Saliou Diallo, PDG de la Sonoco en Guinée : du four au moulin

De simple vendeur de pain chaud dans les rues de Conakry, Saliou Diallo est devenu PDG de Sonoco, un groupe qui réalise un chiffre d’affaires de plusieurs millions de dollars.

« L’homme d’affaires est comme le militaire, il doit servir chaque régime de la même façon. » © SYLVAIN CHERKAOUI POUR J.A.

« L’homme d’affaires est comme le militaire, il doit servir chaque régime de la même façon. » © SYLVAIN CHERKAOUI POUR J.A.

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Publié le 13 avril 2016 Lecture : 3 minutes.

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Comme beaucoup de ses camarades, Mamadou Saliou Diallo est arrivé à Conakry à l’âge de 14 ans, sans aucun bagage, depuis Kégnéko, une bourgade des environs de Mamou, en Moyenne Guinée. C’était au milieu des années 1970. Aujourd’hui, à 54 ans, « Saliou Kégnéko », comme on le surnomme, est PDG de la Société nouvelle de commerce (Sonoco), un groupe composé de cinq filiales spécialisées dans la minoterie (Les Moulins d’Afrique, LMA), le transport et la logistique (AM Transit), la métallurgie (Métal Import), la construction et l’immobilier (Global Investment and Construction, GIC) et la finance (Nouvelle Compagnie d’investissement, NCI). Son poids : 800 emplois directs et un chiffre d’affaires de plusieurs millions de dollars.

Un parcours d’autodidacte

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Le patron de Sonoco n’est pas complexé par son parcours d’autodidacte, bien au contraire. « Le prophète Mohammed fut un messager de Dieu alors qu’il était analphabète », se plaît-il à rappeler, avant de souligner qu’il n’ignore pas pour autant la valeur ajoutée des études et qu’il a su s’entourer de gens bien formés, parmi lesquels son fils aîné, Abdoul Karim Diallo. Directeur général adjoint du groupe depuis 2009, ce dernier est diplômé en marketing et communication de l’Institute for Leadership and Communication Studies (ILCS) de Rabat et a suivi un cursus en management et stratégie à la Columbia Business School de New York.

« En 1984, se souvient Mamadou Saliou Diallo, j’arpentais les ruelles de Conakry, où je revendais du pain chaud fraîchement sorti du four. Je comptais chaque jour mes quelques centimes de bénéfice et passais la nuit à la porte des boulangeries pour être servi le premier, avant l’aube… Je connaissais la plupart des fours de Conakry ! » Alors sur le point de retourner au village (« ce qui aurait été synonyme d’échec et de découragement », confie-t-il), le jeune homme parvient à diversifier ses activités grâce à « une somme insignifiante » que lui prête sa belle-mère.

Pour importer des marchandises, il multiplie les voyages dans la sous-région, en Angola, puis à Singapour et à Djakarta

« J’ai touché à tout, sauf à des activités illicites, s’empresse-t-il de préciser. Par exemple, j’ai vendu des médicaments, mais dès qu’on a commencé à dire : « Celui-là est bon, tel autre est mauvais », j’ai préféré abandonner. » Pour importer des marchandises, il multiplie alors les voyages dans la sous-région, en Angola, puis à Singapour et à Djakarta. Jusqu’à ce qu’il ait les reins assez solides pour quitter le secteur informel.

En 1992, il fonde la Société guinéenne d’investissement (SGI), active principalement dans l’importation de farine de blé et la logistique, laquelle, en 2004, donne naissance au groupe Sonoco. En partenariat avec son fournisseur marocain, Les Moulins Lahal, Mamadou Saliou Diallo crée LMA, dont la minoterie a été inaugurée en mars 2014 à Conakry, dans une zone industrielle de la commune de Matoto. Le complexe comprend deux moulins, qui peuvent produire jusqu’à 900 tonnes (t) de farine de blé par jour, une unité d’emballage et une chaîne de production de son destiné à l’alimentation animale (6 500 t/mois).

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De 14 000 euros à 25 millions

« Nous avons commencé il y a plus de vingt ans avec l’équivalent de seulement 14 000 euros, et aujourd’hui nous sommes à la tête d’un moulin qui représente plus de 25 millions d’euros d’investissement », se félicite Mamadou Saliou Diallo, qui envisage déjà de développer les capacités de la minoterie afin d’exporter dans la sous-région. Pour l’heure, le grand chantier de Sonoco, via sa filiale GIC, est celui de l’Hôtel Niger, un immeuble de 11 étages (190 chambres), en construction sur une concession de l’État à Kaloum, le quartier des affaires de Conakry.

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Les trois conseils de Saliou Kégnéko à ceux qui veulent entreprendre : respecter l’éthique et la parole donnée, avoir une relation de confiance avec ses partenaires et ne pas se mêler de politique, même si l’on est amené à en côtoyer les acteurs. « L’homme d’affaires est comme le militaire, il doit servir chaque régime de la même façon, explique-t-il. Je travaille honnêtement, avec tout le monde, en restant apolitique. »

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