Zika au Brésil : faux départ pour les JO 2016

À six mois de l’ouverture officielle des compétitions olympiques (5-21 août), le virus Zika se propage au Brésil à la vitesse grand V. Du coup, l’état d’urgence sanitaire a été proclamé.

Image174011.jpg © SACK/STAR TRIBUNE

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Publié le 26 mars 2016 Lecture : 3 minutes.

On entendrait un moustique voler dans cette classe du collège militaire de Juazeiro, dans l’État de Bahia. On comprend que la professeure occasionnelle laisse les élèves sans voix : elle se nomme Dilma Rousseff ! Vêtue d’un tee-shirt blanc portant la mention « zéro Zika », la présidente fait la leçon aux collégiens sous l’œil des caméras : « Je vous demande d’aider vos parents en consacrant quinze minutes par semaine à la recherche d’endroits où les moustiques sont susceptibles de naître, de se développer, puis de piquer quelqu’un. »

On l’aura compris : la guerre au moustique Aedes aegypti étant déclarée, Rousseff multiplie les sorties médiatiques pour suggérer que l’épidémie est sous contrôle – ce qui reste à démontrer. Si les effets de Zika sont encore mal connus, sa prolifération est impressionnante. Au Brésil, plus de 1,5 million de personnes ont été contaminées depuis l’an dernier.

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Au départ, on croyait le virus Zika bénin. Il est désormais fortement soupçonné de provoquer des malformations chez les nouveau-nés. Les chercheurs brésiliens ont pour l’heure confirmé l’existence de 745 cas de microcéphalie qui lui sont liés, tandis que 4 231 cas sont en cours d’examen. Plus grave, dans une récente enquête publiée par The Lancet, une revue scientifique britannique, des chercheurs ont établi un lien entre Zika et le syndrome de Guillain-Barré, un trouble neurologique grave capable d’entraîner la mort.

Une menace pour les Jeux

À six mois de l’ouverture des Jeux olympiques (5-21 août), qu’il organise, le Brésil se serait bien passé d’une telle crise sanitaire. Plus de 10 000 athlètes et des centaines de milliers de touristes sont attendus. Pour le chef de l’État, la question d’une éventuelle annulation ne se pose même pas. Elle veut voir le verre à moitié plein : « C’est de janvier à juin que la prolifération est la plus importante. Pendant les Jeux, il y aura une vertigineuse diminution du nombre des moustiques. Et nous apportons une attention toute particulière aux lieux qui accueilleront des touristes. »

La santé de nos athlètes passe avant les Jeux, a déclaré Kipchoge Keino

Certains pays, comme le Kenya, menacent de ne pas envoyer leurs athlètes au Brésil. « S’il apparaît que ce virus est vraiment dangereux, nous n’irons pas […] La santé de nos athlètes passe avant les Jeux », a déclaré Kipchoge Keino, l’ex-star du demi-fond, qui préside aujourd’hui le Comité national olympique. Jackson Tuwei, le président de la fédération d’athlétisme, se montre plus circonspect : pas question, selon lui, de prendre une quelconque décision de boycott sans consultation préalable des autorités sanitaires et du gouvernement kényans. « Je pense que nous aurons trouvé une solution d’ici au mois d’août », estime-t-il.

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Le pays est-il prêt à accueillir les JO ?

En attendant, le Brésil a bien d’autres problèmes urgents à résoudre. De l’aveu même d’Eduardo Paes, le maire de la ville, la dépollution de la baie de Rio est un échec complet : « Je trouve dommage, dit-il, que les JO n’aient pas été l’occasion de régler le problème une fois pour toutes. » Quinze communes de l’agglomération y déversent leurs excréments et leurs déchets. Plusieurs athlètes à l’entraînement ont déjà été victimes de fièvres, de diarrhées ou de vomissements.

85 000 policiers et militaires seront mobilisés pour assurer la sécurité – soit deux fois plus qu’à Londres en 2012

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L’avancement des travaux se poursuit en revanche à un rythme soutenu. Selon Paes, 97 % des infrastructures sont déjà prêtes. Quant au métro qui reliera les quartiers d’Ipanema et de Copacabana au parc olympique, il sera achevé un mois avant l’échéance. Et pour que la fête soit « inoubliable », comme le dit Mario Andrade, le porte-parole du Comité olympique, 85 000 policiers et militaires seront mobilisés pour assurer la sécurité – soit deux fois plus qu’à Londres en 2012. Ce déploiement de force est sans doute nécessaire dans ce pays où l’on recense plus de 56 000 homicides par an.

Reste que les lendemains de fête pourraient être difficiles en raison de la crise économique sans précédent qui frappe le pays : le PIB a reculé de 3,8 % en 2015, le chômage avoisine 8 %, et l’énorme scandale Petrobras (lire pp. 50-52) plombe toute perspective d’amélioration à court terme.

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