Danse : « Sacre #2 », le printemps colonial de Germaine Acogny
Pour ses 70 ans, Olivier Dubois a offert à Germaine Acogny l’une de ses plus belles partitions en lui façonnant un « Sacre du printemps » unique.
Du sur-mesure pour la mère de la danse contemporaine africaine, qui offre au spectateur quarante minutes d’une intensité rare. Pantalon noir, soutien-gorge assorti, le crâne rasé, la pipe à la bouche, la fondatrice de l’École des sables fait montre d’une présence scénique remarquable alors qu’elle est enfermée dans un cube de verre, sorte de cage qui joue avec l’exhibition dans ce qu’elle a de plus coloniale.
La colonisation, je le répète, déshumanise l’homme même le plus civilisé, prévient-elle
Certes, elle est « l’élue noire » de Maurice Béjart, la fille qu’aurait aimé avoir le chorégraphe, dont l’arrière-grand-mère était sénégalaise et qui lui avait promis le rôle pour son Sacre. Mais elle est surtout l’élue sacrifiée à chaque renouveau saisonnier dans cette pièce composée par Igor Stravinsky, symbolisant pour l’occasion une Afrique avilie et dépossédée. Ces « récoltes d’oreilles », ces « maisons brûlées », « ce sang qui fume, […] on ne s’en débarrassera pas à si bon compte », prévient-elle, citant le Discours sur le colonialisme, de Césaire. Et de poursuivre : « La colonisation, je le répète, déshumanise l’homme même le plus civilisé ; […] la conquête coloniale, fondée sur le mépris de l’homme indigène et justifiée par ce mépris, tend inévitablement à modifier celui qui l’entreprend. »
Mon élue noire (Sacre #2), d’Olivier Dubois, avec Germaine Acogny, actuellement en tournée.
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