Livres – Haïti : « Mémoire en colin-maillard », de Anthony Phelps

Ce n’est pas un texte nouveau, c’est un texte fondamental. Anthony Phelps, né en Haïti en 1928, l’a écrit en 1971, mettant le point final à l’heure où le dictateur François Duvalier passait enfin l’arme à gauche.

L’écrivain Anthony Phelps. © Ed. Le Temps des Cerises/DR

L’écrivain Anthony Phelps. © Ed. Le Temps des Cerises/DR

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Publié le 17 mars 2016 Lecture : 1 minute.

À Piétonville en janvier. © Orlando Barria/EFE/MAX PPP
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Littérature : Haïti, épicentre poétique

Malgré les aléas de l’Histoire et les catastrophes naturelles, la première République noire est une terre de création féconde. Une terre où une riche littérature francophone se déploie dans un univers créole, où les romanciers sont des poètes et les poètes des romanciers, où la mort rôde et nourrit une vitalité artistique des plus foisonnantes.

Sommaire

Mémoire en colin-maillard est réédité aujourd’hui par Le Temps des cerises, et c’est une bonne chose. Puissant, dérangeant, ce roman charnel propulse celui qui s’aventure au rythme de ses phrases dans la conscience embrouillée de Claude, jeune homme isolé dans les hauteurs de la maison familiale, sur un balcon que caresse l’ombre mouvante d’un muscadier. De là, il guette et tire sur les tontons macoutes, la cruelle milice de Papa Doc. Ou bien peut-être rêve-t-il qu’il flingue ces hommes sans pitié qui sont venus dans l’école tenue par sa mère pour enlever deux enfants, Guy et Jacques Colin, par mesure de rétorsion envers leur opposant de père ? Quelqu’un, il le sait, les a donnés, mais qui ? L’écriture poétique et sensuelle de Phelps s’accorde aux éclats de lucidité de Claude comme à ses embardées délirantes, brouillant pistes et repères pour mieux restituer l’horreur d’une vérité inacceptable. Parfois, la jeune domestique Mésina monte lui donner de l’amour. D’autres fois, c’est son père ou sa mère qui viennent lui parler, cette dernière attendant en vain qu’il descende l’aider à féconder les fleurs de vanillier. Mais le temps des fleurs n’est plus et lui n’en peut plus, étouffe sous le poids du mensonge, voudrait se libérer en étranglant à mains nues le tyran qui l’a conduit dans l’impasse mortelle où il se trouve.

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Mémoire en colin-maillard, de Anthony Phelps, éd. Le Temps des cerises, 114 pages, 13 euros.

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