Côte d’Ivoire – FPI : divorce à l’ivoirienne

Nouveau secrétariat général, nouvelle organisation, plan de campagne pour le référendum et les législatives… À l’approche de son congrès, prévu fin mai, la direction du FPI a pris des mesures radicales afin de rabattre le caquet des frondeurs.

Fin février 2014, lors du dernier congrès du parti, avant qu’éclate la querelle de légitimité. © ISSOUF SANOGO / AFP

Fin février 2014, lors du dernier congrès du parti, avant qu’éclate la querelle de légitimité. © ISSOUF SANOGO / AFP

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Publié le 10 mai 2016 Lecture : 4 minutes.

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La nouvelle Côte d’Ivoire

Croissance, dynamisme, pacification… Le pays s’impose à nouveau comme le modèle à suivre en Afrique de l’Ouest. Six mois après sa réélection, Alassane Ouattara a cependant de nombreux défis à relever. Comme l’amélioration du quotidien des Ivoiriens, la future Constitution et la fusion du RDR et du PDCI.

Sommaire

Cinquante mètres seulement séparent l’ancien QG de Laurent Gbagbo du nouveau siège du Front populaire ivoirien (FPI), à Abidjan. Situé dans une impasse d’Attoban, au cœur de Cocody, le premier a gardé les souvenirs des grandes victoires des années 2000, mais porte aussi les stigmates des violences de la crise postélectorale de 2010-2011. L’ancien leader charismatique, Laurent Gbagbo, au travers des portraits écornés qui le représentent, y est omniprésent.

Derrière sa façade fraîchement repeinte en bleu, la maison qui accueille désormais la permanence du parti est quant à elle presque vide. Là, ce sont les affiches de Pascal Affi N’Guessan, patron du FPI et candidat à la présidentielle de décembre 2015, qui ont été placardées à la hâte sur les murs, comme pour atténuer l’écho et faire oublier le peu d’animation.

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La fin d’une union qui signe le renouveau du Front Populaire Ivoirien

Le FPI y a emménagé en mars, après avoir quitté en catimini le « QG Laurent Gbagbo », dont Nady Bamba, seconde épouse de l’ancien président, réclamait la propriété depuis un an. Bien que cette dernière ait été déboutée de sa plainte le 4 avril, la direction du parti semble pour le moment vouloir rester dans ses nouveaux quartiers. Un scénario digne de celui d’un couple qui se déchire…

« C’est un nouveau départ, on recommence de zéro », sourit Augustin Kouadio Komoé, l’une des chevilles ouvrières de la renaissance du premier parti d’opposition et désormais principal conseiller de Pascal Affi N’Guessan. Sur sa table de travail, un stylo, un ordinateur, un téléphone portable. Un environnement minimaliste pour ce juriste pragmatique et efficace, trois fois ministre, qui fut le chef de cabinet de Laurent Gbagbo durant la période clandestine des années 1980. « Le premier slogan de Gbagbo était « asseyons-nous et discutons ». Nous n’avons pas changé de discours », poursuit Augustin Kouadio.

Pourtant, face à la radicalisation de ceux qui, depuis fin 2014, mènent la fronde au sein du parti et contestent la légitimité de son président, le FPI a pris des décisions radicales. Le 2 mars, la dizaine de meneurs pro-Gbagbo, au premier rang desquels Aboudramane Sangaré et Laurent Akoun, ont été remerciés de la direction, mais restent membres du parti. « Nous ne leur fermons pas la porte, souligne Augustin Kouadio. Ils doivent cependant accepter d’avancer avec nous. »

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Après cette remise à l’heure des pendules et à quelques mois des législatives, la consigne est de retourner au contact des militants. Car si le résultat de son candidat à la présidentielle de 2015 a quelque peu déçu (9 %), il est suffisant pour que le FPI revendique le leadership de l’opposition et tente de séduire « tous les laissés-pour-compte de la croissance à deux chiffres ! » ironise Pascal Affi N’Guessan.

Ce dernier a d’ailleurs commencé à mener campagne dans sa région natale de Moronou, et vingt-huit vice-présidents régionaux ont été nommés pour en faire de même à travers tout le pays.

Je suis la caution Gbagbo au sein du nouveau FPI

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Pour ratisser large, un homme joue un rôle clé à la direction du parti : Konaté Navigué. Dans son nouveau bureau, il est le seul à avoir affiché le portrait de son idole de toujours, Laurent Gbagbo, et celui de son nouveau patron, « Affi ». « Je suis la caution Gbagbo au sein du nouveau FPI et je l’assume, affirme-t-il. J’ai été fidèle pendant dix ans au président [Gbagbo], et c’est moi qui dois convaincre les brebis égarées de revenir vers nous. Nos futurs députés représenteront toutes les tendances de nos militants. »

Nommé début mars secrétaire général adjoint chargé du dialogue politique et de la réconciliation, l’ancien patriote, responsable de la jeunesse au FPI et proche de Charles Blé Goudé, assume en effet son allégeance à la nouvelle direction, tout en conservant des liens avec les frondeurs.

Il existe désormais deux FPI : le sien, fidèle au leader exilé, et « l’autre », celui d’Affi N’Guessan, reconnu par les autorités.

« Faux ! rétorque l’un des principaux intéressés, Laurent Akoun. Aboudramane Sangaré et moi-même n’avons plus aucun contact avec les « Affinités » [les proches d’Affi]. Pascal Affi N’Guessan aime faire courir le bruit que nous sommes en contact, mais il n’en est rien. Ces gens ne font plus partie du FPI. » Car pour lui, à l’image des deux maisons bleues d’Attoban, il existe désormais deux FPI : le sien, fidèle au leader exilé, et « l’autre », celui d’Affi N’Guessan, reconnu par les autorités.

Un procès est actuellement en cours pour interdire aux frondeurs d’utiliser la marque FPI (lire pp. 85-86). « Cette guéguerre interne n’honore ni la mémoire des victimes de la crise ni celle de Laurent Gbagbo, emprisonné à La Haye », déplore Kouadio Konan Bertin (KKB). Le dissident du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), candidat à la dernière présidentielle, se dit en revanche prêt à participer au prochain congrès du FPI et, pourquoi pas, à travailler à la création d’une coalition de l’opposition.

De son côté, le FPI n’exclut pas de présenter aux législatives des candidats communs de l’opposition, avec tous les déçus du PDCI, voire du Rassemblement des républicains (RDR, parti présidentiel), même si cela s’annonce plus difficile. « Nous sommes unis, ils sont divisés ; nous avons un projet, ils n’en ont toujours pas. Ça ne peut que nous arranger », rétorque Joël N’Guessan, le porte-parole du RDR.

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