Questions sans réponses

Étrange début d’année. Ils ne l’avouent pas, mais ceux-là mêmes dont le métier est de prévoir sont dans le noir.

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Publié le 22 janvier 2016 Lecture : 5 minutes.

Incapables d’éclairer la voie, de nous dire ce qui nous attend et de quoi demain sera fait, ils se réfugient dans la diversion ou les généralités.

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« Plus encore que 2015, l’année dont nous vivons les premiers jours sera celle des surprises », disent-ils, avant d’ajouter : « Qui avait prédit que la Russie occuperait la Crimée ou qu’aux États-Unis un Donald Trump connaîtrait le succès qu’il a rencontré ? Et l’émergence de Daesh et l’occupation de Mossoul par ce fossoyeur inattendu d’Al-Qaïda, qui les a annoncées ? »

Le Brésil gardera-t-il sa présidente, ou bien verra-t-on ceux qui veulent la « sortir » gagner leur pari ? Le président de la Chine, Xi Jinping, semble avoir concentré entre ses mains tous les pouvoirs, ou presque. Mais qui peut prévoir ce qu’il en fera ?

Le prochain président des États-Unis sera-t-il un démocrate ? Hillary Clinton ou un autre ?

Le monde veut-il plus de démocratie, ou bien sommes-nous entrés dans une ère où l’on recherche des « hommes forts » à la Vladimir Poutine ?

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Couronnée en décembre dernier personnalité de l’année 2015 par les plus grands journaux du monde, la chancelière d’Allemagne, Angela Merkel, est, déjà, sur un siège éjectable. Sera-t-elle encore chancelière fin 2016 ?

La croissance de l’économie mondiale se maintiendra-t-elle aux alentours de 3 % l’an ? Ou bien sera-t-elle de nouveau orientée à la baisse, flirtant avec une nouvelle crise ? Pourquoi la Banque mondiale, le FMI et les économistes les plus écoutés affichent-ils leurs désaccords ou leur perplexité au lieu de nous proposer les mêmes pronostics ?

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Des questions comme celles-là, on peut en égrener à l’infini. À quoi bon, dès lors que nul ne peut leur donner de réponses ?

Je me contenterai donc d’analyser pour vous deux événements de la semaine qui ont retenu mon attention.

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1) Mercredi 13 janvier. Dernier discours sur l’État de l’Union de Barack Obama.

Il y fait d’abord ce constat : « Nous vivons une période de changements extraordinaires des changements qui vont modifier profondément notre façon de vivre, de travailler, notre planète et notre rapport au monde. Des changements qui apporteront leur lot de grandes découvertes médicales, mais aussi de perturbations économiques propres à bouleverser la vie des travailleurs et de leurs familles. Nous pourrons offrir une éducation décente aux jeunes filles, y compris dans les zones les plus reculées de la planète, mais, dans le même temps et grâce aux mêmes avancées technologiques, les terroristes auront les moyens de communiquer et de se coordonner d’un continent à l’autre. Le changement qui s’annonce est porteur de grandes espérances, mais il peut aussi, potentiellement, aggraver les inégalités. La seule certitude étant que, quel que soit le jugement que nous portons sur ces évolutions, elles ne vont faire que s’accélérer. »

Cela posé, Barack Obama s’est interrogé : Comment pouvons-nous garantir la sécurité des États-Unis, continuer à diriger le monde, mais sans demeurer plus longtemps son gendarme ?

Il ne veut décidément pas que son pays reste « le gendarme du monde ».

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Al-Qaïda et Daesh ? Il les définit ainsi : « Ils sont une menace parce que, dans le monde d’aujourd’hui, il suffit d’une poignée de terroristes qui n’accordent aucune importance à la vie, la leur incluse, pour que le danger existe pour nous et nos alliés ; internet est leur arme pour empoisonner les esprits. »

Mais il les ramène à leurs limites : « Ils essayent de se faire passer pour les représentants de l’une des plus grandes religions du monde. C’est un mensonge, car ils ne sont que des fanatiques et des tueurs qu’il faut traquer, déraciner et détruire.

C’est ce que nous sommes en train de réussir.

L’instabilité et le tumulte qu’ils ont créés vont peut-être durer des décennies. Nous les combattrons le temps qu’il faudra. Pas seuls, mais en mobilisant contre eux le reste du monde, en menant une politique intelligente, en faisant preuve de patience, en recourant à la diplomatie.

Notre accord avec l’Iran, le fait de renouer avec Cuba participent de cette stratégie. Fermer la prison de Guantánamo, coûteuse, inutile et qui ne sert que nos ennemis, irait dans le même sens.

Insulter les musulmans, vandaliser leurs mosquées ne concourt pas à notre sécurité, au contraire. Cela nous diminue aux yeux du monde, rend plus difficile pour nous d’atteindre nos objectifs. »

Parlant de la démocratie, celle qu’il veut promouvoir, Barack Obama conclut : « Cessons de croire que ceux qui sont en désaccord avec nous ont nécessairement tort. Être démocrate, c’est chercher le compromis, refuser de n’écouter que ceux qui sont d’accord avec nous. »

2) Jeudi 14 janvier, un anniversaire.

Le « Printemps arabe » a obtenu en Tunisie son premier succès il y a cinq ans : le 14 janvier 2011, il a abattu le régime de Ben Ali ; vieux de vingt-trois ans, devenu dictatorial et inefficace, il s’est effondré comme un château de cartes.

Les Tunisiens aiment à croire qu’ils ont fait une révolution. Ils ont, certes, éliminé un régime réputé inexpugnable, le pouvoir a changé de mains, et une nouvelle Constitution a remplacé celle qui n’a pas empêché la dictature.

Mais les islamistes ont été portés au pouvoir et ont beaucoup déçu. L’ont-ils quitté pour de bon ? Ou bien se sont-ils tapis à ses côtés pour mieux y revenir ?

L’économie est en panne, le terrorisme a frappé et s’installe aux portes du pays, le multipartisme révèle ses faiblesses, et le régime parlementaire ne confirme pas les espoirs que ses apôtres ont mis en lui.

La génération des quinquas qui aurait dû accéder au pouvoir tarde à le faire et, à ce jour, n’a pas produit les hommes et femmes de l’indispensable relève.

La Tunisie a-t-elle la gouvernance dont elle a besoin pour relever son économie et faire face aux menaces qui pèsent sur sa sécurité ?

En dehors des cercles étroits du pouvoir, personne ne le pense, et les partenaires de la Tunisie s’en inquiètent.

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Élu pour cinq ans avec le mandat de faire barrage aux islamistes, le président a jugé plus réaliste – plus habile et plus payant – de s’entendre avec eux.

Dans sa quatre-vingt-dixième année, il a choisi un Premier ministre « à sa main » et qui n’a, lui, que 67 ans.

Le tandem qu’ils ont constitué prend son temps, réagit à l’événement plus qu’il ne l’anticipe, administre plus qu’il ne gouverne. Il recherche et obtient l’adhésion de ces islamistes qu’il était censé écarter.

Pour compléter sa mainmise sur les postes clés, il les confie à des hommes et à des femmes choisis à cet effet.

C’est la signification du remaniement qu’il vient d’opérer et qui n’est pas le dernier.

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