Tunisie : président, où es-tu ?

Meurtris par une attaque jihadiste le 7 mars, les habitants de Ben Guerdane attendaient du réconfort. Las, il aura fallu sept jours au chef du gouvernement pour faire le déplacement. Béji Caïd Essebsi, lui, n’est pas venu.

Policiers tunisiens postés à Ben Guerdane (est) après les attaques jihadistes qu’a connues cette région. © Feres Najar/AP/SIPA

Policiers tunisiens postés à Ben Guerdane (est) après les attaques jihadistes qu’a connues cette région. © Feres Najar/AP/SIPA

ProfilAuteur_SamyGhorbal

Publié le 23 mars 2016 Lecture : 2 minutes.

À une semaine d’intervalle, la Tunisie, à Ben Guerdane le 7 mars, et la Côte d’Ivoire, à Grand-Bassam le 13, ont été frappées par le terrorisme islamiste. Dans les deux cas, ces attaques ont déclenché un puissant réflexe d’unité nationale. « Le terrorisme ne passera pas et ne nous fera pas plier », ont semblé dire en chœur Tunisiens et Ivoiriens.

Ce télescopage a néanmoins plongé les habitants de Ben Guerdane dans la perplexité. Ils s’étaient déjà étonnés de l’absence de leurs dirigeants, le président Béji Caïd Essebsi et le chef du gouvernement, Habib Essid, aux funérailles de leurs onze martyrs, le 9 mars. Et n’avaient été qu’à moitié convaincus par l’explication donnée : la présence de responsables de haut rang, qu’il aurait fallu protéger, risquait de gêner ou de retarder les opérations de ratissage qui se poursuivaient.

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Cette incompréhension s’est transformée en franche amertume le dimanche suivant, lorsqu’ils ont vu le chef de l’État ivoirien, Alassane Dramane Ouattara, se précipiter à Grand-Bassam, dès les premières heures, pour réconforter les habitants et rendre hommage aux membres des forces spéciales qui avaient neutralisé le commando d’Aqmi.

Un hommage manqué aux habitants de Ben Guerdane

Certes, les circonstances sont différentes et les distances ne sont pas les mêmes : Grand-Bassam se situe à une quarantaine de kilomètres d’Abidjan alors que Ben Guerdane est à quelque 600 km de Carthage. On ne peut cependant s’empêcher de penser que les responsables tunisiens auraient dû faire plus et mieux pour témoigner leur sympathie à leurs compatriotes meurtris du Sud. Habib Essid n’a pas été insensible à leur drame. Il a installé, bien en vue, sur son bureau, la photo d’Abdelaati Abdelkabir, le chef de l’unité antiterroriste locale, tombé en martyr. Mais pourquoi diable avoir attendu sept jours avant de faire un déplacement aux allures de visite d’inspection ?

Les dernières élections, en 2014, avaient mis en évidence la fracture entre le Nord, très majoritairement acquis à Béji Caïd Essebsi, et le Sud, qui avait plébiscité son adversaire, Moncef Marzouki. Beaucoup avaient alors glosé sur un prétendu manque de patriotisme des sudistes, plus enclins à lorgner du côté de la Libye que de Tunis. En s’opposant aux visées des assaillants de Daesh, en collaborant activement avec les forces de sécurité dans la traque des assaillants, les habitants de Ben Guerdane ont opposé un cinglant démenti à ceux qui doutaient de leur loyauté républicaine. Dommage, vraiment, que les dirigeants tunisiens aient manqué l’occasion de leur rendre l’hommage qu’ils méritaient…

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