Pourquoi Boko Haram est responsable de la baisse du prix du bétail au Tchad

Deuxième source de devises après le pétrole, le bétail n’est plus exporté vers le Nigeria, son principal client, à cause de Boko Haram. Les éleveurs s’adaptent… et les consommateurs locaux savourent.

Marché aux bestiaux de Ngabo, dans le 8e arrondissement de N’Djamena. © ABDOULAYE-BARRY POUR J.A.

Marché aux bestiaux de Ngabo, dans le 8e arrondissement de N’Djamena. © ABDOULAYE-BARRY POUR J.A.

Madjiasra Nako

Publié le 30 décembre 2015 Lecture : 2 minutes.

Où va le Tchad ? © Philippe Desmazes/AFP
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Sur le marché au bétail, dans le 8e arrondissement de N’Djamena, des centaines de bœufs et de moutons plutôt gras broutent leurs bottes de paille. À côté, quelques éleveurs dorment d’un œil… prêts à bondir à la vue du moindre badaud ou motocycliste. Dès qu’un chaland potentiel passe, ils accourent et jouent des coudes pour l’attirer vers leur troupeau. « Les temps sont durs, il faut vendre », glisse un intermédiaire. En effet, le bétail venant de l’est et du centre du pays – les principales zones d’élevage du Tchad – ne poursuit désormais plus sa route vers le nord du Nigeria, dont la traversée est devenue impossible depuis bientôt deux ans, à cause de la guerre qui y est menée par Boko Haram.

Le Nigeria est pourtant le premier consommateur de viande tchadienne. Mais le bétail y est exporté « sur pied », c’est-à-dire sur pattes. Les troupeaux quittent le Tchad par la route de Ngueli, traversent le Cameroun et poursuivent leur voyage dans le nord du Nigeria jusqu’à Maiduguri, la capitale de l’État de Borno, d’où ils sont embarqués dans des camions vers d’autres grands marchés. Depuis l’occupation de plusieurs villes de l’État de Borno, dont Gambaru et Dikwa, des éleveurs tchadiens ont été dépouillés de leur bétail par les islamistes et, désormais, la plupart ont renoncé à se risquer hors des frontières.

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Chute des prix

En témoignent les chiffres des déclarations en douane à Ngueli, porte de sortie du pays vers le Cameroun. Les recettes annuelles, d’environ 1 milliard de F CFA (plus de 1,5 million d’euros) auparavant, y sont tombées à 420 millions de F CFA en 2014. « Les années 2014 et 2015 ont été difficiles », reconnaît l’inspecteur Moussa Hidjab, chef de division au bureau bétail de la direction des douanes. Entre-temps, les routes de l’exportation ont changé. On essaie de traverser le Cameroun plus au sud, pour contourner le nord du Nigeria. « De toute façon, il faut que le bétail soit exporté, poursuit Moussa Hidjab. Sinon il y aura une pression trop forte sur les pâturages et cela risque d’engendrer des conflits. »

La viande locale jouit d’une excellente réputation dans les pays voisins et dans toute l’Afrique centrale

Pendant ce temps, les ménagères ont pu constater une forte baisse des prix de la viande sur les marchés. « Le jarret de bœuf, qui se vendait à 3 000 F CFA il y a encore quelques mois, est aujourd’hui à 2 000 F CFA, voire à 1 500 F CFA en fin de journée », jubile une N’Djaménoise. Pour les fêtes de fin d’année, les Tchadiens pourront aussi profiter de la chute des prix du mouton : ils peuvent espérer acheter un bélier entre 45 000 et 50 000 F CFA, contre 70 000 F CFA auparavant. De quoi savourer à des prix raisonnables la viande locale, qui jouit d’une excellente réputation dans les pays voisins et dans toute l’Afrique centrale.

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