Allemagne : peur sur la ville

Après la vague d’agressions contre des femmes, à Cologne, dans la nuit de la Saint-Sylvestre, l’extrême droite s’enflamme, les migrants rasent les murs et Angela Merkel est dans le pétrin.

Manifestation des populistes de Pegida, à Cologne, le 9 janvier. © SASCHA SCHUERMANN/GETTY IMAGES

Manifestation des populistes de Pegida, à Cologne, le 9 janvier. © SASCHA SCHUERMANN/GETTY IMAGES

Publié le 23 janvier 2016 Lecture : 3 minutes.

Pour des centaines de jeunes Allemandes, la nuit de la Saint-Sylvestre a viré au cauchemar. À ce jour, plus de 550 plaintes ont été déposées, dont 40 % pour agression sexuelle. Des événements similaires ont eu lieu en Autriche, en Suisse et en Suède. « En 200 mètres, j’ai été touchée une centaine de fois », témoigne Katja, une jeune habitante de Cologne, l’épicentre du séisme. « Nous étions encerclées par un groupe de vingt ou trente hommes », raconte une autre. Les procès-verbaux font aussi état du vol d’un portable ou d’un portefeuille. Au total, un millier d’hommes, souvent ivres, seraient impliqués dans ces exactions d’une ampleur sans précédent en Allemagne. L’émoi est considérable.

D’abord parce que la police de Cologne a été incapable de mettre les agresseurs hors d’état de nuire. Un rapport officiel évoque une nuit « humiliante » pour les forces de l’ordre « totalement dépassées ». La vérité est que la ville fait face à une nouvelle forme de criminalité organisée. La justice va jusqu’à parler de taharrush gamea, ce harcèlement sexuel dans la foule qui existe dans certains pays arabes.

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Le choc est d’autant plus violent que l’Allemagne est l’un des pays européens où l’on dénombre le moins d’agressions sexuelles. Les femmes peuvent s’y promener seules la nuit sans être importunées.

Ensuite, parce que presque tous les agresseurs identifiés sont d’origine étrangère. Pour l’heure, on en recense une trentaine, parmi lesquels 9 Algériens, 8 Marocains, 4 Syriens et 5 Iraniens. « Depuis 2011, les délinquants venus d’Afrique du Nord sont les auteurs de la majorité des vols à la tire commis à Cologne. Ce groupe est enclin à la violence et utilise souvent des armes, couteaux ou gaz lacrymogènes », écrivent des policiers dans un rapport d’enquête.

Par ailleurs, 18 de ces jeunes hommes sont des demandeurs d’asile arrivés depuis peu. D’autres sont en situation irrégulière. Les autorités s’alarment du nombre croissant de migrants non enregistrés, ou enregistrés sous une fausse identité. Les travailleurs sociaux sont très conscients de l’image déplorable que nombre de ces hommes ont des femmes. Ces derniers temps, des incidents ont eu lieu dans des centres d’hébergement d’urgence.

Merkel obligée de durcir sa politique migratoire

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Tout cela contribue-t-il à expliquer les événements du 31 décembre ? Quoi qu’il en soit, il n’en a pas fallu davantage pour que les groupes d’extrême droite, déjà chauffés à blanc par la politique d’ouverture d’Angela Merkel, s’enflamment. Des membres de Pegida, un mouvement anti-islam virulent, ont attaqué des Pakistanais et un Syrien à Cologne. Et les réfugiés se sentent menacés. « Nous sommes entrés dans une nouvelle dimension de la haine », déplore Aiman Mazyek, le président du culte musulman, qui croule sous les mails et les appels menaçants.

On s’en inquiète jusqu’au sommet de l’État, alors qu’entre 3 000 et 4 000 migrants continuent de franchir quotidiennement la frontière. Quant à la chancelière, elle est dans un sacré pétrin. Dans ses vœux de fin d’année, quelques heures avant les attaques, elle répétait que l’immigration est « une chance pour l’Allemagne ». Elle est désormais sommée de durcir sa politique d’accueil. Sous la pression de l’opinion, le nombre des reconduites à la frontière a augmenté. Et les critères justifiant l’expulsion d’un demandeur d’asile auteur d’un crime ont été assouplis. Jusqu’à présent, il fallait avoir été condamné à trois ans de prison ferme et ne pas craindre pour sa vie ou sa santé dans son pays d’origine. Désormais, une simple peine d’un an de prison, même avec sursis, suffit. Merkel n’a pas le choix : il lui faut rapidement calmer le jeu.

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Des élections auront lieu en mars dans trois Länder. Le risque est que les populistes de l’Alternative pour l’Allemagne (AfD), que les sondages créditent déjà de 10 % des intentions de vote, profitent de l’aubaine pour réussir une percée.

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