Cinéma : « Chocolat », une allégorie contre les discriminations
Oublié par la France pendant près de cent ans, le clown Chocolat s’affiche aujourd’hui au cinéma comme en librairie. Tandis que l’historien Gérard Noiriel compile toutes les informations connues sur celui qui s’appelait en réalité Rafael, l’acteur et réalisateur Roschdy Zem fait de son histoire une allégorie contre les discriminations.
Un siècle après, le clown Chocolat reconnu
Oublié par la France pendant près de cent ans, le clown Chocolat s’affiche aujourd’hui au cinéma comme en librairie.
C’est à une fable, un brin mélodramatique, que nous convie Roschdy Zem, le réalisateur de Chocolat. Mettant en lumière le destin extraordinaire du premier clown noir en France, qui connut un franc succès à l’orée du XXe siècle avant de sombrer dans l’oubli jusqu’à ce qu’en 2012 l’historien Gérard Noiriel l’exhume pour un projet théâtral, Roschdy Zem a pris quelques libertés avec la réalité historique.
Mais cela lui permet de montrer comment la France coloniale a accepté la notoriété de celui qui s’appela un temps Rafael Padilla tant qu’il sut rester à sa place, se laissant, à chaque représentation, botter les fesses par son acolyte blanc, Footit (Foottit à l’état civil). La hiérarchie raciale alors en vigueur était ainsi respectée. Dans le film, la déchéance commença lorsque, grisé par son succès, le « nègre » entendit s’émanciper et monter sur les planches pour interpréter « le seul rôle dévolu à un Noir », Othello.
Le choix d’Omar Sy
Un scénario qui aborde la question de la place des Noirs et de leur représentation au théâtre et qui n’est pas sans faire écho au débat actuel animant la scène culturelle française. Il y a quelques mois, d’aucuns se sont émus d’apprendre que le théâtre de l’Odéon entendait monter un Othello blanc en raison de « la difficulté que pose le choix de l’interprète pour le rôle-titre ».
En choisissant Omar Sy pour incarner Rafael Padilla, la production a opté pour l’une des personnalités préférées des Français – bancable donc -, qui a été le premier et unique Noir à recevoir le César du meilleur acteur, en 2012, pour son rôle dans Intouchables, un film qui a parfois été décrié tant il pouvait véhiculer un certain nombre de clichés sur les Noirs et les « jeunes de banlieue ».
Alors que la polémique enfle aux États-Unis à l’occasion des Oscars 2016, pour lesquels aucun acteur noir n’est nommé et que les stars africaines-américaines appellent à boycotter, les Césars français ont dévoilé leur sélection. Si quelques comédiens « issus de la diversité » y figurent, aucun Noir n’a été pressenti. Une situation extrêmement fréquente au théâtre à l’occasion de la cérémonie des Molières. Force est de constater que, près de cent ans après la mort de Rafael Padilla, la situation n’a guère évolué.
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