afrique ?
Plus de cinquante États représentés, des promesses de dons importantes… Le sommet Inde-Afrique qui s’est déroulé à New Delhi du 26 au 29 octobre a été un succès.
Narendra Modi était inspiré ce 29 octobre. Devant quarante et un chefs d’État et de gouvernement africains, le Premier ministre indien a longuement évoqué leur passé commun pour faire vibrer son auditoire : des anciennes routes commerciales à la lutte contre la colonisation, du passé sud-africain du Mahatma Gandhi aux 2,7 millions d’Africains d’origine indienne.
L’instant était historique à plus d’un titre. New Delhi n’avait pas invité autant de chefs d’État africains depuis le Sommet des non-alignés en 1983. Et surtout, les principaux poids lourds du continent avaient répondu présent : l’Égyptien Abdel Fattah al-Sissi, le Sud-Africain Jacob Zuma ou le Nigérian Muhammadu Buhari.
Pour la première fois lors d’un événement de ce type, le roi du Maroc Mohammed VI lui-même s’est déplacé. Il faut dire que la République arabe sahraouie démocratique, qui n’est plus reconnue par l’Inde depuis 2000, n’était pas invitée. Ce rassemblement conviant les 54 États africains à New Delhi a donc été une démonstration de force. Ces derniers étaient même mieux représentés qu’à Pékin en 2006, lors de la première réunion sino-africaine.
Son gouvernement en a profité pour annoncer le doublement du nombre de bourses accordées aux étudiants africains, qui passera à 50 000 dans les cinq années à venir
Le timing était particulièrement opportun : alors que la croissance chinoise ralentit, celle de l’Inde se maintient à plus de 7 %. Son gouvernement en a profité pour annoncer le doublement du nombre de bourses accordées aux étudiants africains – son programme de coopération phare -, qui passera à 50 000 dans les cinq années à venir. Pour la même période, l’Inde a promis 10 milliards de dollars de lignes de crédit supplémentaires, qui s’ajouteront aux 7,4 milliards déjà consentis. Elle ne rattrape toutefois pas Pékin, dont les engagements pour l’Afrique dépassent les 30 milliards de dollars.
Les finances publiques indiennes ne permettaient pas de faire beaucoup mieux. Mais le pays se présente comme un égal, ce qui n’est pas toujours le cas de la Chine. L’Inde, encore pauvre, a même un PIB par habitant inférieur à la moyenne africaine.
Pour faire entrer les relations indo-africaines dans une nouvelle ère, New Delhi devra donc s’appuyer sur son puissant secteur privé et ses conglomérats, tels Tata et Bharti Airtel. Il lui reste aussi de nombreux marchés à conquérir, notamment en Afrique francophone.
Rabat et New Delhi ont déjà des échanges solides : l’agriculture indienne consomme une grande part des phosphates marocains
En cela, le Maroc, particulièrement bien représenté au Business Forum, qui se déroulait dans le même temps, pourrait faire figure de pont entre les deux mondes. « Les partenariats entre nos deux pays ainsi qu’avec ceux d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique centrale font partie de nos objectifs », confie en coulisses Salaheddine Mezouar, le ministre marocain des Affaires étrangères. Rabat et New Delhi ont déjà des échanges solides : l’agriculture indienne consomme une grande part des phosphates marocains.
Dotée de peu de ressources naturelles, l’Inde aura de plus en plus besoin de l’Afrique dans sa quête de puissance. C’est également vrai sur le plan diplomatique. Son plaidoyer pour une réforme des institutions financières internationales et du conseil de sécurité de l’ONU rejoint celui du continent. Bien que représentant – ensemble – un tiers de l’humanité, ils n’y disposent d’aucun siège permanent.
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