Quelques réponses aux interrogations soulevées en 2015

L’année 2015 s’achèvera dans deux semaines. Elle nous aura apporté beaucoup de changements : les avons-nous correctement interprétés ?

Le président du Burkina Faso nouvellement élu, Roch Marc Christian Kaboré, salue la foule rassemblée devant son quartier général après que les premiers résultats des élections le donnent vainqueur du scrutin. © Theo Renaut/AP/SIPA

Le président du Burkina Faso nouvellement élu, Roch Marc Christian Kaboré, salue la foule rassemblée devant son quartier général après que les premiers résultats des élections le donnent vainqueur du scrutin. © Theo Renaut/AP/SIPA

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Publié le 17 décembre 2015 Lecture : 4 minutes.

Avant d’accueillir 2016, je voudrais rechercher avec vous les réponses à quelques questions que nous posent certains événements intervenus en ce mois de décembre.

Nous éclairerons ainsi les prolongements qu’ils auront dans les prochains mois et comprendrons mieux ce qui nous attend.

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I- Où en sont les relations Chine-Afrique ?

Xi Jinping, président de la République populaire de Chine, a coprésidé, les 4 et 5 décembre, à Johannesburg, le Forum sur la coopération sino-africaine. C’était le deuxième sommet Chine-Afrique, et le premier à se tenir sur le continent.

Le temps qu’il y a consacré, les textes des discours qu’il a prononcés, les annonces qu’il a faites indiquent que ce grand pays, dont on sait qu’il est en pleine décélération économique – c’est sa première crise de croissance depuis trente-cinq ans -, maintient ou même accentue son intérêt stratégique pour l’Afrique, veut l’aider à s’industrialiser, à se doter des infrastructures qui lui font défaut, à disposer des techniciens nécessaires à son développement.

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Ni l’Europe ni les États-Unis n’ont eu dans le passé ne serait-ce que la velléité de faire, avec et pour l’Afrique, ce que la Chine a expressément renouvelé sa volonté d’accomplir.

« L’industrialisation est le passage obligé pour l’émergence économique ; elle est indispensable à la création d’emplois, à l’éradication de la pauvreté et à l’amélioration du niveau de vie », a dit Xi Jinping, qui a promis « un soutien financier, technique et intellectuel à l’effort d’industrialisation du continent ». « Nous rejetons le protectionnisme et préconisons une économie ouverte, a-t-il ajouté. La Chine partagera avec vous, sans réserve, ses technologies avancées et adaptées à l’Afrique. »

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Pour les trois années qui viennent, la Chine a alloué 60 milliards de dollars sous forme de prêts à des taux privilégiés et d’aides diverses à ce continent avec lequel elle réaffirme sa volonté de « partager un avenir commun et de persévérer dans une coopération gagnant-gagnant ».

Je pense que les Africains ont en la Chine un partenaire sérieux, intelligent et responsable.

Il leur revient, bien sûr, face à lui, de défendre leurs intérêts.

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II- Le Nigeria, première économie africaine : est-il sur la bonne voie ?

Je pense que c’est le cas et que son président élu il y a près de neuf mois, même s’il en a mis plus de six à constituer son gouvernement, est à pied d’œuvre, entouré des hommes et des femmes qu’il lui fallait.

Il sait ce qu’il veut : « La priorité absolue de mon nouveau gouvernement ? Mettre un terme définitif au cycle infernal de la corruption et du pillage des richesses du Nigeria, qui a poussé les investisseurs étrangers intéressés par l’Afrique à se détourner de notre pays.

Nous devons nous tourner vers des modèles tels que Singapour, une nation qui a su devenir une grande puissance économique malgré des ressources naturelles très limitées, simplement en s’appuyant sur l’ingéniosité de sa population. Si Singapour l’a fait, le Nigeria, qui regorge de richesses, doit en être capable lui aussi.

Les pays qui ont connu une croissance économique rapide durant les dernières décennies ont une chose en commun : ils se sont d’abord attachés à réformer leur méthode de gouvernance, à éradiquer la corruption et à prouver au monde et à leur propre population qu’il était possible d’investir chez eux en toute sécurité.

Nous nous sommes déjà attelés à cette tâche. C’est l’unique moyen pour le Nigeria d’atteindre la réussite économique qu’il mérite. »

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III- L’élection éclatante de Roch Marc Christian Kaboré et sa prise de fonctions comme président du Burkina changent-elles la donne en Afrique de l’Ouest ?

L’entrée du Burkina dans une nouvelle ère de stabilité est de bon augure pour ce pays enclavé et sans richesses naturelles. C’est un facteur positif pour l’ensemble de la Cedeao.

Et c’est, en particulier, une promesse de réchauffement des relations entre le Burkina et la Côte d’Ivoire, deux pays voisins et interdépendants, puisque trois à quatre millions de Burkinabè vivent et travaillent en Côte d’Ivoire.

Si un jour prochain le continent s’orientait vers une réduction du nombre excessif de ses États, on verrait s’esquisser l’idée d’une fédération entre les deux voisins. Mais, sans attendre, ils devraient être en mesure d’instaurer, dès 2016, à nouveau entre eux une ère d’entente et de coopération.

IV- Les Africains qui s’intéressent à la France ne savent plus où elle en est ni où elle va.

Elle va mal, à mon avis, et ses dirigeants actuels la conduisent dans la mauvaise direction.

Le graphique ci-dessous montre que le chômage recule partout dans la zone euro, où deux millions de personnes ont retrouvé du travail en 2014 et en 2015, sauf en France, où il augmente inexorablement.

Si l’extrême droite personnifiée par la famille Le Pen et son « Front national » prospèrent, c’est à cause de cette montée du chômage et de l’impopularité des partis politiques, des syndicats et des personnalités qui s’expriment en leurs noms.

En déclarant que la France est en guerre (contre Daesh), en se muant en « chefs de guerre », le président François Hollande et le Premier ministre Manuel Valls se laissent aller à ce que j’appellerais une fuite en avant.

Leur renonciation au « pacte de stabilité » au profit d’un « pacte de sécurité » illustre cette fuite devant l’effort : le déficit budgétaire de la France, auquel elle est abonnée depuis plus de trente ans, va reprendre sa courbe ascendante, et les Français apprendront en 2016 que l’endettement de leur État a franchi la barre fatidique des 100 % du PIB.

Les agences de notation s’intéresseront derechef à l’évolution de l’économie française et on dira de nouveau que la France est « l’homme malade de l’Europe ».

Ce pays est déjà en période électorale, mais dans sa classe politique on ne voit pas qui, en 2017, pourrait se présenter en « sauveur ».

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