Dans la tourmente, Petroci se restructure pour survivre

En grande difficulté, la compagnie publique ivoirienne, qui vient de changer de direction, a réduit ses effectifs et s’apprête à céder ses stations-service.

La Petroci souhaite poursuivre ses travaux d’exploration pétrolière à l’international. © AFP

La Petroci souhaite poursuivre ses travaux d’exploration pétrolière à l’international. © AFP

Publié le 25 février 2016 Lecture : 3 minutes.

Alors qu’il n’a même pas encore annoncé sa stratégie pour relancer la Société nationale d’opérations pétrolières de Côte d’Ivoire (Petroci, holding de toutes les compagnies pétrolières publiques ivoiriennes), Ibrahima Diaby, officiellement nommé directeur général en décembre, a dû gérer son premier conflit social. Le licenciement, début janvier, d’une quarantaine de salariés, dont une dizaine de cadres supérieurs, a en effet provoqué un mouvement de grève, qui s’est conclu par un accord avec la direction sur la réparation du préjudice causé aux salariés remerciés.

Frappée de plein fouet par la chute du cours de l’or noir, la société, à l’instar de ses consœurs africaines et internationales, s’est lancée dans une restructuration. Outre la réduction de ses effectifs, elle a entamé des négociations avec Puma Energy (filiale de Trafigura) en vue de lui céder son réseau d’une quarantaine de stations-service, dont une trentaine en activité. Le prix de la cession, qui ne sera fixé qu’après un audit préalable (due diligence), pourrait tourner autour de 20 milliards de F CFA (30,5 millions d’euros).

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Cette somme apporterait une bouffée d’oxygène à la compagnie publique, qui broie actuellement du noir. Ses recettes, qui proviennent du brut extrait des champs en production dans l’offshore, ont en effet chuté de 75 %. Pour l’exercice 2015, l’entreprise s’attend à essuyer une perte de 24,8 milliards de F CFA (bien que le chiffre d’affaires global ait augmenté, de 236 milliards de F CFA en 2014 à 245 milliards en 2015).

Le pipeline pétrolier et gazier Abidjan-Yamoussoukro a coûté 160 milliards de F CFA au lieu des 121 milliards budgétisés

Les difficultés de Petroci datent cependant d’avant la chute du cours du baril de pétrole. En 2013, Daniel Gnangni, l’ancien directeur général et actuel président de la compagnie, avait commandité un audit au cabinet 2AC. Outre un endettement colossal, dont une dette auprès de l’État estimée à 15 milliards de F CFA à l’époque, l’enquête a révélé de graves dysfonctionnements, des acquisitions hasardeuses (comme celle du réseau Chevron en 2008, pour un montant de 32 milliards de F CFA) ainsi que des surfacturations de projets.

Le pipeline pétrolier et gazier Abidjan-Yamoussoukro, dont l’objectif était de pouvoir distribuer les produits pétroliers d’Abidjan vers le centre de stockage de Yamoussoukro en désengorgeant l’autoroute, saturée de camions-citernes, a ainsi coûté 160 milliards de F CFA au lieu des 121 milliards budgétisés. Pis, ce pipeline présente des défaillances techniques qui empêchent de l’utiliser de façon optimale.

Quelles mesures seront appliquées?

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Sur le segment de la distribution des produits pétroliers, l’entreprise publique a perdu 6,6 % de part de marché au cours des quatre dernières années, en raison de la concurrence de Shell et de Total, mais aussi à cause de l’échec du modèle de gérance libre, qui permet à un privé de gérer une station-service en versant des intérêts et frais de location à Petroci.

« Les mesures que j’applique aujourd’hui ne viennent pas de moi. Ce sont des recommandations des différents audits réalisés en 2013 et 2014 », explique Ibrahima Diaby. Le nouveau directeur général affirme qu’il va se concentrer sur l’exploration et la production de pétrole, en « maintenant la présence des groupes pétroliers dans l’off-shore ivoirien malgré la conjoncture internationale ». Il entend aussi relancer des projets stratégiques dans le gaz naturel en vue d’assurer l’approvisionnement continu des centrales thermiques déjà en fonction ou à construire, notamment celles de ContourGlobal et de Starenergie.

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Mais, dans l’immédiat, priorité à la stabilisation de la compagnie. La nouvelle direction établit désormais son budget sur la base du cours du baril de pétrole, entre 26 et 35 dollars, contre 45 dollars auparavant. « Petroci est la première entreprise du pays. La sauver est une priorité pour le président Alassane Ouattara, qui nous a donné des instructions fermes », confie Adama Toungara, ministre du Pétrole et de l’Énergie.

IBRAHIMA DIABY, LES MAINS DANS LE CAMBOUIS

C’est à lui que revient la lourde responsabilité de redresser la compagnie pétrolière publique. Fin connaisseur de l’industrie pétrolière, cet homme de 63 ans a déjà travaillé au sein de la Petroci, entre 1984 et 1989. Depuis, il a été successivement conseiller du ministre du Pétrole et de l’Énergie Adama Toungara, dont il est très proche, et directeur général des Hydrocarbures du même ministère. Ce géologue de formation est par ailleurs coagent de la Côte d’Ivoire dans la procédure en arbitrage sur le tracé de la frontière maritime avec le Ghana pendante devant le Tribunal international du droit de la mer.

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