Cellou Dalein Diallo : « La population va devoir payer, mais elle dit non »
Cellou Dalein Diallo, président de l’Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG), a accordé une interview à Jeune Afrique, dans l’édition publiée le 3 avril. Nous avions publié une première partie de l’interview le 26 février dernier (à retrouver grâce au lien en fin d’article).
Le patient guinéen
Passé la réelection d’Alpha Condé, puis l’annonce de la fin de l’épidémie d’Ebola qui a isolé le pays pendant deux ans, la Guinée prend un nouveau départ. Mais le redémarrage s’avère plus laborieux que prévu.
Originaire de Labé, dans le Fouta-Djalon, économiste de formation et de profession, Cellou Dalein Diallo, 64 ans, a occupé plusieurs postes ministériels de 1996 à 2004 (Transports, Télécommunications, Environnement, Travaux publics, Pêche), jusqu’à sa nomination en tant que Premier ministre (décembre 2004-avril 2006). Depuis qu’il s’est incliné face à Alpha Condé au second tour de la présidentielle de 2010, le leader de l’Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG, parti social-libéral) est l’un des plus farouches adversaires du chef de l’État.
Jeune Afrique : Comment jugez-vous le début du second mandat d’Alpha Condé ?
Cellou Dalein Diallo : Difficile ! La crise sociale et économique est très sérieuse. La pauvreté a augmenté, le chômage aussi. L’endettement de l’État auprès des banques s’est accru de 1 860 milliards [de francs guinéens, soit environ 220 millions d’euros]… Aujourd’hui, le gouvernement veut faire payer cette facture à la population en augmentant la TVA et en l’étendant aux biens de première nécessité. Il a aussi refusé d’appliquer le principe de la flexibilité du prix du carburant.
Le FMI et la Banque mondiale ont exigé que l’État rembourse chaque mois à la Banque centrale l’équivalent de 170 milliards de francs guinéens
À quel point la situation économique et le climat social vous inquiètent-ils ?
Tous les indicateurs sont au rouge. En 2014 et en 2015, l’État a conclu des contrats de gré à gré pour près de 800 millions de dollars [713 millions d’euros], alors que ces dépenses n’étaient pas inscrites dans le budget. Naturellement, cela s’est traduit par une hémorragie dans les réserves de change, une augmentation de la masse monétaire et une forte dépréciation de notre monnaie nationale.
Le FMI et la Banque mondiale ont exigé que l’État rembourse chaque mois à la Banque centrale l’équivalent de 170 milliards de francs guinéens. Pour y parvenir, il faut augmenter les recettes et contenir les dépenses. Et c’est la population qui va devoir payer, mais elle dit non.
Si encore cette situation était liée à la conjoncture ou à des facteurs externes… Mais tout cela est le résultat d’une mauvaise gouvernance. Celle d’Alpha Condé, qui a financé sa mascarade électorale en faisant marcher la planche à billets.
Où en est le bras de fer qui vous oppose à Bah Oury depuis son exclusion de l’UFDG ?
Il est exclu du parti, dont il n’a respecté ni les statuts ni le règlement intérieur. L’ensemble des fédérations, de nos députés et tous les membres du conseil politique ont soutenu la décision de la direction nationale. Il n’y a plus de problème Bah Oury. Le parti poursuit ses activités, nous continuons à tenir nos bureaux exécutifs et nos assemblées générales, et nous préparons les élections locales.
Ne craignez-vous pas des représailles de Bah Oury à la suite des événements du 5 février devant le siège de l’UFDG ?
Je n’exclus pas qu’il tente une action en justice. Mais je pense que la justice, malgré tous les préjugés qu’on peut avoir sur elle, fera son travail conformément à la loi. Si c’est le cas, nous n’avons rien à craindre.
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