Gastronomie : l’éloge du café selon Hippolyte Courty

Historien de formation, Hippolyte Courty est devenu contre toute attente torréfacteur. Et célèbre un nectar trop souvent avalé à la va-vite sans en apprécier toutes les saveurs.

Une graine miraculeuse qui peut être préparée de mille et une façons. © ERWAN FICHOU

Une graine miraculeuse qui peut être préparée de mille et une façons. © ERWAN FICHOU

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Publié le 26 janvier 2016 Lecture : 3 minutes.

Comme il n’aimait pas le café, Hippolyte Courty en a fait un livre – à vrai dire, le mot monographie conviendrait mieux – de 324 pages. « Quand l’idée d’un essai sur sa dégustation m’a été proposée, je n’aimais pas le café et je n’y comprenais rien, se souvient-il. Je ne me satisfaisais pas de la puissance, du goût fort, je n’avais pas d’addiction, je ne connaissais pas les mots qui s’y rattachent, l’arôme, l’odeur… On m’a dit : « Il faut aller au-delà. » J’ai été poussé dans mes retranchements. » Il est donc allé au-delà – en Éthiopie, en Inde, à la Réunion, au Timor, au Brésil, au Rwanda, au Costa Rica et ailleurs encore – et il a changé de camp. Aujourd’hui, outre écrire sur le sujet, Hippolyte Courty le torréfie dans son repaire baptisé L’Arbre à café, fournit la haute restauration comme les amateurs éclairés et se bat pour promouvoir un « petit noir » de haute qualité.

Historien de formation, auteur d’une thèse en histoire médiévale sur les représentations du pouvoir, Courty s’intéresse depuis longtemps à la question du goût. Il faut peut-être chercher les origines de cette passion qui le conduisit à être agent de vignerons, alors même qu’il poursuivait ses études, dans ses terroirs de la Creuse et du Dauphiné, où l’on tuait le cochon, où le père œuvrait dans la coutellerie d’art, où l’on « faisait la cuisine tout le temps ». « Pour moi, qu’on écoute de la musique, qu’on sente, qu’on goûte, cela relève de l’attention, de la présence au monde, dit-il. Bien sûr, on a tous une physiologie différente, mais en ce qui me concerne, le point essentiel de ma formation a été de me rendre compte que par le goût et les odeurs je pouvais comprendre et ressentir beaucoup de choses. »

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Un passionné du « kahwa »

Miné par « la solitude de la thèse », grand lecteur d’histoires gastronomes, Courty n’avait pas trouvé sa voie avant que ses papilles ne lui révèlent les splendeurs organoleptiques du café. « Jusqu’alors, c’était comme si je n’avais pas trouvé d’espace, moi qui aime bien changer les choses, ouvrir des voies, être dans le faire et dans la transmission… » C’est la fin des années 2000, le livre envisagé ne se fait pas, mais de multiples horizons s’ouvrent qui suivent la ligne de l’équateur, partout où la plante originaire d’Éthiopie a trouvé les conditions idéales pour plonger ses racines. Hippolyte Courty achète pour 8 000 euros de café en Amérique latine et s’improvise torréfacteur, avec une machine louée. Le chemin parcouru depuis est incroyable, à la fois sur la voie de la connaissance et sur celle de la qualité gastronomique d’un produit trop souvent négligé, avalé à la va-vite pour se donner un coup de fouet.

Accompagner, voire propager la révolution actuellement en cours dans les cafés de qualité

Quand Courty parle, il ne peut s’arrêter, sautant d’une anecdote à l’autre, mêlant considérations géopolitiques et analyses économiques, ne savourant rien autant que les mots pour dire les saveurs du « kahwa » (« ce qui ravit et incite à l’envol »). Ceux qui veulent en savoir plus sur le fossé qui sépare les pays de la tasse (consommateurs) et ceux de la plante (producteurs), sur l’histoire de cette graine miraculeuse, sur les multiples manières d’en cultiver et d’en transformer les différentes variétés ou encore sur les innombrables façons de le préparer et de le boire se plongeront des heures durant dans Café, ouvrage alerte aux prétentions exhaustives.

Hippolyte Courty, pour autant, ne se disperse pas. Il poursuit un objectif essentiel qu’il défend sur le plan théorique et applique sur le plan pratique : améliorer la chaîne de valeur, depuis la botanique jusqu’à la cuisson… et même jusqu’au recyclage du marc ! Il s’agit pour lui d’accompagner, voire de propager la révolution actuellement en cours dans les cafés de qualité. Un seul but, l’excellence. Ainsi L’Arbre à café offre-t-il la seule formation certifiée de France en Q Grader, ces dégustateurs professionnels certifiés à noter les cafés. Le point d’orgue de nos repas, des petits matins aux grands soirs, et notre vie pourraient bien en être bouleversés…

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>> L’Arbre à café (www.larbreacafe.com), 10 rue du Nil, 75002 Paris

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