Mode : quand le jersey s’encanaille

De l’imprimé et du bariolé, de nouvelles matières et des styles singuliers… Les artistes originaires du continent boostent la création britannique.

Le styliste Samson Soboye devant sa boutique à Shoreditch. © STUART FREEDMAN/IN PICTURES/CORBIS

Le styliste Samson Soboye devant sa boutique à Shoreditch. © STUART FREEDMAN/IN PICTURES/CORBIS

NICOLAS-MICHEL_2024

Publié le 29 décembre 2015 Lecture : 3 minutes.

Image d’illustration © Kalpesh LathIgra pour J.A.
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Londres, l’Africaine

Il y a du wax dans le smog ! Depuis quelques années, la capitale britannique vibre aux couleurs de l’Afrique. Soutenus par des institutions publiques et des initiatives privées, les créateurs de tout poil y trouvent matière à s’exprimer. Visite à travers une ville plus vibrionnante que jamais.

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Tout a commencé avec du wax dans le smog, de la couleur entre les briques, du flamboyant dans l’anthracite. Peut-être faut-il remercier pour cela le plasticien londonien d’origine nigériane Yinka Shonibare MBE. En faisant d’un tissu étroitement associé à l’Afrique – mais en réalité d’origine indonésienne et essentiellement fabriqué en Hollande – le matériau d’une palette lui permettant de revisiter l’histoire de l’art occidental, l’artiste a débridé la création britannique.

Dans le domaine de la haute couture, un nom a émergé, porté au pinacle pour avoir habillé rien de moins que la première dame des États-Unis, Michelle Obama, et une palanquée d’autres célébrités comme l’actrice Uma Thurman ou les mannequins Linda Evangelista et Solange Knowles. Loué par la puissante femme de médias Oprah Winfrey, Duro Olowu a lancé sa première collection en 2004, et ses pièces alliant tissus vintage et imprimés africains ont tout de suite rencontré un écho favorable. Dès 2005, il est élu « nouveau designer de l’année » par le British Fashion Council tandis que sa robe, la Duro Dress, est récompensée par le magazine Vogue.

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Né d’un père nigérian et d’une mère jamaïcaine, Olowu doit beaucoup à cette dernière : « Son style était un vrai mélange d’habits nigérians, de vêtements conçus par des designers européens qu’elle aimait et de pièces particulières qu’elle demandait à son couturier de Lagos », raconte-t-il sur le site artbaseafrica.org. Inspiré aussi par les musiciens des années 1970 (et les pochettes de leurs albums !) ou par « la palette colorée de la toile The Raising of Lazarus (2007) de [son] ami Chris Ofili », Duro Olowu se pose aussi en défenseur d’une certaine tradition. « Une esthétique transculturelle forte, une qualité de la coupe et des matières et un regard sur les formes féminines sont des choses qui comptent beaucoup pour moi. La nouveauté, c’est bien, mais, comme pour tout le reste, l’intemporalité, c’est mieux. »

Les créateurs d’origine africaine bousculent les codes

Comme le montrent les différentes éditions de l’Africa Fashion Week London ou les défilés de l’Africa Centre Summer Festival de Covent Garden, Duro Olowu – qui est aussi commissaire d’exposition – a ouvert la voie à toute une flopée de créateurs d’origine africaine qui bousculent aujourd’hui le monde de la mode, au risque parfois de tomber dans la caricature en se laissant écraser par la forte expressivité du tissu imprimé et bariolé. Mais peu importe, comme le dit le styliste Samson Soboye, qui a installé sa boutique sur Calvert Avenue (Shoreditch) : « Londres est un endroit merveilleux où l’on peut bénéficier de l’apport d’une grande variété de cultures. »

Juste retour des choses, la création sublimée dans le creuset londonien influence désormais le continent – ou du moins certains milieux aisés. La femme d’affaires nigériane née à Londres Reni Folawiyo a ainsi ouvert à Lagos une grande boutique de luxe, Alara, présentant les œuvres des plus grands couturiers africains, dans un bâtiment signé David Adjaye, avec aux fourneaux le chef sénégalais Pierre Thiam pour l’aspect gastronomique.

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Olympia West Catwalk made in Africa

AFWL : L’ACRONYME est désormais connu, qui désigne l’Africa Fashion Week London. Créé en 2011 par la Londonienne d’origine nigériane Ronke Ademiluyi, ce rendez-vous annuel de la mode africaine a permis à quelque 300 designers d’exposer devant 45 000 visiteurs. La dernière Fashion Week s’est déroulée en août 2015 à l’Olympia West (West Kensington) avec une quarantaine de marques présentées (www.africafashionweeklondon.com). Mais l’AFWL ne se contente pas d’un show annuel, elle participe aussi au Black History Month, célébré en octobre au Royaume-Uni, et à l’Africa Centre Summer Festival. L’édition 2016 de l’AFWL aura pour thème « Quand l’Afrique rencontre le monde ». Mais avant cela, une grande exposition sur la mode africaine contemporaine dans les capitales du continent, « Fashion Cities Africa », aura lieu à Brighton (sud du pays), du 30 avril 2016 au 8 janvier 2017.

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