Intégration régionale : pourquoi ça ne marche pas

Cemac, Cedeao, UMA… Les communautés économiques sont nombreuses sur le continent. Alors comment expliquer que les échanges entre leurs différents pays ne décollent pas ?

Siège de la Banque d’investissement et de développement (BIDC) de la Cedeao dans la ville de Lomé. © Jacques TORREGANO pour Jeune Afrique

Siège de la Banque d’investissement et de développement (BIDC) de la Cedeao dans la ville de Lomé. © Jacques TORREGANO pour Jeune Afrique

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© Vincent Fournier pour JA

Publié le 22 mars 2016 Lecture : 3 minutes.

Ouverture du CEO Forum à Abidjan © DR
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Côte d’Ivoire : 4e édition de l’Africa CEO Forum à Abidjan

Une centaine de VIP de l’économie africaine (et les 800 participants) sont annoncés les 21 et 22 mars à la quatrième édition du Africa CEO Forum, en Côte d’Ivoire.

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C’est un fait, l’intégration régionale est un échec en Afrique. Les dirigeants du continent ont beau appeler, depuis plusieurs décennies, à la création de marchés communs et multiplier les accords pour favoriser l’essor du commerce entre leurs économies respectives, le résultat reste décevant. L’Afrique ne représente qu’un ridicule 2 % du commerce mondial. Et quand les Européens réalisent l’essentiel de leurs échanges entre eux (environ 70 %), tout comme chez les dragons asiatiques (50 %), ce chiffre plafonne à environ 11 % entre les économies africaines.

Sur le papier, l’Afrique est pourtant une championne de l’intégration régionale. Elle compte pas moins de 14 blocs régionaux, censés représenter autant d’espaces de libre circulation des personnes, des biens et des services. Certains États sont même membres de plusieurs organisations régionales à la fois. Mais, sur le terrain, les obstacles auxquels sont confrontées les entreprises opérant dans différents pays africains sont légion.

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Leurs tarifs douaniers sont parmi les plus élevés du monde : 8,7 % en moyenne contre 2,5 % sur les autres continents. Il faut facilement dix-sept jours pour transporter des marchandises du port de Tema, au Ghana, à Ouagadougou, au Burkina Faso, deux villes distantes de seulement 1 000 km. Il y a deux ans, le tycoon nigérian Aliko Dangote signalait, non sans ironie, qu’il avait besoin de 38 visas pour faire le tour des 54 pays du continent, soit bien plus que s’il avait été détenteur d’un passeport américain ou britannique.

Cedeao meilleur élève que Cemac et UMA

Il est vrai qu’il ne faut pas mettre toutes les régions dans le même panier. Si la Communauté économique et monétaire des États de l’Afrique centrale (Cemac) et l’Union du Maghreb arabe (UMA) sont considérées comme des cancres en matière d’intégration, avec un commerce interrégional ne représentant que 3 % du total de leurs échanges, la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) s’en tire mieux (9,4 %). Et, au sein de la Communauté d’Afrique de l’Est (EAC) et de la Communauté de développement d’Afrique australe (SADC), cette proportion atteint 12 % ou 13 %. Il n’empêche que globalement, on est encore loin, bien loin du compte.

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Pourquoi l’intégration régionale ne prend pas sur le continent ? La question s’impose alors que le contexte économique mondial, plombé par la chute des cours des matières premières, et notamment ceux du pétrole, est devenu très volatil, pénalisant la dynamique de croissance observée en Afrique ces dernières années. Et alors que les économistes sont nombreux à soutenir que le continent doit, pour continuer sur sa lancée, consacrer les années à venir à la création de davantage de valeur et surtout à celle de véritables marchés régionaux.

Mais comment ? « La principale question que devraient se poser les États africains est : « que pouvons-nous échanger entre nous ? » » estime l’économiste Bineswaree Bolaky, de la Cnuced, interrogée récemment par The Economist. En effet, la réponse à cette question explique en majeure partie l’échec des politiques actuelles d’intégration régionale. Au sein de plusieurs blocs régionaux, en Afrique de l’Ouest par exemple, la plupart des pays offrent souvent les mêmes types de produits. Par ailleurs, le continent, et notamment sa partie subsaharienne, manque encore cruellement de pays pouvant servir de base industrielle capable d’absorber les matières premières venant des économies voisines et ainsi permettre la création, comme cela est le cas en Asie, de chaînes de production régionale.

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Mais, par-dessus tout, la volonté politique doit être extrêmement forte. C’est elle qui doit donner aux institutions régionales, qui aujourd’hui ne remplissent que des fonctions administratives, les moyens de mener à bien leur mission. Cela semble être le cas dans une partie du continent : en juin 2015, l’un des plus importants accords commerciaux au monde a été signé en Égypte. La Tripartite Free Trade Area (TFTA) réunit la Comesa (Marché commun de l’Afrique orientale et australe), l’EAC et la SADC, soit 26 pays pesant au total plus de 1 000 milliards de dollars (plus de 910 milliards d’euros) en PIB. À l’occasion du Africa CEO Forum, qui se tient les 21 et 22 mars à Abidjan – pour la première fois en Afrique -, J.A. a donné la parole aux patrons sur ce sujet essentiel à l’essor de leurs entreprises.

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